Deadfuck - #Humanité
Chronique
Deadfuck #Humanité
J'aime le Grindcore, c'est un fait. Et je l'aime encore un peu plus quand il est frappé du sceau AOC bleu, blanc, rouge, notre scène continuant de prouver, au fil des sorties, qu'elle n'a pas à rougir face aux Grands Anciens du genre. J'y recherche systématiquement les mêmes choses : puissance, authenticité, sincérité, et passion. Pas besoin d'être irréprochable, ou intelligent. Pour qu'un disque passe le test avec brio, il faut simplement qu'il ne triche pas, et passe mes tympans au papier de verre. Vu le calibre des sorties que le genre a pu nous offrir ces dernières années, autant vous dire qu'il est devenu, pour une galette, difficile de se tailler une place de choix dans mes menus quotidiens.
Oui, j'aime le Grindcore, dans ce qu'il peut avoir de plus bête, de plus méchant. Forcément, ce n'était qu'une question de temps avant que je ne me penche sur le cas Deadfuck. Un patronyme pareil, de ceux qui feraient suer Jérôme Garcin à grosses gouttes, ne pouvait qu'augurer du meilleur. Et force est de constater le sacré bout de chemin qu'ont parcouru nos trois Lyonnais ! Le groupe signait son acte de naissance officiel par le biais d'un EP, "Affliction", sorti en 2018. Mis en boîte en quelques heures à peine, de l'aveu même de Chris, Diego et Antoine, quelques morceaux qui sentaient la sueur, et l'urgence. Bien qu'handicapé par un son un peu approximatif, l'objet dévoilait déjà un potentiel assez prononcé pour le bottage de cul. Une affaire à suivre, donc ! Après un petit financement participatif, de quoi pouvoir s'offrir une production qui fasse honneur aux compositions, c'est en Mars dernier qu'est sorti "#Humanité", première longue manifestation du trio, en indépendant. Un "long" format se voulant, si l'on en croit le couple tracklist et pochette, un tantinet revendicatif, une palanquée rageur. Alors, essai transformé ?
La réponse est oui. J'évoquais l'évolution du combo plus haut, ce n'est pas pour rien : Enfin un son qui soit à la hauteur des douze titres ! Enfin, on peut discerner toute l'étendue du talent de nos trois Gones ! Chris à la guitare, pioche aussi bien chez Mumakil qu'Insect Warfare et Napalm Death (l'ouverture de "Chroma", forcément) pour tricoter des riffs entre le bourre-pif bovin ("Catharsis", en featuring avec le hurleur de Warfuck) et les assauts plus sournois ("Hypocrisie"). Antoine, derrière les fûts, de power-blasts en blast-beats, sans parler de ses tapis de double-pédale qui laissent sur le cul ("Innocence" et son final, bordel !), tient solidement la baraque. Il bourre, il bourre, sans jamais faiblir, bref, grand plaisir. Et le chant, du coup ?
C'est mon seul gros grief envers "#Humanité", pour être tout à fait honnête. Dès qu'il s'agit de hurler ou de beugler (oui oui, il y a bien une différence entre les deux), Diego prouve, tout au long de l'opus, qu'il en a sous le pied. Puissance, coffre, tout y est. Dès lors, je trouve dommage d'en arriver à presque "gâcher" des compositions si puissantes et bien senties par des pig-squeals. C'est très personnel, mais je n'ai jamais pu blairer ce genre de vocalises, trouvant qu'elles décrédibilisent totalement un disque, comiques avant d'être convaincantes - Laissez ça au slam Death, pitié. Et, malheureusement pour l'album qui nous intéresse aujourd'hui, il y en a partout, du démarrage du second titre (qui m'a brutalement sorti du bain) jusqu'au grand final... Je ne sais pas, ça sonne faux, en décalage complet avec le ton de l'album - même si quelques samples bien crétins ("Obscène") pourraient me donner tort. Tant mieux pour ceux qui y goûtent, et tant pis pour moi !
"#Humanité" me plaît, indéniablement. Au-delà d'être, avant toute chose, un bon album de Grindcore, teinté de Death Metal quand il le faut, il me donne surtout l'impression de me correspondre. Je crois que je m'identifie assez aux musiciens de Deadfuck. Quand j'écoute ce premier longue-durée, j'ai l'impression qu'on a, tous les quatre, trippé en boucle sur les mêmes groupes, saigné les mêmes disques en mode repeat... Qu'on veut traduire cet amour pour les décibels et les coups de boutoir, chacun à notre manière. La plume pour l'un, les instruments pour les autres. Et le résultat est à la hauteur de ce que j'attends du style : preuve en est, malgré mon aversion pour les squeals, je me surprends à y revenir régulièrement. Si ça, c'est pas un gage de qualité, je ne sais pas ce qu'il vous faut !
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