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Baise ma Hache - F.E.R.T

Chronique

Baise ma Hache F.E.R.T
[ A propos de cette chronique ]

Baise ma Hache et votre serviteur, c’est une histoire bien particulière. Le groupe savoyard fait parler de lui autant que son compatriote ranci Peste Noire depuis plusieurs années déjà, s’inscrivant dans cette dynastie de groupes politisés jusqu’à l’os, revendiquant le nationalisme et la souveraineté patriotique à tue-tête avec un certain succès. Un bon gros succès bien établi même, à en voir l’émulation autours des artefacts dédiés. Tout le monde connaît les sommes astronomiques auxquelles s’échangent les albums de Peste Noire, et il n’aura pas fallu plus de dix minutes pour que plusieurs des articles mis en vente chez Hammerbolt ou sur la boutique en ligne de B.M.H ne soient sold-out le jour de la sortie de F.E.R.T.

Depuis sa création et jusqu’à la sortie de son second album, le groupe était essentiellement connu pour ses photos promotionnelles patriotico-libidineuses et la fameuse rengaine « B.M.H copie K.P.N ». Même après plusieurs écoutes, Ab Origine Fidelis et Le Grand Suicide n’ont jamais réussis à représenter autre choses pour votre serviteur que deux albums de black très classique, effectivement bien influencés par Famine, pour une grande disette générale d’intérêt au bout du compte. A l’époque de sa sortie, je n’avais même pas offert une écoute au Bréviaire du Chaos. Dans mon petit esprit bien étriqué, B.M.H était le groupe seconde zone dont il était bon ton de se gausser, bien aidé encore une fois par les photos promotionnelles du groupe qui tapaient volontiers dans le beauf en mêlant subtilement aryanisme et courbes féminines affolantes mises en valeur. Il aura fallu qu’un ami me tanne pendant de longs mois avec ce dernier album pour que je me décide à lui laisser une chance, presque deux ans après (JM, si tu passes par là …). Et là, grande et magistrale dérouillée pour ma gueule. Le Bréviaire du Chaos est un album d’une puissance et d’une charge émotionnelle terrifiante, traversés par des morceaux monstrueux comme « Le Temps des Barbares » ou le fameux « Une Lame pour les Infâmes ». Production, chant, composition, ambiance … Une mandale dans la tête envoyée sans bouger le bassin. Avec cependant un gros point noir, à savoir la bonne copie bien audible de riffs des polonais de Mgla, et ce à plusieurs reprises. Ecoutez « Le Forge-Mort » ou « L’Armée Furieuse » pour bien prendre connaissance de l’ampleur de la chose …

Oui, on va parler du dernier album, ça vient. F.E.R.T était prévu pour l’été dernier, mais sort finalement le 4 Octobre. Grosse ruée générale, album commandé dans les temps, écoutes répétées sur trois semaines. On va expier dès le début un gros morceau, à savoir la pochette peinte par le célèbre Paolo Girardi, le metal warrior le plus viril à l'Est du Rhône. Superbe, au premier abord, avec une référence assez évidente au Blood Fire Death de Bathory. Mais en s’y penchant un peu plus, on remarque que la kalachnikov de la fougueuse walkyrie au premier plan et celle de son compagnon motard ont visiblement été achetées chez Joué Club, que certains détails sont plus grossiers que ce à quoi Girardi nous a habitué, et qu’une sérieuse épidémie de strabisme a frappé cette ardente compagnie. L’ensemble reste très appréciable vu de haut, mais la finesse fait étrangement un peu défaut une fois les yeux plus près.

Considérations cosmétiques terminées, on passe à la musique. Le premier long morceau, « Le Crépuscule des Gueux », souffre un peu de sa durée abusive. Bons riffs d’introduction avec cette ambiance délétère caractéristique, hurlements de Thorwald et du nouveau venu Hreidmarr (que je ne présente pas, même si Anorexia et moi, c’est un joli conte de non-intérêt mutuel). Et puis … On ne sait pas trop. La piste est assez décousue, avec des plages remplies de pas grand-chose si ce n’est des trémolos et des mélodies bancales paumés au milieu de rien du tout, repris derrières par de nouveaux passages mélodiques plus efficaces. Alors oui, les riffs ne sont pas mauvais en soi, même s’ils ne risquent pas de vous faire tomber par terre, mais ils ne suffisent clairement pas à rendre intégralement intéressantes douze minutes ininterrompues. Surtout après une fin aussi ennuyeuse étalée sur plus de deux minutes. Globalement, cette piste est sans doute la moins bonne de l’album. Elle est suivie par l’éponyme, dévoilée à l’avance, qui pour le coup se révèle être le sommet de l’opus. « F.E.R.T » est une longue chevauchée violente, épique et haineuse, portée par des riffs somptueux et des parties de chant glorieuses au possible. Il aura fallu un moment pour qu’elle se dévoile en entier aux oreilles de votre serviteur, mais il est indéniable qu’il s’agit là d’une vraie grosse tuerie, qui devrait faire dresser les poils de plus d’un d’entre vous.

