Antichrist - Sacrament Of Blood
Chronique
Antichrist Sacrament Of Blood
Laissons un peu de côté les albums sortis ces derniers mois pour nous plonger dans la chronique d’un disque paru pour la première fois en 2011 mais dont l’enregistrement remonte pourtant au début des années 1990. Ce n’est probablement pas la première fois que vous entendez ce genre d’histoires mais si le monde de la musique est plein d’anecdotes de ce genre, il est cependant toujours aussi surprenant de constater qu’un album puisse être ainsi laissé dans l’ombre pendant presque vingt ans. Quelles sont alors ces raisons qui ont pu pousser/mener un groupe à oublier une œuvre, son œuvre, dans les tiroirs pendant ce qui semble être une éternité? Une question à laquelle il est souvent facile de répondre (généralement pour des questions juridiques) mais qui parfois reste sans réponse...
Pour la petite histoire, sachez que la carrière du groupe canadien est étroitement liée à celle de Blasphemy. Les deux formations ont en effet partagé le même studio de répétition au début des années 90 ainsi qu’un guitariste en la personne de The Festering Arsonist qui a d’ailleurs momentanément rejoint le groupe en 1993 pour la tournée européenne "Fuck Christ Tour".
Si les débuts d’Antichrist se font à la fin des années 80 sous le nom d’Armageddon, les choses sérieuses débutent véritablement en 1990 lorsque le groupe est rejoint par Goat Fucker (chant), Rotting Corpse (guitare) et The Unknown One (basse). Nocturnal Grave Desecrator And Black Winds de Blasphemy leur suggère alors le nom d’Antichrist. Une proposition très vite adoptée qui s’accompagne également d’un certain changement de style puisque le groupe va abandonner le Death Metal de ses débuts pour s’orienter vers un Black Metal primitif particulièrement proche de celui de ses compatriotes.
Entre 1990 et 1994, Antichrist va donner un peu moins de dix concerts avant d’entrer en studio pour l’enregistrement de Sacrament Of Blood. Celui-ci se fera "live" (tous les instruments enregistrés en même temps) en l’espace d’une seule journée. Malheureusement l’album ne verra jamais le jour (du moins pas avant 2011), les membres d’Antichrist ayant a priori été très vite rattrapés par leurs obligations quotidiennes... Il faudra attendre que Ryan Förster (Blasphemy, Conqueror, Ross Bay Cult) prennent les choses en main avec l’aide de Goat Fucker et Rotting Corpse pour que soit enfin exhumé les bandes de Sacrament Of Blood. Nuclear War Now! se greffera alors au projet pour la sortie, dix-sept ans plus tard, de ce premier album resté jusque-là inédit.
Malgré un remastering ayant servi à donner un léger coup de fouet à une production probablement un poil désuète, l’artwork signé Wes Ganley porte en lui tous les stigmates des plus mauvaises pochettes que le genre ait pu porter. Celle-ci exprime pourtant chez moi un certain paradoxe, la trouvant à la fois grandiose et terriblement gênante, d’ailleurs très probablement pour les mêmes raisons. Il faut dire qu’entre ce trait grossier, ces proportions hasardeuses, cette perspective médiocre et tous les clichés qu’elle véhicule, il y a effectivement de quoi sourire (ou vomir, c’est selon). Mais, croyez-moi, vous auriez tort de vous arrêter à ce simple détail.
Pour ce qui est du reste, Antichrist pratique un Black Metal primitif extrêmement proche de celui de Blasphemy. Ceux d’entre vous étant familier avec la musique du groupe de Burnaby ne devraient donc pas être particulièrement dépaysés à l’écoute du redoutable Sacrament Of Blood. Vingt-huit minutes particulièrement intenses faites de riffs aliénants et bas du front, de cavalcades à base de blasts incessants, de breaks assez irrésistibles rappelant beaucoup ceux d’Archgoat ou Black Witchery et d’une voix démoniaque et cradingue (un growl tantôt profond, tantôt arraché) rendant ainsi l’atmosphère particulièrement sale, bestiale et chaotique. Antichrist n’est pas le groupe le plus malin que la Terre ait porté. Sa musique, simple et directe, se contente de bourrer dans le tas avec un esprit belliqueux et blasphématoire évident malgré des paroles plus gore que celles d’un Blasphemy... Mais malgré ce mimétisme déjà évoqué, Sacrament Of Blood possède sa propre identité. Peut-être parce que le chant de Goat Fucker est un poil plus compréhensible, peut-être aussi parce que la production se veut moins foutraque que sur Fallen Angel Of Doom... (merci les cymbales un peu plus en retrait) et plus puissante que sur Gods Of War (notamment concernant le son de guitare), peut-être enfin parce qu’Antichrist n’est pas particulièrement adepte de ces soli cacophoniques auquel nous a habitué Ryan Förster. Quelques différences qui placent ces deux groupes sur deux niveaux bien distincts.
Inutile d’en écrire davantage. De toute façon, si vous n’avez pas saisi de quoi je parle, « Sacrament Of Blood » n’est vraiment pas fait pour vous. Pour le reste, et même si on ne refera pas l’histoire, j’aurai quand même aimé pouvoir mesurer l’impact d’un tel album s’il avait pu être publié en temps et en heure. Nul doute qu’avec Sacrament Of Blood, Antichrist aurait été érigé lui-aussi au rang de groupe culte comme peut l’être aujourd’hui Blasphemy. Quoi qu’il en soit, même avec dix-sept ans de retard, cet unique album d’Antichrist demeure une véritable pépite de Black Metal primitif et bestial et une preuve supplémentaire que la scène de Ross Bay reste la meilleure dans le genre.
| AxGxB 4 Avril 2015 - 828 lectures |
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