On connaît bien sûr tous Rammstein, sa double-pédale en quadruple croches à 350 BPM, ses solis de guitares ultra-techniques, son riffing-lead en sweeping quasi-continu et son chanteur aux accents Heavy haut-perché qui en ferait pâlir King Diamond. On a rarement vu autant de subtilité, de finesse et de parties de guitares différentes en un seul morceau. Bon, techniquement, je n'aurais même pas besoin de préciser que j'ironise gentiment mais je vais le faire quand même puisque sur la chronique de Behemoth, alors que j'avais cité Black Sabbath ironiquement, on m'avait fait comprendre dans les commentaires que « ça n'avait rien à voir ». Donc évidemment, non – ou devrais-je plutôt dire « Nein ! », Rammstein n'est pas technique, n'est pas rapide, n'est pas subtil (encore que, ça dépend des albums et des moments mais nous en reparlerons) mais en même temps, on s'en fout complètement puisque que Rammstein, c'est du feu, de la composition musicale binaire et un jeu de scène qui joue clairement avec les gros stéréotypes à l'Allemande. Oui, je dis bien « stéréotypes » car si vous avez déjà mis les pieds dans une ville allemande vous avez du vous rendre compte qu'on y croise beaucoup plus de couples gays à vélo que de grands blonds musclés qui s'exhibent torse-nus.
On s'intéresse donc aujourd'hui à « Herzeleid », premier disque brut de pomme de nos chers ex-Allemands de l'Est qui n'est clairement pas celui à avoir le plus connu le succès à sa sortie (deux ans avant de décoller en terme de ventes quand même). Malgré tout, nombre de ses morceaux restent aujourd'hui des classiques du groupe (« Asche Zu Asche »,
« Rammstein », « Du Riechst So Gut » et j'en passe....). Ce qu'il faut bien se dire, c'est que Rammstein arrive dans un climat qui lui est plutôt favorable et qui explique sûrement en partie leur succès international qui arrivera plus tard. Une scène Metal Industrielle est en marche, avec en tête de proue le duo Manson / Reznor mais aussi des combos comme KMFDM ou Hanzel & Gretyl et un milieu un peu « branchouille » qui s'intéresse depuis peu à ce style musical en pleine expansion. Pour preuve, on citera David Lynch qui utilisera Rammstein dans la B.O de son « Lost Highway ». Et si Rammstein n'est pas le premier groupe allemand à s'orienter vers une musique Metal bien carré, bien nette et bien précise (allez donc jeter une oreille sur « Isolation » du groupe Die Krupps ou sur le premier album de Oomph !) qui sera bientôt définie en tant que Neue Deutsche Härte, on peut reconnaître que ce sont eux qui en sont les plus gros représentants.
C'est simple, quand on pense « Metal Indus », on pense très vite à Rammstein, probablement plus vite à eux qu'à Nine Inch Nails, Ministry ou Marilyn Manson... Alors avec le recul, on est en droit de se poser la question du « Pourquoi ? ». La réponse est finalement assez évidente, même si l'on exclus volontairement l'aspect scénique qui est une des caractéristiques les plus populaires de la formation mais qui n'a rien à voir dans une chronique de disque. Non, la première chose qui marque et qui a du marquer encore plus à l'époque de la sortie de ce « Herzeleid », c'est la production. On imagine à peine la pile de compresseurs qu'il a fallu empiler sur la baffle d'amplification pour avoir un tel rendu sonore. Dès « Wollt Ihr Das Bet In Flammen Sehen », on est marqués par la puissance de feu du combo, qui ne s'encombre pas de détails superflus et qui reste tout à fait nette aujourd'hui, soit vingt ans après la sortie du disque. Des parpaings bêtes et méchants répétés en boucle pendant cinq minutes mais qui ne sont pas lassants et qui misent uniquement sur la qualité de l'enregistrement et sur un agencement catchy pour construire leur efficacité.
Pour autant, les apports légèrement EDM des claviers de Christan « Flake » Lorenz s'appliquent à faire de ces compositions somme toutes sommaires autre chose qu'une bête collection de riffs Metallo-Martiaux. On détecte donc une ambiance dans « Herzeleid ». Et on peut dire qu'elle n'est pas vraiment à la fête, comme on peut s'en rendre compte sur un morceau comme « Das Alte Leid » qui nous inonde de samples mystico-ethniques et d'un bébé qui hurle à la mort sur le final. De même, on aurait pu nommer « Heirate Mich », elle aussi présente dans « Lost Highway », et son introduction des plus tordues. On sent dans ce style si spécial toute la rugosité et le côté grisâtre des complexes massifs et maussades d'habitation soviétique. Une dureté qui sera bien sûr confirmée par la voix de Till Lindemann qui n'a plus franchement besoin d'être décrite aujourd'hui, tant elle reste une référence connue de nous tous, amateurs de Metal chevronnés ou simple quidam passant par là et appréciant le groupe. Qualitativement, « Herzeleid » est en ce qui me concerne le meilleur disque de Rammstein, il a pour lui l'impression d'immédiateté absolue, l'efficacité et la sincérité d'un climat spécifique retranscrit comme une photographie d'époque. Seul « Reise, Reise » réussira à faire jeu égal avec l'intensité de ce premier disque mais dans un registre beaucoup plus travaillé, adouci et intimiste. En attendant, si j'enlève la moins efficace « Der Meister », il n'y a tout bonnement rien à jeter dans « Herzeleid » qui assoira le début d'une longue carrière avec brio.
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