Soyez rassurés ! Soyez déçus ! Soyez ébahis ! Soyez circonspect ! Soyez tout cela à la fois, dans l’ordre, dans le désordre, à l’endroit ou à l’envers... Prenez surtout une heure de liberté pour écouter le nouvel album de
A FOREST OF STARS. Ou bien 4 heures pour commencer, parce qu’il va bien falloir l’écouter 4 fois d’affilée pour saisir quelques-unes de ses possibilités et passer par tous les sentiments décrits à l’instant.
Le groupe anglais qui aime se présenter comme une association de gentlemen de bonne compagnie et d’une femme toute aussi bien éduquée est donc de retour après un excellent
A Shadowplay for Yesterdays sorti en 2012, qui n’a pas pris une ride malgré les années et se déguste toujours avec plaisir. Ais il a décidé d’évoluer et ne se contente pas de reproduire ce qu’il a déjà prouvé savoir faire. Et ainsi, alors qu’il se plaisait à polir depuis ses débuts un monde inspiré de l’époque victorienne et créait des ambiances qui inondaient nos esprits d’images venues d’un autre temps,
Beware the Sword you Cannot See nous prend à contre-pied. Mais si la balle ne tombe pas là où on l’attendait, elle est très bien placée tout de même. Jeu, set et match ? On va voir ça.
Alors on reconnaît bien évidemment
A FOREST OF STARS car les bases musicales sont les mêmes mais voilà, l’univers est différent. Et quand je dis « univers » c’est aussi un indice sur le contenu de cette galette. Le groupe a décidé de s’épancher sur l’espace et crée de nombreuses brèches spatio-temporelles dans ses mélodies. Regardez la pochette, voilà, c’est ça, on pénètre dans une monde de monstres, de créatures étranges, de squelettes danseurs. Le CD en lui-même est d’ailleurs constellé d’étoiles. Et ce sont donc des ambiances cosmiques qui s’invitent régulièrement le long de l’heure de jeu, un peu comme les incursions que propose
GERM. On aurait facilement pu sous-titrer cet album : « Les mystères de l’espace »... Et malheureusement pour moi, ce n’est pas vraiment le tournant que j’espérais pour le groupe...
Cependant cela n’est qu’un aspect du groupe qui continue de jouer au fourre-tout organisé, faisant à nouveau penser à un
SIGH en plus sage ou un
THE MEADS OF ASPHODEL plus mélodieux. Je me mets donc toujours à genoux devant les mélanges sournois et tournoyants d’agressivité avec des mélodies au violon, à la flûte, au violoncelle ou au synthétiseur quand ce ne sont pas des chœurs, masculins ou féminins, qui viennent nous émoustiller. Chaque titre, ou plutôt chaque minute de l’album est extrêmement pimentée et très fort sera celui qui pourra deviner ce qui l’attend quelques secondes plus tard. Le génie est donc bel et bien là, derrière un travail minutieux, impressionnant. Il faut tout de même signaler que le côté obscur et torturé du groupe a à nouveau reculé, ce qui me laisse sur ma faim.
Je ferais aussi un parallèle avec
CARACH ANGREN qui vient lui aussi de sortir un nouvel album, et qui souffrait d’un mal assez proche : l’importance trop forte du concept.
A FOREST OF STARS raconte sur ses albums des histoires, et quand on raconte une histoire on ne peut pas toujours privilégier les ambiances. Il faut respecter l’évolution de son conte. Ici le problème se manifeste principalement sur la saga de deuxième partie d’album. « Pawn on the Universal Chessboard » est un titre de 22 minutes découpé en 6 parties. Chaque partie forme une piste mais s’encastre avec la suivante pour réellement composer un ensemble de 22 minutes. Ne les écoutez pas individuellement, cela n’aurait aucun sens puisque c’est véritablement un ensemble logique. Eh bien ce long titre est parsemé de longueurs. Il a ses bons moments (« Part 5 Lowly Worm » surtout), mais on sent vraiment que l’efficacité aurait été dédoublée en raccourcissant plusieurs parties.
Un petit mot sur les vocaux. On retrouve là encore les grognements habituels, des complaintes au timbre grave qui prennent souvent les allures déclamatives nécessaires pour le scénario de l’opus. Et à nouveau comme
CARACH ANGREN on trouve une façon de chanter narrative à la
BAL-SAGOTH (« Drawing Down the Rain » et « A Blaze of Hammers »). Difficile de tout aimer, mais il y a de l’idée. Gros coup de cœur d’ailleurs pour l’intervention plaintive à la 6ème minute de « Hive Mindless », frissons garantis.
Alors au final,
Beware the Sword you Cannot See est-il meilleur ou moins bon que
A Shadowplay for Yesterdays ? Eh bien le fait qu’il s’attaque à des ambiances différentes nous évite de répondre à cette question. Personnellement je reste fan du précédent car ses thèmes et ambiances me plaisaient plus, mais si vous aimez les voyages spatiaux, celui-ci vous conviendra plus...
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