Fvnerals - The Light
Chronique
Fvnerals The Light
La musique spectrale, je commence à connaître. Amber Asylum, Barren Harvest, Menace Ruine, Tenhi, les premiers The Wounded Kings, Sink à sa finlandaise manière... Malgré tout, je ne crois pas avoir entendu de créations aussi fantomatiques que celles de Fvnerals.
Pourtant, ce trio de Glasgow, contrairement à d'autres formations, ne se base sur aucun effet particulier, aucun « trucage », pour transmettre cette impression. Sa voix, sa guitare ainsi que sa batterie sont on ne peut plus lisibles, au point qu'elles donnent le sentiment de se trouver dans la même pièce que nous. Un son ample, soigné mais simple, permettant de rentrer aisément dans les trente-neuf minutes que dure The Light.
Alors pourquoi ce que contient ce premier longue-durée, aux contours si communs, m'échappe-t-il constamment ? Pourquoi paraît-il, malgré sa douceur constante où les amplificateurs portent bien mal leur nom, décharné au point de ne pas exister dans cette réalité ? Pourquoi ce qu'il peut donner à voir de Lynchéen (vous vous souvenez des scènes de cabaret de Eraserhead ? Voilà.) s'étiole même, pour devenir encore plus irréel, encore plus transparent ? On l'aura compris, The Light joue de nous, bouleverse et étonne derrière ses éléments d'allure ordinaire. L'exemple parfait se trouve dans la prestation de Tiffany Ström : dans un premier temps négligemment présentable en « femme fatale », sa voix boudeuse, rectiligne, à la fois murmure, chant et râle, devient... autre chose, de surnaturel, triste et réconfortant dans le même temps, où l'on devient prisonnier.
Ce travail de sape, Fvnerals le développe avec méticulosité. Les notes s'égrènent avec finesse, avec un tel retrait qu'elles demandent à se concentrer pour les discerner (ce batteur qui fait un effort incroyable pour se mêler au décor). Il y a pourtant des coups d'éclat sur cet album (« Closer » par exemple). Seulement, chaque morceau, plus voluptueux que le précédent, fond et se confond avec l'espace. The Light est parfois si diaphane qu'il passe sans qu'on s'en aperçoit, mais aussi en nous retournant sans que l'on comprenne pourquoi. Le diable et les détails : voilà le terrain de prédilection de Fvnerals et ses peines susurrées, sa détresse enchantée, qui font de ses tourments des arabesques où se perdre.
Et ce sera tout pour cette fois. Œuvre si hantée, conservant un mystère entier même après de nombreuses écoutes, ne demande pas à être explicitée – cette blague ! – outre-mesure. Cependant, de sa façon étrange, impalpable, The Light est clair sur ses intentions dès son nom et sa pochette. Simplement, imaginez être dans une pièce sombre où un halo transparaît. Dans ce rayon où la poussière virevolte, en suspension, une silhouette se dessine. Seul, pris dans des pensées nocturnes, il vous est donné à croire qu'une rencontre vous est proposée. Seul, vous ne l'êtes plus.
| lkea 21 Octobre 2016 - 784 lectures |
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