Winterstorm - Vinterstormener
Chronique
Winterstorm Vinterstormener
Après Gryftigæn et Ründgard dont on a déjà parlé ici, place aujourd’hui à Winterstorm, énième projet de monsieur Carlos Andrés aka Lord Valtgryftåke qui pour une fois n’est pas seul à bord puisque celui-ci est accompagné pour l’occasion par Jose Amay aka Wampyric Strigoi (Wampyric Rites, Dungeon Steel, Avstral Forest...) ainsi que par un certain Bifrous Nocturno (Culto Nocturno, Diabolic Oath...). Après deux démos (Vmbra Mors et Demo II MMXX compilées l’année dernière en LP via le label belge Rabauw Records) et un split aux côtés de Wampyric Rites, Diabolic Oath et Satanic Count, le trio a sorti en avril 2021 sous les couleurs de Mahamvantara Arts Records ce premier album intitulé Vinterstormener. Disponible tout d’abord au seul format cassette, celui-ci s’est vu offrir en fin d’année dernière une version CD grâce, une fois de plus, au concours du label portugais Signal Rex.
Illustré de bric et de broc à l’aide d’une photographie granuleuse et d’un chouette logo qui tous les deux laissent peu de place aux doutes, le groupe sud-américain s’engouffre comme on pouvait s’y attendre dans la voie d’un Black Metal primitif, rudimentaire et famélique porté par une production volontairement cradingue et déséquilibrée. À l’image de beaucoup d’autres formations évoluant dans le même registre, la musique de Winterstorm n’est pas faite pour les oreilles les plus chastes puisqu’au contraire du premier album de Ründgard récemment chroniqué, le trio a fait le choix d’un son abrasif et particulièrement saturé qui entre ce souffle permanent et ce côté amateur et fauché pleinement assumé rendent l’immersion forcément moins aisée...
Car comme toujours avec ce genre de groupe, ce premier album de Winterstorm ne se destine finalement qu’à ceux qui voient en ces caractéristiques souvent rédhibitoires pour le commun des mortels, la promesse d’atmosphères tourmentées et terrifiantes et pour qui l’aspect dépouillé, simple et redondant que revêt invariablement ce genre de Black Metal n’est aucunement un souci mais là encore une invitation à un voyage où règne un certain malaise...
C’est au son d’une introduction pluvieuse aux sonorités médiévales ancestrales (sonorités d’ailleurs reprises lors de la conclusion de ce premier album, trente et une minute plus tard) que le trio nous embarque sans attendre dans son univers. Un court moment de calme et de contemplation avant l’entame d’hostilités (modérées) menées de manière très scolaire par le biais d’un riffing abrasif, décharné et quelque peu répétitif rappelant d’ailleurs les premières heures d’un certain Burzum ("Into The Deep Darkness", "The Storm & The Night", "The Frozen Winds Of Winter") auquel viennent s’associer une batterie rudimentaire et tout aussi aliénante, notamment lorsque celle-ci enchaîne les blasts sans discontinuer ("Into The Deep Darkness", "Through The Astral Mist", "The Storm & The Night") ainsi qu’une voix arrachée et lointaine qui hurle sa haine, son désespoir et son mal-être, derrière, là-bas, quelque part au fond... Bref, rien de bien nouveau dans cette formule déroulée avec pas mal de réussite même s’il est vrai que parfois le riffing peine davantage à convaincre à cause d’un côté beaucoup trop anecdotique pour espérer faire la différence, notamment sur le moins bon "A Distant Wind Horizon".
Cependant, s’il n’est pas un foudre de guerre en dépit de nombreux coups de boutoirs bien sentis, c’est aussi parce que Winterstorm a eu l’intelligence de varier les plaisirs en changeant régulièrement de dynamique. Un moyen de rompre avec la relative monotonie de ces riffs rachitiques et de ces quelques attaques frontales offrant bien souvent assez peu de nuances. Entre les passages Rock’n’Roll de "The Storm & The Night", le tchouka-tchouka entrainant de "Through The Astral Mist" et toutes ces séquences mid-tempo et autres ralentissements hypnotiques et mélodiques que l’on peut trouver sur "Into The Deep Darkness", "The Frozen Winds Of Winter" ou "A Distant Wind Horizon", le propos du groupe sud-américain se veut relativement varié. Suffisamment en tout cas pour rendre son propos digeste et moins redondant qu’il n’y paraît.
S’il n’offre aucune surprise et qu’il s’inscrit dans un registre particulièrement balisé, Vinterstormener n’en demeure pas moins un premier album relativement solide. Certes, quelques riffs et autres séquences ne font pas nécessairement mouche et souffrent d’un coté un peu trop passe-partout mais dans l’ensemble le trio avance suffisamment d’atouts pour pouvoir convaincre. Album court et relativement varié, en tout cas d’un point de vue dynamique, Vinterstormener ne changera donc absolument pas le petit monde du Black Metal mais prouve qu’une fois encore il est possible de (très) bien faire et cela même sans faire preuve d’une quelconque originalité. Reste à voir ce dont le groupe sera capable pour la suite mais pour le moment, ce premier jet s’avère plutôt engageant.
| AxGxB 9 Juin 2022 - 920 lectures |
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