Suicidal Madness - Par-delà le bien et le mal
Chronique
Suicidal Madness Par-delà le bien et le mal
Alors que tous les membres de
SUICIDAL MADNESS sont actifs dans d’autres formations, dont certaines déjà fortement appréciées du public
black,
SOMBRE CROISADE pour ne citer qu’elle, les mecs trouvent cependant le temps de faire vivre cette entité de
black metal dépressif puisque «
Par-delà le bien et le mal » en est le quatrième LP depuis ses débuts en 2011 (la formation compte en plus un EP, un split et deux démos). Pas mal pour un truc qui a tout du projet parallèle.
Dépressif ? On ne s’en serait pas douté dites-donc à la lecture du nom du groupe ! Et puis ce titre d’album là, ça ne serait pas le livre de l’ami Friedrich par hasard ? Idem pour la chanson « Le crépuscule des idoles » ? C’est sûr qu’il y a à priori peu de chances de danser une gigue endiablée sur ces cinq nouvelles compositions qui sentent fortement la lame de rasoir ensanglantée, la tempe brulée par la poudre à canon ou encore les armoires à pharmacie vidée de leur stock de tranquillisants. N’étant pas un fin spécialiste de Nietzsche, mais le connaissant suffisamment pour savoir qu’il a un nom de famille particulièrement pénible à écrire, je ne saurai dire si l’album est un concept basé sur la pensée du philosophe allemand mais il reste que le nihilisme (néanmoins teinté d’un certain humour) qu’on lui prête se marie fort à bien aux ambiances développées tout au long de ces cinq plutôt longues compositions (entre quatre et dix minutes tout de même pour « Le voyageur et son ombre ».)
Le problème lorsque je lis « black suicidaire » ou « black dépressif », c’est que j’ai de plus en plus souvent en tête l’image de post adolescents ayant mal digérés leurs frustrations scolaires et venant chouiner leur mal être dans nos oreilles. Comme si avoir pris un râteau en quatrième justifiait de s’habiller en noir et d’enregistrer sa misère existentielle sans comprendre que l’étalage vide des sentiments futiles est bien pire qu’un silence résigné doublé d’un honnête travail d’introspection. Bien heureusement, les membres de
SUICIDAL MADNESS sont adultes, la pensée est donc plus profonde, l’expression de la détresse plus mûre et, surtout, la maîtrise instrumentale est suffisamment conséquente pour pouvoir traduire intelligemment en notes un sentiment aussi diffus que le spleen, la mélancolie la plus noire ou encore la pensée suicidaire produite non pas par l’incapacité à comprendre une situation mais au contraire parce qu’on l’a trop bien comprise.
Bref… Il ne prête guère le flanc à la gaudriole ce «
Par-delà le bien et le mal ». Ses tempos lancinants sont autant de blessures qui palpitent au grand air, pourrissantes et gangrénées, le chant est la plainte sans fin d’une âme tourmentée, le tout dégageant une atmosphère de deuil, de pénombre humide. Je ne saurai dire si cette offrande à la nuit est meilleure que les précédentes, même si sur un plan purement visuel j’avoue avoir une préférence pour les clichés en noir et blanc des sorties passées, il reste qu’il me semble que l’album est une porte d’entrée idéale pour quiconque souhaitant découvrir un autre visage du
black metal, moins grand-guignol que les têtes de gondole habituelles et donc plus humain, même si cette part d’humanité est justement celle que l’on cherche le plus à enfouir.
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