Mythic - Anthology
Chronique
Mythic Anthology (Compil.)
Bon, hey, ça va, calmez-vous un peu les gars en chien du Metal. Ce n'est pas parce que vous apercevez trois meufs en photos posant à l'aube de leur vingtaine en dessous d'un logo où il est écrit, pour tous ceux qui feraient preuve d’une dyslexie subite, Mythic et non Meetic qu'il faut commencer à transpirer et à bégayer comme ça. Déjà parce que ces trois meufs ont aujourd'hui, enfin surtout pour les plus jeunes d’entre vous, l'âge de vos daronnes et ensuite parce qu'un peu de tenu et de respect pour la gente féminine n’ont jamais fait de mal à personne...
Si en 1991 les groupes de Death Metal 100% féminins ne courent pas les rues, Mythic n’est pourtant pas le premier à voir le jour puisqu'à ma connaissance ce statut revient aux pionnières de Derkéta dont j’ai déjà dit grand bien en ces pages. D'ailleurs l’histoire de Mythic est intimement liée à celle de Derkéta puisqu'à la base Dana Duffey avait pour ambition de les rejoindre avant d’apprendre par retour de courrier que le groupe venait tout juste de se séparer. Bien décidée à ne pas en rester là, Dana quittera sa ville natale pour aller s’installer à Pittsburgh et ainsi se rapprocher de Mary Bielich (basse) et Terri Heggen (batterie), deux ex-Derkéta vraisemblablement emballées à l’idée de jouer ensemble dans un nouveau groupe. Malheureusement, l’aventure sera de courte durée puisqu'en juin 1992, Mythic mettait un point final à une carrière débutée seulement un an auparavant. Entre temps, le trio n’aura pas spécialement chômé puisqu’il aura tout de même sorti deux démos et un EP ici réunis sous la forme d’une compilation intitulée Anthology. Une compilation qui d’ailleurs a bien failli ne jamais voir le jour…
Effectivement, alors que le groupe bouffait les pissenlits par la racine depuis déjà plusieurs années, Dana Duffey a naturellement souhaité pouvoir réunir l’ensemble de ces enregistrements sous un seul et même format. Pour cela, elle s’est associée au label Steel Cage Records pour la sortie d’une version CD en bonne et due forme. Cependant, Mary Bielich et Terri Heggen, loin de partager l’enthousiasme de leur ex-copine, ont alors menacé le label d’une action en justice. Loin de se dégonfler, Dana Duffey a alors récupéré tous les livrets qui avaient déjà été imprimés par le label et fait chauffer son graveur de CD afin de distribuer gratuitement (si ce n’est contre quelques euros pour les frais de port) cette compilation auprès de tous les intéressés. Sortie en 1998, celle-ci sera ainsi distribuée par Dana jusqu’en 2015... Un an plus tard, le label mexicain Dark Recollections Records (Soulrot, Phlebotomized, Shub Niggurath...) sortait une version officielle reprenant peu ou prou ce qui avait été fait par Steel Cage Records. Plus récemment, c’est Floga Records qui s’y est collé pour une version LP qui ne devrait pas manquer de trouver acheteurs.
Proposée de manière antéchronologique pour des raisons évidentes de qualité, cette compilation débute par les trois titres du EP Mourning In The Winter Solstice. Enregistré en mars 1992 celui-ci ne verra pourtant le jour qu’en 1993 grâce à Relapse Records et sa fameuse "Underground Series". Un EP reprenant à l’époque la fameuse peinture de Caspar David Friedrich intitulée "Klosterfriedhof im Schnee" et déjà à l’époque maintes fois réutilisées. Aussi, ce EP posthume est sûrement ce que Mythic a sorti de mieux, que ce soit en terme de réalisation ou d’écriture. Trois titres d’un Death Metal mid tempo aux sonorités Doom évidentes et sublimé par une production de son époque qui n’a cependant pas à rougir de quoi que ce soit. Au contraire, cette production particulièrement pesante avec notamment cette guitare accordée six pieds sous terre, cette basse saturée au son particulièrement métallique et ce growl féminin d’une profondeur abyssale confère à l’ensemble à la musique du trio une certaine aura (flagrant dès les premières mesures extrêmement menaçantes de l’excellent "Winter Solstice"). Pour le reste, si les filles ne font pas preuve d’une grande originalité, on ne peut nier le caractère efficace de leurs trois compositions. Car si les riffs se montrent relativement simples et primitifs, ils possèdent cependant un certain groove qui ne devrait pas manquer de séduire tous les amateurs de Death Metal putride et dégoulinant à la Undergang et compagnie. De la même manière, si Mythic joue le plus souvent la carte du mid-tempo, les changements de rythmes et autres accélérations délicieusement pataudes restent nombreux. Une variété et un sens du rythme qui rend l’écoute particulièrement agréable encore aujourd'hui. A noter que Tom Frost de Baphomet/Banished (dont on sent d’ailleurs l’influence sur la musique de Mythic tout au long de sa carrière) accompagne Dana le temps de quelques growls bien sentis sur "Winter Solstice" et "Intro / Spawn Of Absu".
