Comme souvent avec ces groupes dont je tarde à vous parler et dont les chroniques en ébauche restent végéter dans les méandres de mes nombreuses réservations durant de longs mois si ce n’est de longues années, c’est une récente annonce faite sur les réseaux sociaux qui m’a mis une fois de plus face à mes innombrables manquements. En effet, les Finlandais de Dome Runner viennent de signer sur Svart Records et sortiront fin novembre un nouvel album intitulé
World Panopticon. En attendant que celui-ci arrive jusque dans nos oreilles, cela me laisse l’opportunité de revenir sur les débuts de cette formation dont le succès, au moins en Finlande, ne semble pas vouloir se démentir.
Formé en 2017 et originaire de Tampere, le groupe évolue pendant trois ans sous le patronyme de Paleskin avant de se décider finalement à en changer. C’est à partir de 2020 que celui-ci opte pour le nom de Dome Runner, un blaze qui par association d’idées et de mots évoque chez moi une rencontre improbable mais finalement pas si bête que cela entre les films Running Man et Mad Max Thunderdome. Après une première démo intitulée tout simplement
Demo 2020, Dome Runner poursuit sans trop attendre avec la sortie quelques mois plus tard de
Conflict State Design, un premier album paru d’abord chez leurs compatriotes de Starving Light Collective (Gray State, Bolt Cross, Kevätuhri, Virhe...) avant d’être réédité deux ans plus tard par le label américain Seeing Red Records (Cancer Christ, BleakHeart, Executioner’s Mask, The Wraith...). Si depuis, le groupe n’a pas particulièrement chômé (deux singles, deux EPs et donc un nouvel album à paraître d’ici quelques semaines), c’est bien ce premier longue-durée qui nous intéresse aujourd’hui.
Découvert début 2024 grâce au deuxième album de leurs copains de Gray State (l’excellent
Under The Wheels Of Progress) sur lequel Simo Perkiömäki (chant, guitare) vient poser sa voix, Dome Runner verse comme le suggère à juste titre cette illustration absconse et pourtant sans équivoque dans la pratique d’un Metal Industriel d’excellente facture. En effet, moi qui ne suis pourtant pas particulièrement connaisseur du genre (hormis quelques grands noms connus de tous), je ne peux nier être tombé rapidement sous le charme de ces huit compositions qui ont pour elles d’être à la fois hyper bien troussées et surtout indéniablement "catchy". Un terme qui fera peut-être office de "red flag" pour les amateurs assidus de ce genre parfois difficile d’accès mais qui pourtant ne peut pas mieux définir la musique des Finlandais qui effectivement n’a aucun mal à s’imprimer dans nos têtes.
Opérant sous la forme d’un trio avec précisons-le tout de même une véritable batterie, Dome Runner use pourtant de tous les artifices possibles afin de créer des atmosphères mécaniques particulièrement immersives. De ces samples industriels évoquants tout un tas de machines dévouées à l’exécution du même geste répété inexorablement à ces nombreux inserts et autres petits arrangements synthétiques en passant par cette production métallique et froide, notamment du côté de cette batterie implacable et martiale sans oublier ce chant hyper saturé et presque déshumanisé (sauf lors de ces quelques envolées mélodiques à la Burton C. Bell du meilleur effet), le cahier des charges est effectivement plutôt bien respecté.
Pour le reste, à la manière de groupes tels que Godflesh ou Fear Factory dont il s’inspire librement, la musique de Dome Runner est évidemment marquée par une certaine répétitivité. Si évidemment la batterie joue un rôle primordial avec ses beats martiaux et mécaniques qui vont ainsi servir à poser les fondations de cette musique industrielle, les riffs particulièrement abrasifs de Simo Perkiömäki vont, tout en exacerbant cette sensation de répétition, apporter également une lourdeur et une agressivité qui ne font qu’accentuer le caractère implacable d’une telle formule.
Cependant, s’il y a effectivement une notion de répétitivité très prononcée dans le travail de Dome Runner (notamment sur "Fuji Cracks" et "Impure Utility Of Authoritarian Power Structure" qui s’amusent à jouer des mêmes patterns sur de longues minutes), difficile de ne pas voir tout ce qui est fait par le trio finlandais pour apporter de la nuance et du relief à sa formule. Entre ces nombreux changements de rythmes concédés au détour de titres parfois très directs tels que "Imprisoned Existence" et "The Undemonizing Process", ces variations de thèmes au sein d’un même morceau comme sur "Impure Utility Of Authoritarian Power Structure", "Unfollow" et "Expire" et ces lignes de chants mélodiques et lumineuses qui apportent un peu de chaleur dans un univers pourtant froid et mécanique régi essentiellement par des cris et des hurlements douloureux (souvent sous formes d’incantations tantôt lointaines, tantôt prophétiques, tantôt hallucinées comme sur "Fuji Cracks", "Imprisoned Existence", "Impure Utility Of Authoritarian Power Structure" ou de manière plus franche comme sur l’excellent "In Pain" qui pue à pleines narines le Fear Factory de la grande époque),
Conflict State Design possède plus d’une corde à son arc et surtout les arguments nécessaires pour espérer convaincre les gens qui comme moi ne sont de base pas particulièrement clients de ce genre de sonorités (même si comme dit ailleurs, je commence à m’y ouvrir de plus en plus).
Évidemment, plus de trente ans après des albums majeurs comme
Streetcleaner,
ΚΕΦΑΛΗΞΘ (Psalm 69) ou
Demanufacture, les Finlandais de Dome Runner n’ont pas grand chose de nouveau à proposer mais à l’heure où des groupes tels que Realize et Black Magnet se permettent de pousser à nouveau le genre sous les projecteurs et cela non sans talent et réussite, difficile de ne pas reconnaitre le caractère particulièrement plaisant que revêt ce premier album extrêmement bien troussé. Froid, mécanique et répétitif mais en même temps catchy, varié, mélodique et finalement plutôt facile d’accès même pour les plus réfractaires à ce genre de sonorités industrielles,
Conflict State Design constitue une sortie particulièrement remarquable d’abord pour les amateurs de Metal Industriel qui décidément sont plutôt gâtés ces dernières années mais aussi pour ceux un peu plus verts qui aimeraient s’y frotter sans pour autant tomber sur des trucs trop compliqués et/ou expérimentaux. Bref, si Godflesh, Ministry, Fear Factory et d’autres groupes de ce genre sont votre came, il n’y a pas d’hésitation à avoir en ce qui concerne Dome Runner qui devrait largement répondre à vos attentes.
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