On avait quitté les Lyonnais de
Deadfuck en 2020, avec
"#Humanité", belle petite ogive de Death/Grind fort bien troussée. Du boulot d'amoureux d'un genre tout entier, ce qui se sentait, et se sent toujours. Finalement, hormis quelques petites facilités qu'on lui pardonnait facilement (la passion excuse tout !) et un recours franchement poussif aux
pig squeals (bon, j'ai découvert
Devourment entre temps, ça aide à apprécier l'exercice), je n'avais pas grand chose à lui reprocher. Une bonne petite branlée, comme on les aime.
Trois ans plus tard, le temps de nous remettre, nos Rhonalpins remettent le couvert et passent, cette fois-ci, par la grande porte. Et ils le méritent. Certains régressent ou se contentent d'une vitesse de croisière, voire d'un surplace confortable -
Deadfuck passe la cinquième et éclate la barrière du péage. Que de points pris, et ce sur tous les plans ! La technique, l'exécution, l'écriture (dans les compositions comme les paroles), la production, le visuel... Je m'attendais à un sympathique petit steak derrière la nuque, j'ai eu droit à la planche cloutée. Un régal. Pas intégral, hein, je reste un peine-à-jouir en la matière. Mais ces vingt-et-une petites minutes se savourent avec plaisir pour qui goûte son Death abâtardi de Grind - ou l'inverse ? Je sais plus.
Visuellement, donc, c'est déjà le coup de foudre.
Exit le Photoshop un peu hasardeux des débuts,
"Valeur Chair" se paie le luxe d'un visuel magnifique, aussi classieux qu'évocateur - laissant deviner la teneur des paroles, que je vous invite à découvrir en dur ou en numérique. C'est en confiance qu'on lance l'écoute.
Et en français soutenu, je crois qu'on appelle ça
"se faire laver le cul". Putain, quel son ! Je comprends mieux pourquoi le groupe n'a pas tari d'éloges sur le travail effectué par le Convulsound, tant sur le
mix que sur le master. Batterie, guitare, chant, même la basse qui fait tapisserie : tout est parfaitement à sa place, monstrueux, démesuré, obèse. Avec un tel boulot fourni sur la composition, ç'aurait été dommage de ne pas se taper un son à la hauteur de ses ambitions.
On est des brutes, ouais, mais on ne va pas se contenter de tartiner sans discontinuer pendant vingt minutes.
"Valeur Chair" sait varier son jeu, entre
tracks dans l'agression la plus gratuite et ralentissements conçus pour faire craquer quelques cervicales. Que ce soit l'introduction "Diégèse" et ses tapis de double cadençant les cordes en obésité morbide, où le démarrage de "Testimonium", invraisemblable de lourdeur, les riffs de Chris font mouche (presque) à chaque fois. Pétris d'influences que l'on devinera au premier coup d'oreille (mes confrères l'ont déjà largement évoqué dans leurs papiers), certes, mais quand ces dernières sont aussi qualitatives, on ne va pas cracher dans la soupe. L'ensemble est un mur, pur et simple, et les bonnes idées ne manquent pas : les saillies de gorge de Diego à 0:19 sur "Apoptose", accompagnant un
riffing bien cadencé sur une batterie qui s'emballe; le mid-tempo Truchan
-esque entamant "Bétail"; "Maniaque" et ses deux mouvements, entre ouverture en forme de chape de plomb et final tête dans le guidon... J'ai déjà dit qu'on se régalait ? Chacun est parfait dans son rôle, et nom de Dieu, ça joue.
"Valeur Chair" est globalement (très) réussi, c'est une évidence dès la première écoute. Mais il est lesté aux chevilles par quelques petites bricoles qui me font immanquablement tiquer. Les
squeals sont mieux utilisés (en tout cas, ils me gênent moins), mais prennent parfois une tournure un peu inattendue... Prenez un titre comme "Grime", par exemple. Le bestiau démarre fort bien, rythmique bien
street, accélérations bienvenues, puis arrive la cinquantième seconde où j'ai l'impression d'écouter du
Gutalax - et rebelote à 1:07 qui nous catapulte sur la scène de l'Obscene Extreme, entre deux mongoliens avinés déguisés en dinosaures. Forcément, ça me fait ricaner. Mais c'est assez symptomatique de ces quelques choix un poil douteux qui tirent un ensemble carrément solide vers le bas. Sur "Pandémie", par exemple, un équarrissage en règle jusqu'à sa cinquante-sixième seconde, qui brise le rythme avec une rythmique quasi-dansante, presque hors-sujet, avant de repartir sur du pédalage sous EPO. Et "Traître", de la même manière, qui voit débarquer comme un cheveu sur la soupe ce break en
tapping sur lit de
bree-bree (à 0:26 et 1:00), provoquant un lever de sourcil mi-narquois, mi-circonspect. Mais je chipote.
Et si je chipote, c'est parce qu'il faut bien trouver quelque chose à redire au sujet de ce
"Valeur Chair".
Deadfuck accouche d'un excellent opus, homogène, imposant - un vrai bloc de béton armé. Ouais, il y a bien quelques lézardes à la surface - mais lorsque ledit bloc fonce à vive allure dans ta direction, crois bien que tu chercheras à planquer tes miches plutôt qu'à les compter. Merci les gars, c'est du nectar.
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