Necrony - Pathological Performances
Chronique
Necrony Pathological Performances
Longtemps resté l’un de ces albums sur lesquels mettre la main était devenu chose particulièrement compliquée (à moins bien entendu de pouvoir se délester sans sourciller de quelques euros durement gagnés), Pathological Performances s’est enfin vu réédité après des années à avoir susciter espoir et frustration chez bien des amateurs de Death Metal. C’est le label américain Gurgling Gore (Degraved, Perilaxe Occlusion, Pharmacist, Seep, Writhing Shadows...) qui en a eu la primeur avec une première réédition cassette proposée dès juillet 2021. Les amateurs de CD auront néanmoins dû patienter quelques mois supplémentaires pour voir apparaître le Saint Graal grâce, cette fois-ci, au concours des labels Grindestroy, Disembodied Records, Selfmadegod Records et Bitter Loss Records.
A l’occasion de cette première réédition officielle, groupe et labels ont souhaité y apporter quelques modifications d’ordres visuelles. Rien de dramatique puisque l’illustration originale signée Ola Larsson (Death Fortress, Disma, Sulphur Aeon, Traumatic, Undergang...) demeure en lieu et place. Ce qui va néanmoins changer c’est cette mise en page revue et corrigée, cette illustration présentée au milieu du livret dans son entièreté et enfin ce boitier cartonné (slipcase) qui habille et protège cette version CD. Bref, rien qui ne puisse affoler les collectionneurs les plus revêches qui à défaut de pouvoir alléger régulièrement leurs bourses de manière significative préfèreront naturellement miser sur ces rééditions les plus fidèles possibles.
Formé à Örebro, Suède, Necrony voit le jour en 1990 sous l’impulsion d’Anders Jakobson, Rickard Alriksson et Dan Wall. Des noms qui ne vous sont peut-être pas étranger puisque les deux premiers irons fonder Nasum deux ans plus tard en compagnie du regretté Mieszko Talarczyk. Après une première démo intitulée Severe Malignant Pustule rééditée depuis 2021 à trois reprises (CD, vinyle, cassette), le groupe réussi à attirer l’attention du jeune label allemand Poserslaughter Records (Dead, Gorement, Nasum, Regurgitate...) chez qui sortira en juin 1991 un EP deux titres intitulé Mucu-Purulent Miscarriage. Une collaboration reconduite deux ans plus tard avec la sortie en 1993 de Pathological Performances, premier album passé quelque peu inaperçu à l’époque (et cela pour tout un tas de raisons évidentes) mais qui pourtant ne manquera pas de marquer l’underground.
Enregistré et mixé par Dan Swanö avec le soutient de Kaj Avila (Dawn, Fulmination, Unicorn...), ce premier album n’a pas particulièrement vieillit. Certes, on sent bien que celui-ci n’est plus vraiment de toute première fraicheur mais les affres du temps n’ont malgré tout eu qu’assez peu d’emprises sur ce dernier. Pour preuve, cette réédition n’a même pas "subit" de remasterisation. Un signe qui en règle générale ne trompe pas.
