Est-il encore possible aujourd’hui de rédiger une chronique d’un album de
S.U.P. sans qu’elle soit dithyrambique ? Je me pose la question car j’ai vu tout le monde se palucher sur ce nouvel album… Il faut dire que depuis 1993 et la parution de «
The Cube » (je ne fais volontairement pas la distinction avec
SUPURATION, jetez-moi au cachot si cela vous soulage), les mecs n’ont fait quasiment que des strikes en ne cessant de cultiver leur spécificité : un mélange de
death metal plus ou moins expérimental selon les périodes et de
new wave, soit le parfait compromis entre la pesanteur des riffs et la froideur des arpèges, l’épaisseur du growl et la grâce incontestable du chant clair. En un mot : unique, en France comme à l’international mais, surtout, jamais vraiment imité. Une anomalie (oui, c’est une référence à l’album «
Anomany » de 1995).
Alors que tous les fans se rassurent, «
Octa » ne propose rien d’autre que ce que nous connaissons déjà, peut-être est-ce d’ailleurs là le problème central. Comme d’habitude l’artwork est superbe, heureusement qu’il reste quelques gros cerveaux comme les leurs, bien éclairés, et que l’ordinateur n’est pas près de niquer. Cela rassure quant à l’avenir musical en France. En revanche, j’ai beaucoup plus de mal à m’enflammer pour ces huit nouvelles compositions que, par estime aveugle, je pourrais sans sourciller porter aux nues mais que, par réalisme modérément subjectif, il va me falloir ramener à des considérations plus pragmatiques.
Déjà, si la production a gagné en clarté par rapport à «
Dissymetry », qui était peut-être légèrement trop étouffée, elle me semble ici complètement annihiler la puissance habituelle de
S.U.P.. Si
A-HA avait mis de grosses guitares dans l’un de ses albums des années 80, cela aurait probablement eu le même résultat. Dit autrement, ils tombent à plat ces riffs massifs d’« Open Eye » ou de « Hebdomath » pour ne citer qu’eux. Car tout étant toujours au même niveau d’intensité (les tempos, les arpèges, les grosses guitares, les voix), l’album manque à mon sens de dynamique et, à moins que cette linéarité n’ait été expressément souhaitée par le groupe pour des raisons conceptuelles, cela en fait
in fine un disque bien moins percutant que ses nobles prédécesseurs.
Si le growl de
Ludovic Loez est toujours aussi excellent, profond, émotionnellement chargé, les mélodies en chant clair sont quant à elles un peu plus difficiles à appréhender. Je pense parfois à
PLACEBO, à
THE SMASHING PUMPKINS sur « Not Icarus », un peu à
VOIVOD aussi tout de même sur « Pseudopodic Phantasm » mais je suis globalement assez peu charmé non pas par le timbre (ce sont des références que j’apprécie beaucoup) mais plutôt par les lignes vocales en elles-mêmes, trop fades à mon goût et, surtout, assez peu marquantes de prime abord en termes de mémorisation. Pourtant, dès lors que tu fais le choix de chanter (par opposition au growl ou autre technique de chant extrême), l’auditeur attend généralement des choses mémorisables, comme le faisait si bien
THE OLD DEAD TREE ou
LYCOSIA, pour ne pas citer un groupe qui n’a rien avoir ici tel que
BARONESS mais dont l’album «
Gold & Grey » est juste fou en termes de mémorisation.
Et pourtant «
Octa » est rempli de bonnes surprises, à l’image du très étrange « The Lights of Eden » d’apparence simpliste lors de la première écoute mais qui offre en fait une superbe progression initiale, progression qui tombe hélas à plat dès l’apparition du chant clair, sans compter son abrupte rupture finale bien trop sèche que je qualifierais de
coïtus interruptus. Donc, en ce début d’album, trop de tempos identiques, trop de mélodies interchangeables, trop de linéarité, l’apogée de mon indifférence étant atteint avec « Queen Quintessence ».
S.U.P. retrouve bien heureusement des couleurs avec le riff introductif de « Open Eye », une sorte de
GODFLESH organique, mais c’est le sursaut érectile du moribond car tout retombe tel un vilain soufflet dès l’apparition du chant new wave, seules les parties
death du titre étant à sauver. Cependant, ce titre marque un crescendo dans l’intérêt que je porte aux compositions, avec d’abord « Hebdomath » puis « Torment », la chanson la plus inquiétante du LP avec ses hurlements en arrière-fond, ce simple gimmick faisant entrer la composition dans une autre dimension.
La formule est-elle trop usée ? Sommes-nous en train d’assister à un virage musical encore non totalement négocié ? Suis-je un trou du cul ? Je décide de mon propre chef de mettre fin aux écoutes répétées en étant sobre et sors me mettre quelques pintes dans mon bistrot de quartier… Retour à la maison, redécouverte du disque, l’alcool altèrera-t-il mon ressenti ? Oui ! Je découvre le solo lumineux mais tellement discret de « The Lights of Eden », il ne sauve pas le titre de son final frustrant mais il redore l’idée que je me faisais de la composition en mettant davantage en avant le travail pointu des guitares, tellement subtil qu’il passe facilement sous le radar de l’attention lambda, la mienne étant ces derniers temps dans les bas-fonds. Je n’arrive à me concentrer sur rien, ça en devient dramatique. Mais l’IPA révèle cependant l’essentialisme des riffs, tous réduits au strict minimum d’un point de vue de la démonstration technique mais exprimant tous finalement tellement d’émotions qu’il devient compliqué d’en parler. La moindre note est tellement chargée, c’est un peu comme votre lapin / cochon d’Inde / hamster / souris de compagnie : tout petit mais l’amour que vous lui portez est incommensurable, une petite boule de tendresse, peut-être bien supérieur à un être humain, chose bien légitime que je comprends à 100%. De plus, finalement, les mélodies vocales que je trouvais trop minimalistes révèlent leur aspect élémentaire, l’esprit
cold new wave dans sa plus pure expression justement, avec en prime un esprit
TYPE O NEGATIVE marqué qui rend définitivement le disque attachant, peut-être même poignant du fait de son génie de la simplicité…
Ah ! Je ne sais pas, je n’arrive pas à me prononcer, j’oscille entre la franche déception et la transcendance Illuminati, entre la verge triste du lundi soir et le priapisme flamboyant du weekend, entre les larmes du désespoir et l’envolée euphorique du protoxyde d’azote, quelqu’un peut-il m’aider ? Vous en avez pensé quoi vous de ce disque de
S.U.P. ? Flop de l’année ou Top of the Pops ? Je n’arrive plus à statuer, à la fois paralysé par le respect que j’ai pour ce groupe et suspicieux à l’égard de mon cerveau qui m’envoie des messages de lassitude en continu dès lors que j’écoute «
Octa ». J’aime
S.U.P., je ne veux pas en dire du mal parce que « Torment » fait flipper, parce que « Hebdomath », parce que le riff d’« Open Eye », parce que les deux minutes introductives de « The Lights of Eden », parce que la puissance d’« Atramentous Sea » et son pont étrange à deux minutes, parce que la mélodie de « Not Icarus » est belle, parce que « Pseudopodic Phantasm » fait une superbe ouverture à «
Octa » mais que même en mettant tous ces éléments positifs bout à bout je ne parviens pas à rentrer dans l’esprit du disque. Dommage pour moi, c’est certain.
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