Shining - V - Halmstad
Chronique
Shining V - Halmstad
(Niklas Angående Niklas)
L'été dernier a été marqué par pas mal de morts dans le monde du métal. Il y a bien sûr eu Jon Nödtveidt (Dissection) mais aussi le chanteur de Shining, Kvarforth. C'est du moins ce que le bonhomme a fait croire à ses fans, à son groupe et même à sa famille. Obsédé par le suicide, le jeune Niklas Olsson aurait très bien pu commettre l'irréparable, l'annonce a donc plus suscité la peine que la surprise. Quoique surprise il y a eu puisque Kvarforth avait même carrément donné le nom de son remplaçant. Et puis voilà que tout ceci n'était qu'une supercherie d'une âme décidément torturée (les plus belles oeuvres ne naissent-elles pas dans les cerveaux les plus malades?) et qu'arrive en cette année 2007 le 5ème album de Shining et sa pochette on ne peut plus explicite, V-Halmstad.
Pour ma part, j'ai découvert le groupe suédois avec cet opus. Le nom ne m'était pas inconnu bien sûr mais croyant Shining acquis à un black métal pur et dur, je n'avais jamais fait l'effort de m'y intéresser. Grossière erreur enfin réparée! Si la musique de Shining reste proche du black métal de par ses riffs froids et son ambiance sombre, les Scandinaves sont bien plus que ça et possèdent leur propre style. Un style souvent qualifié de black métal suicidaire/dépressif (n'oubliez-pas, le frontman a des problèmes dans sa tête!). Je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette appellation, notamment le black de métal que le groupe a semble-t-il abandonné peu à peu, mais n'ayant pas envie d'épiloguer sur un sujet de toute façon bien futile, c'est celui que je retiendrai malgré tout car le plus proche de l'essence du quintette. Disons que les adjectifs sombre, suicidaire, mélancolique et magré tout accrocheur et s'appliquent ici de manière évidente.
Avec 8 minutes en moyenne au compteur si on laisse de côté l'interlude "Åttiosextusenfyrahundra" (2'43), les morceaux de ce V-Halmstad s'avèrent longs et progressifs. Ils sont tous construits sur le même schéma: l'alternance de passages électriques et acoustiques. Les passages "métal" sont constitués de riffs mid-tempo (très peu d'accélérations) lourds et froids certes simples mais headbangants et entraînants à souhait. Les parties acoustiques apportent elles une ambiance à la fois plus mélancolique et glaçante avec des breaks splendides à la guitare sèche soutenue par un duo rythmique basse/batterie qui remplit parfaitement son rôle (le break tout calme à 6'03 de "Längtar Bort Från Mitt Hjärta" ("Me languissant loin de mon coeur") presque sans guitare est aussi oppressant que le "Heat Miser" de Massive Attack!), et parfois accompagnée de piano comme sur "Låt Oss Ta Allt Från Varandra" ("Prenons tout des uns des autres") et de violon/violoncelle, citons au hasard "Besvikelsens Dystra Monotoni" ("La triste monotonie de la déception"). Shining n'est pas le premier à utiliser cette dualité mais je l'ai rarement entendue aussi bien employée. Le shéma est donc classique mais il fonctionne à merveille et pour peu que vous ayez une once de sensibilité en vous, certaines séquences ne pourront vous laisser indifférents, je pense entre autres à "Låt Oss Ta Allt Från Varandra" entre 1'11 et 4'26 (un des plus beaux passages de l'opus, à en pleurer!) et à "Åttiosextusenfyrahundra" ("Quatre-vingt-six mille quatre-cent"), magnifique adaptation de la sonate de Beethoven, "Clair de Lune" (j'en ai eu des frissons!). On notera également la présence de plusieurs soli, non pas démonstratifs mais plutôt émotifs (celui de "Neka Morgondagen" ("Renier demain") est grandiose!), avec un ou deux d'entre eux sonnant 80s, pour aller de paire avec les touches thrashy de certains riffs.
Mais Shining a surtout pour but d'instaurer une ambiance très sombre et d'emporter l'auditeur dans un sentiment, une impression de désespoir et de désenchantement total. Un peu comme Burzum, sauf que c'est pas pareil! Hormis la musique en elle-même, deux autres éléments contribuent à l'atmosphère peu festive de l'ensemble. Déjà, les samples, toujours discrets, parfois clichés certes (la pluie qui tombe et l'orage qui gronde sur "Yttligare Ett Steg Närmare Total Jävla Utfrysning" ("Encore un nouveau pas vers un putain d'isolement total")) mais qui, incontestablement, touchent. On a aussi le droit à des voix de femmes en pleurs ("Låt Oss Ta Allt Från Varandra"), histoire d'apporter encore plus de jovialité. Le 2ème élément, c'est bien entendu le chant de Kvarforth. Un chant très particulier qui ne conviendra pas à tout le monde mais auquel j'adhère complètement. Le Suédois fait un peu de tout sur ce V-Halmstad: il râle, soupire, chuchote, halète, hurle, se plaint, crie, gémit, grogne, pleurniche...une vraie attraction à lui tout seul qui réussit celà dit à véhiculer un panel d'émotions bien plus large que la plupart de ses comparses, malgré la barrière de la langue. Kvarforth vit ses paroles, et semble souffrir de mille mots en les énonçant. Petite observation personnelle: sa voix gutturale sur "Låt Oss Ta Allt Från Varandra" me fait penser à celle de Jose Feliciano sur "El Tango De Roxanne" dans Moulin Rouge (paye ta référence!). Le seul reproche que je ferai à Kvarforth, c'est qu'il en fait parfois un peu trop en donnant l'impression de forcer sa voix.
On pourrait rester des heures à vanter les mérites de cet album qui risque de figurer dans bon nombre de bilans de fin d'année, le mien y compris. V-Halmstad est de ses oeuvres qui vous touchent au plus profond de vous et dont vous ne ressortez pas indemne. C'est cliché à mort mais c'est pourtant tout à fait ça. Un album tout simplement magnifique dont les émotions vous embarquent et ne vous lâchent plus (j'ai dû écouter l'album une vingtaine de fois en deux semaines!). Les émotions négatives sont décidément celles qui laisseront toujours le plus de traces. Je ne peux donc que vous inviter à écouter V-Halmstad et à découvrir, comme moi, un groupe ô combien talentueux. Pour clôre sa chronique, le chroniqueur cherche toujours la phrase qui tue, celle qui résumera en quelques mots les 129 lignes qu'il vient de cracher. Et en expert reconnu de cette pratique, je finirai cette longue chronique, comme il se doit, par une phrase de conclusion mémorable: Shining, c'est brillant!
| Keyser 26 Mai 2007 - 8864 lectures |
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