Quoi qu’il en soit et comme le suggère l’illustration de Pathological Performances ainsi que ce champs lexical emprunté à l’univers de la médecine que l’on va retrouver sur chacune des sorties de Necrony, le groupe suédois (qui opère d’ailleurs ici sous la forme d’un duo) verse dans la pratique d’un Death Metal à tendance (Gore) Grind avec en ligne de mire des groupes tels que Carcass, General Surgery, Xysma (celui des débuts), Impetigo, Carbonized ou bien encore Regurgitate. Une formule qui déjà en 1993 avait faite ses preuves depuis belle lurette mais qui n’empêchera pas la formation de convaincre ni de séduire son auditoire. Il faut dire que le groupe sait y faire avec notamment un riffing gras typiquement scandinave (un ADN suédois évident agrémenté tout de même ici et là par quelques touches typiquement finlandaises) qui n’a rien à envier à qui que ce soit et une dynamique relativement variée qui va notamment permettre à Necrony de tirer un petit peu en longueurs sans pour autant donner l’impression de tourner en rond ou bien de perdre en efficacité. En effet, à l’exception d’un "Rigor Mortis Sets In" et d’un "Funeral Ferocity" qui servent ici d’introduction et de conclusion à ce premier album, la durée moyenne de chaque titre oscille aux alentours des cinq minutes. Si globalement le tempo n’est donc pas forcément très élevé (beaucoup de séquences mid-tempo), on va tout de même trouver quelques fulgurances typiquement Grindcore ("Dexterous Embryectomy" à 0:39, 1:06; 2:01 et 3:16, "Submassive Necrosis Disgorgement" à 1:02 et 2:56, "Gynopathological Excav-Eater" et son entame en fanfare, "Pro-Rectal Carnage" à 0:47 et 3:21, "Excavated, Eviscerated And Emaciated" à 0:51 et 2:42, "Effervescing Discharge Of Putrescent Corpulence" à 1:11, etc) ainsi que tout un tas d’autres accélérations moins soutenues héritées essentiellement de la scène Thrash mais qui n’en contribuent pas moins à insuffler du rythme et de la cadence à un ensemble finalement plutôt bien équilibré. Alors bien entendu, il n’y a pas forcément de quoi s’exciter, au moins sur le papier et surtout trente ans après les faits. Sauf que ces compositions sont toutes particulièrement bien ficelées et qu’elles procurent encore aujourd’hui entière satisfaction pour qui est un minimum enclin à apprécier ce genre de Death Metal qui pue le sang, la tripaille et le scalpel chirurgical.
Avant de conclure, quelques mots au sujet de certaines de ces mélodies que déroule Necrony. Que ce soit sur "Gynopathological Excav-Eater" à 2:06 et 2:50, "Ocular Obliteration" à 2:50, les dernières secondes de "Excavated, Eviscerated And Emaciated" ou bien encore "Acute Pyencephalus And Cerebral Decomposure" à 3:30, vous pourrez y entendre des solos qui semblent volontairement manquer de cette fluidité pourtant primordiale pour à ce genre d’exercice. Le rendu, surprenant et étrange, ne manque pas de singularité et apporte effectivement un certain cachet au Death Metal de Necrony même si la frontière semble mince entre l’imposture et le coup de génie. D’ailleurs, n’oublions pas non plus cette flûte ainsi que cette guitare Jazz sorties de nulle part et que l’on doit respectivement à Rickard Mahrle (que l’on retrouvera d’ailleurs l’année suivante sur la quatrième démo des Suédois d’Altar) et à Fredrik Folcke. Ces instruments font leur apparition sur le titre "Acute Pyencephalus And Cerebral Decomposure" et apportent des sonorités Progressives 70’s (au moins sur les premières secondes du titre) pas désagréables et qui là encore amènent avec elles un brin de personnalité en plus.
Arrivé trop tardivement dans le game pour espérer faire la différence, Necrony n’en aura pas moins acquis une solide réputation dans l’underground grâce à une discographie qui trente ans plus tard n’a rien perdu de son efficacité et de sa pertinence. Concernant Pathological Performances et malgré une exposition moindre par rapport à certains de ses petits camarades d’époque en avance sur lui, il reste l’un des albums les plus emblématiques du genre. Un disque extrêmement solide emprunt d’une petite touche de personnalité qui permet de faire la différence dans un genre pourtant extrêmement balisé. Bref, si vous n’étiez pas déjà l’heureux possesseur de cet album dans sa version Poserslaughter Records, je ne saurais trop vous conseiller de faire l’acquisition de cette réédition providentielle qui mérite assurément de figurer sur vos étagères.
| AxGxB 20 Juillet 2023 - 467 lectures |
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