Atlantean Kodex - The Pnakotic Demos
Chronique
Atlantean Kodex The Pnakotic Demos (Démo)
La popularité croissante au sein du microcosme de l’epic metal, et même au-delà, d’Atlantean Kodex n’aura aucunement échappé à personne, notamment depuis la sortie de leur deuxième album, The White Goddess en deux mille treize, confirmé par The Course of Empire six années plus tard. Le groupe a ainsi reçu pas mal de bons suffrages, mérités qui plus est. Mais il faut surtout reconnaître que son excellente réputation ne provient aucunement du néant et encore moins d’un buzz ou d’une hype sans lendemain, et le nom commençait déjà à circuler au sein de l’underground dès la seconde moitié des années deux mille. Formé en deux mille cinq autours du guitariste Manuel Trummer, - qui est enseignant à l’université et spécialisé en étude comparative des cultures et en Histoire de l’Art, cela a son importance -, et du bassiste Florian Kreuzer, Atlantean Kodex a tout de même mis deux ans avant de stabiliser son line-up avec l’arrivée du chanteur Markus Becker et du batteur Mario Weiss. Le groupe avait dans cet intervalle fait appel à des batteurs de sessions et comprenait Phil Swanson au chant - Briton Rites, Seamount, Vestal Claret - et avec lequel ils avaient enregistré une première version de The Hidden Folk en deux mille six, une première carte de visite qui allait marquer plus d’un esprit. Le quatuor s’est ainsi enfermé dans les studios Boar Cult en avril deux mille sept pour donner naissance à cette première démo, The Pnakotic Demos, qui allait clairement marquer les esprits.
En effet, dès sa parution Atlantean Kodex avait frappé un grand coup et surprit surtout par la qualité de sa musique. L’on ne s’attardera guère longtemps sur la qualité sonore de cet enregistrement, qui est une démo dois-je le rappeler, mais dont le son est très bon, même si aucunement poli par des effets de studio. Dans tous les cas tout y est parfaitement audible et ne souffre aucunement d’un manque de puissance. Il n’y a donc aucun obstacle pour apprécier cette réalisation dont la durée excède la demie heure, pour quatre titres. L’on a déjà un peu l’idée de ce à quoi nous allons avoir à faire, avec des compositions assez longues, dont deux, From Shores Forsaken et The Hidden Folk, excèdent les dix minutes. Atlantean Kodex développe ici un Epic Metal assez singulier qui fait tout autant la part à un héritage provenant des années quatre vingt, et l’on aura en tête des groupes tels que Omen, Manowar, Manilla Road ou bien encore Brocas Helm, à des influences venant de l’epic doom metal, mais également de la période viking de Bathory. L’on pourra dire que les influences sont éculées pour ce registre musical, mais elles sont très bien assimilées. À titre de comparaison et histoire de bien situer la formation allemande, je citerai les Italiens de DoomSword et les Anglais de Solstice, sans nul doute la formation qui se rapprocherait le plus de ce que proposaient ici les Allemands. L’on retrouve cette même trame héroïque et nostalgique, volontairement tournée vers le passé. Et comment ne pas voir dans The White Ship, où l’on a juste des lignes de chant sur fond de vent qui souffle au loin, un hommage au titre The Keep présent sur New Dark Age.
Vous pourrez me rétorquer qu’il n’y a rien d’ici de très novateur dans la musique proposée par Atlantean Kodex, et je ne pourrais aucunement dire le contraire. Et pourtant, cet enregistrement reste marquant, car il y a plusieurs éléments inhérents à la personnalité d’Atlantean Kodex présents dès cette démo. Il y a déjà cette excellente inspiration qui éclate sur les trois compositions conventionnelles présentées ici. Le metal épique d’Atlantean Kodex ne donne jamais dans le virevoltant et le tape à l’oeil, il prend le temps de se développer et de marquer les esprits avec des éléments simples mais réellement inspirés. Cela passe aussi bien par des riffs colossaux, aussi bien lorsqu’ils sont lents que lorsque le groupe accélère, des mélodies mémorables qui ne sont pas qu’épiques, mais qui ont une noblesse comme si elles provenaient des Anciens Temps. Les acoustiques ont déjà leur importance, à l’instar du break sur The Hidden Folk. Et si le chant est une composante importante du groupe, avec la présence de temps à autres de chœurs, il y aussi des passages où les guitares prennent les devants au grès de leads ou de soli mélodiques, même s’il faudra attendre l’arrivée de Michael Koch pour que cela soit plus étoffé dans ce registre. Encore que Manuel Trummer ne démérite pas, comme c’est notamment le cas sur The Hidden Folk.