Premier intermède, mélancolique et nostalgique, assez réussi, avec une atmosphère de regret et de peine bien palpable, puis retour aux riffs avec « Insociabile Regnum ». Et cette piste est sans doute le meilleure résumé possible de l’entièreté de l’album. Ouverture lente et cérémonieuse sur un arpège galvanisant, montée en puissance, puis gros passage dissonant et sans réel intérêt, avant de repartir sur le même arpège surplombé par des paroles bien tendancieuses (Les « rats saigneurs », n’est-ce pas ?) qui débouche enfin sur des riffs poignants et une fin douce-amère très réussie. B.M.H est inconstant, capable de sortir des riffs d’exception et de devenir très chiant et générique juste derrière.

« Furia Francese » fera plaisir à beaucoup, avec son refrain guerrier plaisant et ses riffs cinglants. « Baise leur Monde Immonde » s’ouvre sur un riff sautillant que je suis persuadé d’avoir déjà entendu quelque part, avant de se perdre un peu en route. Enfin, après un dernier intermède assez dramatique et militaire, « Délivrance » essaye de se constituer en une apothéose finale sans vraiment y parvenir, trop dilué et trop dispersé pour vraiment marquer. Les cinquante minutes de l’album passent relativement vite, mine de rien. Et finalement, on est frustré à la fin. C’est le ressenti de votre serviteur, qui ressort de chaque écoute avec l’impression d ‘avoir été mis à feu doux pendant une heure sans se manger dans la tronche les explosions annoncées. Les morceaux semblent avoir été construits sur un modèle de montées en puissance sans fin, mais qui n’arrivent jamais à éclater pour de bon. On attend à chaque tournant de riff une décharge de mélodie dévastatrice qui ne vient pas, contrairement à l’album précédent. F.E.R.T est moins intense que son prédécesseur, moins marquant. Il possède quelques excellents passages et de bonnes pistes, mais veut en faire trop. L’efficacité se perd en chemin, et le groupe tente sans doute trop de créer des atmosphères qui finissent par devenir répétitives, génériques et finalement lassantes.

F.E.R.T n’est pas mauvais, il est correct, avec des moments éclatants côtoyant d’intenses instants d’ennui. J’ai souvent eu l’impression d’entendre des progressions d’accords n’allant nulle part, ne servant que de support aux deux chanteurs. A ce propos, on notera d’ailleurs des paroles assez bien écrites, toujours aussi portées sur les thématiques racialo-politico-nationalo-européennes qui risquent de déplaire à beaucoup. Assez bien fichues en tout cas pour ne pas classer les textes du groupe sur la même étagère que celles des nazillons NSMB bas de gamme (Oui M8l8th c’est de toi que je parle, n’hésite pas à t’assoir, prend un siège et ferme-la). On échappe tout de même pas à quelques saillies trop badass un peu ridicules, mais enfin ... La qualité musicale fera de toutes façons toujours mieux passer des textes aux sujets bien polémiques, aussi violents soient-ils. Si Seigneur Voland a d’ailleurs réussi à se placer il y a presque vingt ans comme une référence du black metal et impose toujours aujourd’hui le respect en envoyant des textes autrement plus extrêmes, c’est bien parce que Xaphan et L.F composaient une musique difficilement critiquable.

Là où le Bréviaire du Chaos avait fait fermer leurs gueules à beaucoup de détracteurs du groupe qui taxaient celui-ci de formation n’ayant à offrir qu’une musique médiocre uniquement centrée sur des textes politiquement engagés, F.E.R.T remet ici un peu le couvert à la table de l’ennui. On ressort de l’album avec une moue aux lèvres, pas dégoûté mais pas satisfait non plus. Les mauvaises langues diront sûrement que sans les riffs importés de Cracovie pour nourrir les compositions, B.M.H a finalement du mal à sortir un album de bonne facture. Et c’est dommage, parce que Jon a clairement étoffé son jeu de batterie (programmée), que le duo de chanteurs fonctionne bien, et que la production est assez irréprochable.

Fin des pourparlers. B.M.H n’a pas su réitérer son coup d’éclat de 2016, mais n’est pas à conspuer pour autant. L’album plaira très certainement à beaucoup, m’est avis que l’adoration dont profite le groupe depuis quelques années par une frange d’auditeurs n’aura pas de mal à lui conférer des qualités que je n’ai pas su lui trouver. J’attends donc le prochain acte, en espérant le retour à une musique plus directe et percutante, avec des mélodies plus accomplies. Cette année, on finit l’assiette sans se resservir.

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Baise ma Hache
notes
Chroniqueur : 6/10
Lecteurs : (2)  7.5/10
Webzines :   -

plus d'infos sur
Baise ma Hache
Baise ma Hache
Black Metal - 2013 - France
  

tracklist
01.   Le crépuscule des gueux  (12:21)
02.   F​.​E​.​R​.​T  (07:31)
03.   Traité du rebelle  (02:16)
04.   Insociabile Regnum  (06:17)
05.   Furia francese  (05:02)
06.   Baise leur Monde Immonde  (06:03)
07.   Aux modernes  (03:59)
08.   Délivrance  (07:39)

Durée : 51:08

line up
parution
4 Octobre 2018

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