Pulmonary Fibrosis - Organ Maggots
Chronique
Pulmonary Fibrosis Organ Maggots
On va commencer d'entrée de jeu par te mettre le tournis, cher lecteur : 25 ans de carrière, 2 démos, 3 compilations, 85 splits (!!!), et 4 albums long-format, soit une moyenne de 3,76 sorties par année civile. Pas mal, non ? C'est Français.
Tu me diras que tout n'est pas forcément valable dans cette abondante production ? Je serais bien incapable de te contredire - après avoir consulté ma checklist, je n'ai écouté qu'à peine la moitié des sorties du combo. N'empêche, n'empêche... Pulmonary Fibrosis le premier nom qui vient à l'esprit lorsque l'on parle de la scène Grindcore hexagonale, il en reste que son dévouement au "Nasal Nauseous Liquid Goregrind" n'a pas faibli pendant ces 25 années de carrière. La preuve : leur quatrième full-length, intitulé "Pulmonologists", est paru l'hiver dernier chez les Japonais d'Obliteration Records. Pas impossible que je me penche prochainement sur son cas, d'ailleurs...
Pour l'heure, attardons-nous sur le premier long-jeu de Pulmonary Fibrosis, sorti en 2007 chez le défunt label Last House on the Right (chez qui l'on retrouvait les très poétiques Anal Penetration, Tu Carne, Gored ou encore Machetazo). C'est que le bien nommé "Organ Maggots" fait partie de mes Madeleines de Proust. Ça fait peu ou prou 15 ans qu'il revient épisodiquement dans mes écoutes, à l'image de ce bon copain, un peu perdu de vue, que l'on revoit tous les six mois - et toujours avec plaisir. L'album s'est dernièrement rappelé à mon bon souvenir par une régularisation (très) tardive, grâce au repress d'Eclectic Productions. Le Sagamore adolescent désargenté est content d'enfin posséder en dur l'une des nombreuses pépites du Goregrind underground français - en plus d'un bon prétexte pour t'en parler.
"Organ Maggots" a été enregistré en 2005, par l'indéboulonnable Guyome, batteur / chanteur tenant bon la barre depuis 1999, mais également Joaness, à la guitare, et Pascal, au chant, décédé en 2006 - qui n'aura, malheureusement, même pas pu entendre le résultat de sa prestation... L'album s'est payé le luxe d'un mastering signé Scott Hull (Pig Destroyer, Agoraphobic Nosebleed, pour les deux du fond qui dorment), le ricain parachevant l'opus avec quelques touches de gerboulade du plus bel effet. D'ailleurs, l'artwork cheapos ne trompe pas sur la came : n'attendez rien d'autre de ces 21 titres qu'un Goregrind salingue, mal dégrossi... Et diablement attachant.
C'est qu' "Organ Maggots" fait le pont entre les deux grandes écoles du Goregrind : la maison "Obscene Extreme", celle qui exige que l'on ne fasse que groover, quitte à passer pour un gros simplet; et l'autre, qui recommande d'ouvrir le caveau familial au pied de biche pour aller gratter les fonds de cercueil à la petite cuillère. Pulmonary Fibrosis joue sur tous les tableaux. Tu veux te déhancher comme un gros nigaud ? Prends, y'a même du rab : "Turn Water to Pus", "Accident in the Nuclear Power-Station", "Hacking in Pus"... Tu préfères au contraire avoir à te boucher le nez, fermer les yeux et subir la dégelée? Il y a de la déferlante, de la fosse septique qui déborde : "Organ Maggots", "Hacked the Human Flesh", "Putrid Afterglow"... Le riffing est gras, lourdingue, résumé à un bourdonnement confus à l'arrière du spectre. La batterie et son inénarrable caisse claire piccolo, quand elle ne donne pas dans le poum-tchac, dispense de féroces blast-beats - pas toujours dans le temps, ni soutenus avec la même intensité, mais qu'importe. Le duo de voix, entre le growl caverneux de Pascal et la chasse d'eau bouchée inhérente au genre, fait ton sur ton. Le petit grain de maïs sur le tas de merde. Et on en redemande, évidemment - à condition de bien laver les Pataugas entre deux écoutes.
D'accord, d'accord, "Organ Maggots" n'a pas la puissance quasi-occulte d'un Sublime Cadaveric Decomposition des débuts, ou d'un Lymphatic Phlegm. Il n'a pas non plus la force de frappe d'un Squash Bowels période "Tnyribal" ou d'un Regurgitate sur "Carnivorous Erection" - et tout ce qui aura précédé ce jalon du genre. Néanmoins, au-delà de ce côté "doux souvenir" que j'assume intégralement, je trouve à ce premier full-length un charme incroyable. Les premiers pas du groupe dans la cour des longues durées. Mal assurés ? Peut-être. Pas originaux pour un sou ? Ce n'est pas vraiment ce qu'on leur demande. Un peu bancal, pas toujours sur les temps, bricolé avec trois bouts de ficelle ? Sûrement. Mais bien au delà de ses petits travers, "Organ Maggots" bouillonne de passion, de spontanéité, et surtout d'authenticité. Voilà l'ingrédient, le petit goût de "reviens-y" qui manque cruellement à bon nombre de sorties du genre.
Bref, ça fait 15 ans que le disque m'accompagne, que je le dépoussière de temps à autre. Vu la tournure qu'ont pris les choses, pas impossible qu'on reparte pour 15 piges de plus... L'occasion pour ceux qui lisent ces lignes de (re)donner à cette galette bien rance un tour de manège dans la platine.
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