Firtan - Marter
Chronique
Firtan Marter
Quatre ans après un
« Okeanos » particulièrement réussi il était temps pour le quatuor Allemand de remettre le couvert après un silence relatif et une longue période de travail et de réflexion, vu qu’il a pris son temps pour écrire et composer avec soin ce nouvel opus tant attendu. Il est évident en effet que le combo sans faire de bruit a pris de l’envergure depuis ses débuts, s’améliorant à chacune de ses sorties et proposant une musique à la fois violente, atmosphérique et aux accents mélodiques et Pagan affirmés qui s’agglomèrent parfaitement du fait d’une écriture fluide et ce malgré une construction globale de plus en plus travaillée. D’ailleurs ce troisième album ne va pas déroger à cette règle vu qu’il est carrément la meilleure réalisation jamais sortie à ce jour par ses créateurs, qui dévoilent un travail impressionnant de maîtrise (quitte à parfois en faire légèrement trop) et qui va demander du temps et de la patience pour être totalement appréhendé et sans jamais souffrir de longueurs, malgré une durée générale relativement élevée.
Depuis ses débuts la formation a en effet toujours aimé les titres qui s’étirent afin de laisser le temps à ceux-ci de montrer ce qu’ils ont dans le ventre via de longues plages instrumentales et des cassures rythmiques nombreuses, mais ici elle s’est vraiment lâchée sans pour autant créer de dommages collatéraux et ce bien que la sortie de route soit parfois frôlée. Si cela interviendra un peu plus loin dans l’immédiat c’est l’excellent « Faðir » qui va donner le ton de ce long-format en mettant d’entrée toute la palette technique de l’entité, vu qu’on y retrouve des blasts furieux avant que des plans médium et épiques bien remuants n’apparaissent fortement pour donner l’envie d’aller au combat. Tout ça sans compter avec des nappes claviers éthérées et des guitares acoustiques douces qui amènent de la lumière au milieu des parties lentes et très sombres, qui mettent ainsi sur le devant de la scène autant une virilité débridée que des passages apaisants afin de jouer sur les deux tableaux. Ce schéma qui joue le grand-écart sera représenté plus loin sur les tout aussi imposants et réussis « Odem » qui mise sur le côté tempétueux plus marqué, et « Menetekel » plus désespéré de par son chant mais aussi plus brutal histoire de renforcer le paradoxe entre tristesse et espoir. Ce ressenti constant va trouver son pic sur le redoutable « Lethe » qui nous sort même des riffs typiquement Heavy au milieu des variations, afin de renforcer ce sentiment de combat et de conquête d’où émerge toujours des accents pleins de mélodie et des breaks où les amplis se débranchent avec soin. D’ailleurs ce riffing typique ne sera pas l’unique moment surprenant de ce disque vu qu’on va entendre sur « Parhelia » et « Peraht » du violon et violoncelle, afin d’amener encore plus de larmes et de chagrin après des moments débridés où les blasts et le tabassage ont été la règle, et qui s’intègrent totalement à ces instruments venant du classique.
Si « Labsal » et surtout « Amor Fati » vont souffrir d’une durée exagérée (et d’un côté légèrement fourre-tout pour ce dernier) en revanche pour le reste tout y est également impeccable entre ombre et lumière, déchaînement et apaisement sur fond d’entrain communicatif et parties propices à l’introspection et au calme. Du coup si tout cela ne sera pas accessible de suite il faudra quand même savoir insister tant le résultat en vaut la peine, et montre des musiciens au meilleur de leur forme et à l’inspiration au top qui vont cette fois-ci grimper encore d’un échelon. Plus abouti que ses prédécesseurs et bénéficiant d’une vraie maturité artistique cet enregistrement est incontestablement une réussite – malgré ses petites faiblesses déjà évoquées, bénéficiant d’un gros travail préparatoire et d’une vraie authenticité qui fait plaisir à entendre. Continuant ainsi son petit bonhomme de chemin FIRTAN montre tout le savoir-faire musical d’Allemagne dans ce domaine technique, pointu et exigeant, mais où justement techniquement ça ne part jamais dans des délires extrêmes et dégoulinant de kitchouille… preuve de la qualité des membres qui en font partie, et qui se bonifient avec le temps à l’instar du bon vin. S’appréciant autant des amateurs du genre qu’auprès des novices ce « Marter » d’une grande richesse (qui confirme une fois encore la qualité des signatures de son label qui n’hésite toujours pas à prendre des risques) comblera le plus grand-nombre, pour peu qu’on s’y intéresse et qu’on s’aventure dedans on y plongeant les deux oreilles... bref on sait ce qu’il reste à faire désormais et il faut oser se laisser embarquer dans ce voyage étonnant et pas de tout repos, mais finalement si agréable.
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