Medieval Demon - Black Coven
Chronique
Medieval Demon Black Coven
Tu ne connais peut-être pas Medieval Demon et je ne t’en voudrais pas. Mais si tu es un amateur éclairé de la scène BM grecque, tu vas avoir l’occasion de réparer un oubli fâcheux. Medieval Demon n’est pas un perdreau du mois. Le combo existe depuis 1994 quand même et Black Coven n’est pourtant que son 4ème album longue durée. Tu vois, je te trouve des circonstances atténuantes.
Les Grecs n’ont jamais été vraiment sur le devant de la scène alors pourtant que leurs trois premiers albums n’avaient rien d’injurieux, bien au contraire, Medieval Necromancy, par exemple, m’ayant particulièrement emballé à l’époque de sa sortie. Dès l’artwork, typé old fanzine, avec des squelettes dans les coins et un bon vieux noir et blanc des familles, Medieval Demon sent bon le caveau et la terre fraichement retournée. Bien davantage d’ailleurs que les relents classiques de la scène grecque.
Les influences sont sans nul doute grecques. Rotting Christ n’est pas loin. Mais l’ésotérisme italien non plus, notamment dans ces claviers fantomatiques à la Abhor, qui délivrent une ambiance tout à fait singulière et remarquable alors que le combo n’est qu’un trio… Comment faire beaucoup avec peu, c’est souvent la recette gagnante. Where Witches Dwell and Labyrinths Confuse qui ouvre l’album est absolument dans ces tonalités grandiloquentes et théâtrales (comme Nocturnal Sacrilege, porté par ces ambiances bourrées d’emphase, à la structure très ample). Très lent mais aussi très ambiancé, un brin thrash, une pincée de vieux heavy, ce premier titre pose les bases de l’ésotérisme crasseux du combo hellène. Les atmosphères y disputent la lumière aux soli heavy chaotiques qui viennent parfois illuminer la structure (Black Coven, Baptismal Blood et son départ presque Maiden). C’est riche, c’est diversifié et suffisamment naturel pour que rien ne fasse tâche.
L’utilisation du clavier, comme un orgue Hammond, charrie toujours son lot d’émotions (Where Witches Dwell and Labyrinths Confuse, Black Coven), qu’il soit utilisé à titre principal ou comme soutien, en arrière-plan sonore, d’autres instruments. Son omniprésence ne gêne en rien tant il s’intègre parfaitement à la musique, tant même il la justifie (le départ hyper profond et bourré d’emphase de Black Coven, où il lance la montée en puissance de la batterie et de la guitare, la tension apportée sur Nocturnal Sacrilege). De la même façon, la plupart des titres comprennent des chœurs, plus ou moins discrets, qui gonflent la structure d’une dimension supplémentaire, lui offrant une épaisseur nouvelle (sur Katavythisis par exemple).
Mais la vraie plus value, c’est ce saxophone incroyable, sublime, qui bouleverse tout sur Black Coven en pont central, qui se mêle aux instruments et qui fait tournoyer le morceau dans les airs, comme on regarderait des feuilles s’envoler, prises dans une bourrasque, un soir d’automne et de mélancolie. Magistral, l’emploi de cet instrument, différent de ce que font Shining ou Solefald par exemple, donne à certains morceaux des atours bluezy qui se marient parfaitement avec la structure BM (le départ magnifique de Baptismal Blood, où le saxo se mêle à des riffs heavy puis à un mid-tempo sépulcral). C’est ample, aéré et tendu à la fois ; l’urgence le dispute à l’emphase, le tout dans une alchimie sans faille.
La science de la composition du combo hellène va d’ailleurs au-delà de ces structures lentes et mid-tempo. Lorsque le blast devient la norme, comme sur Sylvestris Deus (Protector of the Forests) ou sur l’épique The Grave Dwellers par exemple, la structure s’enrichit subtilement d’arrangements qui tranchent (les bruits d’orage en fond sonore), écartant pour un temps les ambiances sépulcrales au profit d’atmosphères plus tendues, plus menaçantes (le piano échevelé en pont central sur Baptismal Blood).
Black Coven est un album formidable, d’une très grande richesse, qui mérite l’écoute attentive de tous les amateurs de BM porté sur les ambiances, l’ésotérisme et une recherche d’originalité qui ne dénature en rien l’essence du style. Une merveille !
| Raziel 21 Janvier 2023 - 1168 lectures |
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