Alors que nous avons déjà plus d'un pied en 2011, je vous propose aujourd'hui de faire un petit pas en arrière et de retourner en 2010 afin d'évoquer en ces pages l'un des albums qui m'aura personnellement le plus marqué en cette année qui célébrait, non sans beaucoup d'émotion, mon passage chez les trentenaires. « Zubroswka Are Dead », troisième effort de mes toulousains préférés, a pourtant bien failli ne jamais voir le jour. Problèmes de line-up, galère de label (cf interview)... Zubrowska, un genou à terre, a bien failli tomber, mais a su s'en sortir de la plus belle des façons. Le groupe s'est totalement sublimé, renaissant de ses cendres tel l'oiseau légendaire afin de repartir plus motivé encore. « Zubrowska Are Dead » c'est ça: un testament au recto et un faire-part de (re)naissance au verso.
Pour entamer ce panégyrique totalement assumé, commençons par ce qui saute aux oreilles dès la première écoute: le son! Malgré leurs galères, les zubro ont quand même réussi à s'offrir un petit plaisir en allant enregistrer au Fascination Street Studio en Suède avec Jens Bogren (Amon Amarth, Paradise Lost, Soilwork), et comme ils ont bien fait! « Zubrowska Are Dead » bénéficie en effet d'un son chaud et organique qui colle totalement aux compos avec notamment un son de batterie absolument divin, naturel et à mille années-lumière des prods modernes sans âme. Ce premier atout est à l'image de l'album: franc du collier, sincère et sans fioriture.
Si la musique de Zubrowska n'a cessé d'évoluer au fil des albums, leur patte est immédiatement reconnaissable: ce mélange de grind, d'un soupçon de death, d'influences hardcore, mathcore voire carrément rock, le tout exécuté avec une fougue et une envie remarquablement communicatives. Et si les éléments hardcore ou rock (voire même post-machin) semblent plus présents encore que par le passé (certains passages ne seront pas sans évoquer Every Time I Die ou dEFDUMp, tant au niveau de la musique que des voix), « Zubrowska Are Dead » n'oublie pas pour autant d'envoyer la sauce quand c'est nécessaire (il y a toujours du blast ne vous inquiétez pas!). Après une petite mélopée vocale en guise d'intro, la folie éclate avec un « Wake Me Up When I'm Dead » tonitruant et compilant tout ce que le groupe sait faire de mieux, alternant accalmies passagères et déferlement de violence hystérique. L'enchaînement avec « Satan Is Love » est si naturel que l'on y voit que du feu, et on touche là l'un des autres gros points forts de cet opus: une homogénéité parfaite. « Zubrowska Are Dead » se consomme d'une traite, comme on regarde un bon film, tous les titres se suivant sans aucune solution de continuité, quelques petits interludes mélodiques venant servir de liant à cette oeuvre (« A Journey Begins », « Solitude »). On aurait presque l'impression d'écouter une seule piste dantesque de 42 minutes. « From Beginning... » « ...To End ».
Cette folie qui se dégage de la musique du quintette doit évidemment énormément au duo vocal de Julien ''Nutz'' Deyres (nouveau chanteur de Gorod, pour ceux qui auraient raté un épisode) et Claude Abi Rached qui n'ont de cesse de s'époumonner comme deux beaux diables et dans deux registres sensiblement différents et complémentaires, éraillé pour le premier, guttural pour le second. Toutefois si agressivité et déchaînement sont au rendez-vous, Zubrowska laisse également parler sa fibre plus sensible grâce à quelques mélodies qui parsèment cet opus encore plus que les précédents. Ici encore on nage en pleine dualité, le meilleur exemple étant la géniale « The Memorial Part II First Death Experience » dont les mélodies écorchées vous étalent les tripes sur la table (à partir de 14'') avant de vous laisser un sourire béat et une larme à l'oeil (à 1'06).
Zubroswka avait donc un pied dans le cercueil, il danse aujourd'hui sur ses cendres fumantes. Fidèles à leur style si particulier aux guitares hystériques (ce joyeux bordel à 2'34 sur « Drop The Shell And Climb The Mountain ») , aux riffs hypnotiques, aux accents hardcore (« Drop The Shell And Climb The Mountain » encore à 1'44), aux cassures rythmiques permanentes, les toulousains ont fait de « Zubrowska Are Dead » le meilleur pied de nez aux difficultés qui semblaient s'obstiner à vouloir les enterrer. Doté qui plus est d'une production quasi parfaite et sur mesure, où tous les instruments prennent leur place admirablement (miam cette basse!), cette galette à l'artwork soigné (signé Maël De Narval) trônera crânement aux côtés de
« One On Six » et « Family Vault ». Zubrowska est bel et bien vivant et il le montre de la plus belle des manières: en réalisant ni plus ni moins que leur meilleur album à ce jour et certainement l'une des plus belles sorties de 2010. Vive Zubrowska!
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