Après ces trois titres fort sympathiques viennent ceux de la première véritable démo de Mythic (Rehearsal Tape 1991 étant comme son nom l’indique un enregistrement en répétition) sortie en octobre 1991 et intitulée The Immortal Realm. La production y est évidemment moins bonne, donnant d’emblée un côté plus amateur à la chose (notamment ce son de batterie lointain et flottant) sans que cela soit pour autant un handicap. On y entend néanmoins un groupe déjà bien en place distillant une recette en tout point identique à celle de Mourning In The Winter Solstice. Toutefois, au-delà de cette production plus bancale, on constate rapidement que les morceaux ne sont pas tout à fait du même calibre qualitativement parlant. S’ils conservent une certaine efficacité (accélérations entraînantes, riffs gras à trois notes pas désagréables, ralentissements bien sentis, groove pataud...), il s’en dégage pourtant quelque chose de plus approximatif et sommaire (notamment certains riffs qui paraissent forcés ou encore ces quelques solos qui peinent vraiment à convaincre). Bien entendu, replacé dans le contexte de l’époque, on comprend aisément comment un groupe de trois nanas s’adonnant à la pratique d’un Death Metal sombre et plombé a réussi à convaincre mais il faut bien avouer qu'aujourd’hui certains de ces morceaux (notamment "The Oracle" ou "Lamen Configuration" dans une version moins aboutie) peuvent paraître un brin faiblards. En attendant, cela n’enlève rien au charme de ces compositions dont se dégage quelque chose d’affreusement sale, poisseux et primitif.
Pour clôturer cette compilation, on trouve les trois titres de la toute première démo de Mythic intitulée Rehearsal Tape 1991. Le son y est évidemment dégueulasse sans pour autant inviter l’auditeur à appuyer sur « stop ». Notamment cette stéréo complètement baisée avec tous les instruments à gauche et presque rien à droite. Malgré tout, cela permet d’avoir une assez bonne vue de ce qu’était Mythic lors de ses premiers balbutiements. Là encore l’essentiel de ce qui caractérise le Death Metal des trois américaines est présent sur cette première démo même si l’ensemble manque encore un peu de travail, de personnalité et de technique. On retrouve néanmoins ce riffing sombre et plombé, ces mid-tempo baveux et dansant, cette pointe de groove assez irrésistible, une certaine attitude ainsi qu’une atmosphère particulière typique de ces villes ouvrières en perte de vitesse (Pittsburgh, Detroit, Cleveland, Chicago...). Evidemment, en comparaison des morceaux présents sur Mourning In The Winter Solstice, c’est encore une fois l’aspect sommaire qui prévaut une fois encore. Cependant, il faudrait vraiment être sourd pour ne pas entendre le potentiel derrière cette toute première démo et l’influence qu’a pu avoir le groupe sur des formations plus récentes telles qu'Undergang, Krypts, Fetid, Cerebral Rot et compagnie.
Si cette Anthology vaut essentiellement pour les quelques titres du EP Mourning In The Winter Solstice, il n’en reste pas moins que Mythic a su faire un passage remarqué dans la scène Death Metal. Bien sûr, le fait qu’il s’agisse de trois jeunes nanas n’y est probablement pas étranger mais au final, à l’écoute de tous ces morceaux, il me semble évident que ce n’est pas ce qui définit uniquement le groupe de Pittsburgh mais plutôt sa formule alliant Death Metal sombre et abrasif et Doom poisseux et groovy. Cette compilation n’est donc probablement pas la plus indispensable qui existe mais elle saura ravir les amateurs du genre et autres limiers de l’underground plus ou moins oublié.
| AxGxB 2 Mars 2020 - 820 lectures |
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