Si le quartet fait preuve d’un belle inspiration, il dégage aussi une profondeur que beaucoup d’autres formations n’ont point. Bien évidemment, il se réclame d’auteurs tels que Lovecraft, ne serait-ce que pour le titre de la réalisation et la référence sur The White Ship, mais également d’Howard et de Tolkien. Mais l’on retrouve aussi pas mal de références à la Préhistoire et ce n’est pas anodin si le disque céleste de Nebra, provenant de l'Âge de Bronze est utilisé comme pochette. Cela donne des paroles assez nostalgiques et surtout très métaphoriques, que l’on a plus tendance à retrouver chez certains artistes de la scène néo folk, que dans ce type de metal. L’on est assez loin des paroles assez clichés rencontrées chez tant d’autres formations, et c’est aussi cela qui fera la personnalité du groupe. Cette personnalité, elle la doit aussi à son chanteur Markus Becker, qui, s’il n’est pas le meilleur technicien du monde, possède un timbre de voix parfaitement approprié à la musique du groupe. Il sait à la fois être puissant et poignant, avec une espèce de voile triste qu’il a de temps à autres, et qui sied bien à l’aspect passéiste déployé ici.
Si les titres présents ici ont la faveur des fans du groupe et ont même un peu soufflé leur monde à la sortie de cette démo, c’est parce qu’ils sont tout bonnement excellents et avec déjà une personnalité forte. Cela commence assez calmement avec cette douce introduction sur From Shores Forsaken avant que groupe ne prenne une rythmique assez plombée et entraînante qui ne sera pas sans rappeler un classique du genre, le fameux Gates of Vallhala. Et quoi de mieux que d’être adoubé par Ross the Boss lui-même - si tu ne sais pas de qui il s’agit, tu n’aimes pas le metal - qui est venu posé ses excellents soli sur ce titre et vient également nous rappeler qu’il reste l’un des meilleurs guitaristes en ce monde. Cela dit, les deux autres titres ne déméritent pas, le groupe variant les plaisirs avec le véloce Marching Homeward et son refrain entêtant, et, évidemment, un The Hidden Folk vraiment époustouflant, où Phil Swanson y assure les chœurs, et qui est parfaitement lancé par l’interlude The White Ship, là aussi une autre constante chez les Allemands. Ce titre est une réelle pépite avec une très belle construction et quelques références à la trilogie Lord of the Rings, dont ce sample de Theoden, et cette mélodie empruntée à la bande son mais qui ne fait aucunement tâche avec l’ensemble. Ce ne sont peut-être que des petits accessoires pour beaucoup, mais ils sont insérés avec une certaine classe. La version originelle du titre est d’ailleurs présente sur la réédition de Cruz Del Sur de cette démo et outre la très belle prestation au chant de Phil Swanson, l’on comprend vraiment à son écoute ce qui a attiré pas mal de personnes.
Si l’on peut souvent regarder les démos comme des passages obligés pour la majorité des groupes pour s’aguerrir, mais avec souvent le revers de la médaille qui est d’y voir des formations encore vertes, The Pnakotic Demos se démarque clairement de l’ensemble par sa qualité. Sur cet enregistrement, Atlantean Kodex y dévoile non seulement des compositions au-dessus de la moyenne, mais surtout une personnalité assez hors du commun et qui ne cessera de se développer au fil des années. L’on a vraiment ici à faire avec un très bel enregistrement d’epic metal à la croisée des chemins entre le heavy et l’epic doom metal, qui, s’il possède des influences indéniables, n’en est pas moins pétri de qualités et d’une certaine originalité. Il y a ici une ferveur et un souci du détail qui ne sont pas anodins et qui sonnent surtout avec une réelle authenticité. C’est en cela qu’Atlantean Kodex se démarque clairement de la mêlée, par une profondeur de son propos et une volonté de s’extirper d’une certaine médiocrité ambiante. Forcément, cela demande sans doute plus d’attention et d’efforts de la part de l’auditeur pour tout assimiler, mais cela ne fait qu’agrandir la durée de vie et la pertinence de la musique d’Atlantean Kodex. Et il y a déjà tous ces éléments sur The Pnakotic Demos, avec cette magie et cette fougue originelle qui sont le plus souvent l’apanage des œuvres de jeunesse, et qui mérite amplement tous les louanges qui lui sont accordées depuis une quinzaine d’années.
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