Harm's Way - Posthuman
Chronique
Harm's Way Posthuman
Harm’s Way a perdu toute humanité. Ca y est, la mue est opérée et la machine est lancée. Au sein de cette matrice, c’est à se demander si vous êtes face à un Neo déshumanisé ou à un Agent Smith en rédemption. Sûrement à mi-chemin entre ces deux-là. En tout cas, le postulat est clair, notre race est perdue, pas tout à fait morte mais bientôt enterrée et il faut passer à autre chose. Ce processus se devait d’être accompagné d’une playlist de choix, et le quintet, du haut de son Chicago natal, s’est porté volontaire avec tout le zèle qu’on lui connaît.
A la vue de la pochette, on sent bien qu’on n’est pas partis sur une « happy end ». Tête charcutée, trou dans la gorge, cheveux ébouriffés et restes de chair pourrissante. Aucune beauté ne se trouve de ce côté-là, notre attention est a contrario attirée vers les cristaux, scintillants et sublimes. La froideur, donc. Dès les premières notes de « Human Carrying Capacity », le lien s’installe. Le riff, semblable à une alarme, annonce la fin de notre ère et très rapidement, le reste déroule. Batterie martiale, refrain pachydermique, voix monocorde et rageuse, aucune chaleur ne se dégage, jusqu’au break carrément indus (idée que l’on retrouvera sur « The Gift », « Tempation »…) Le pont a des allures de Terminator et le morceau se termine au beau milieu d’un refrain comme si, de toute façon, vous n’alliez pas survivre jusqu’à la fin du film. Vous n’êtes qu’un figurant, bon à prendre les coups précis, méthodiques et lourds d’un robot dont l’IA a bien compris que l’espèce humaine n’était pas un mammifère mais un virus. Un virus dont il faut se débarrasser, jusque dans ses propres limbes (« Become a Machine », « Dissect Me »). Pour ce faire, le seul élément encore fait de chair, d’os et de sentiments est le chant. Le génie d’Harms Way, ça n’est pas seulement d’avoir apporté un thème et d’avoir su mixer ses instruments. C’est aussi d’être allé jusque dans la métrique la plus décharnée, travaillée au poil. Pas un vers ne dépasse les dix syllabes (la moyenne étant plutôt 6 ou 8), quasi tous sont coupés au milieu et les rimes sont systématiquement croisées. Chirurgical, lancinant, binaire.
Au-delà de ce jusqu’au-boutisme dans la démarche, Harm’s Way est capable d’alterner entre l’éradication de masse à l’aide d’obus (« Dead Space », « Call My Name »), les battues à l’arme de guerre semi-automatique (« Become a Machine », « Unreality ») et les accalmies, le temps de recharger ou de débusquer le dernier rejeton (« Temptation », début de « The Gift »). Ce génocide dont vous êtes le héros n’en est que plus digeste, aéré et agréable à l’écoute. Il peut même s’envisager plusieurs fois dans la même journée, lors d’une séance de sport où vous avez prévu de déchirer pas mal de fibre musculaire ou entre amis, en fond (il vous reste à bien choisir vos amis par contre).
Deux ans après cet opus, je dois reconnaître que je commence à avoir faim. Faim de désolation et de post-apocalypse musical. J’ai eu un en-cas sur scène cet été, mais ça ne suffit pas à rassasier mon appétit. Il incombe à « Harm’s Whey » la lourde tâche de ne pas filer la métaphore de Matrix jusqu’à « Reloaded » et encore moins « Revolutions » pour ne pas passer du gros plat de résistance bien lourdingue qu’est Posthuman à une petite salade de fast-food dégueulasse.
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