La sortie récente du dernier Orphaned Land est une occasion en OR(
-warriOR) pour effectuer une petite galipette arrière en direction de l'autre extrémité de la discographie du groupe, destination la période Holy Records. Première étape de cette descente à reculons le long de l'axe du temps, « El Norra Alila » est la 2nde offrande des israéliens et l'album « de la maturité » de cette première période de la carrière du groupe. En son temps, son prédécesseur « Sahara » avait fait l'effet d'un petit coup de tonnerre (
ou « de soleil » plutôt) dans l'underground métallique, et avait confirmé à la fois l'acuité du radar à talent du label français sacré, et le penchant de celui-ci pour un métal au cuir tanné sous les cieux méridionaux. Néanmoins, malgré sa sophistication, cet album conservait des aspects rugueux, bruts, qui ne demandaient qu'à être affinés afin de bénéficier de la patine apportée par l'expérience et les années. Et c'est exactement ce qu'offre « El Norra Alila »: un « Sahara » 2.0 (
rien de péjoratif dans cette affirmation) mieux composé, mieux fini et au parfum de « reviens-y » encore plus prononcé.
Sur ce 2e opus, le groupe confirme clairement son orientation musicale, à savoir un metal extrême atmosphérico-mélodique plutôt slow/mid tempo gorgé d'influences moyen-orientales, alternant lourdeur et colère, chaleur et mélancolie teintée d'optimisme, et présentant une facette spirituelle prononcée. A l'image de
« The Never Ending Way of ORwarriOR », « El Norra Alila » est un album fleuve proposant des morceaux relativement longs, riches en rebondissements, fréquemment liés les uns aux autres par une mélodie ou une absence de coupure franche (
l'enchaînement « The Truth Within » / « The Path Ahead » / « A Neverending Way »), et séparés par des interludes très « couleurs locales ». Orphaned Land capitalise ici clairement sur ce qui fai(
sai)t sa spécificité, et multiplie ces inclusions d'instruments « exotiques », qui – alliées à un chant et des choeurs dont les intonations sont sans ambiguïté, ainsi qu'à des guitares ruisselantes de mélodies aussi alambiquées que les décorations du palais de l'Alhambra – en faisait, et à quelques rares exceptions en fait encore, le seul représentant de la famille metal à proposer une musique aussi viscéralement orientale.
Mais si la musique d'Orphaned Land a clairement pris du grade par rapport à « Sahara », on est tout de même encore loin de la joaillerie fine d'un
« The Never Ending Way of ORwarriOR ». Le son reste assez pauvre comparé à celui concocté par Steven Wilson, notamment le mix qui met parfois en « valeur » la batterie alors que celle-ci n'a pas grand chose de folichon à offrir. De son côté le chant n'a pas encore l'assise ni l'assurance qu'on lui connaît aujourd'hui. Au niveau du travail de composition, même chose, on remarque quelques menues balourderies: un break trop peu convainquant par ci (
aux alentours de 2:51 sur « Like Fire To Water »), une hésitation rythmique par là (
à 2:40 sur le même morceau), un speech bien trop long en plein milieu de « The Evil Urge »… Cela nuit quelque peu à l'intérêt des morceaux, et abaisse du coup la note de cette chro d'un bon point. Mais il faut quand même reconnaître que ce ne sont que vétilles mises ici en exergue parce que, la bande à Kobi nous ayant habitué au fabuleux, le moindre faux pas fait tâche.
Car ne vous y trompez pas: la fusion des cojones métalliques et de la chaleur de mélopées envoûtantes, qui avait mis à rude épreuve notre système de refroidissement interne sur leur dernier album, produit ici encore de ces tubes hybrides qui sont la trademark du groupe. Ainsi sur « A Neverending Way », au long d'un crescendo démarrant sur un simple violon et la chaude voix de Kobi, les israéliens nous bercent au son d'un douce et puissante complainte dont la mélancolie n'a d'égale que la troublante beauté. Sur « Thee By The Father I Pray », l'aura religieuse dégagée magnifie un morceau navigant entre death atmosphérique, black et doom/death, le final débouchant sur des choeurs très typés et proprement grandioses. Mais le meilleur morceau reste encore sans doute « El Meod Na'Ala » que personnellement je ne peux écouter sans qu'immédiatement se dresse sur mes avant-bras une armée de poils unanimement au garde à vous. Cet habile mariage de metal et de polyphonies hébraïques est proprement magique, et produit un morceau lumineux faisant irrésistiblement dodeliner de la tête en rythme.
La réédition effectuée en 2006 qui sert de support à cette chronique est un digipack qui offre, en sus de l'album original, le morceau « Disciples Of The Sacred Oath », initialement écarté de la tracklist et réservé à la compilation « The Holy Bible ». Sur ce titre le groupe donne – du moins en début et fin de morceau – dans un black/death à la
Dissection, ce qui surprend au premier abord du fait des contrastes stylistique et climatique, mais qui passe finalement très bien. Sont encore adjoints à l'ensemble deux vidéos filmées à 3 ans d'écart (
2002 et 2005) à Tel-Aviv, sur lesquelles on voit un groupe bien plus à l'aise en live que ce que la dimension spirituelle que prend sa musique sur album ne pourrait laisser présager. Bref, si vous avez la bonne idée de vous rendre sur l'une des dates de la tournée que le groupe entreprend en ce début d'année en compagnie d'
Arkan et de
SuidAkrA (
et même dans le cas contraire), je vous recommande chaudement de vous procurer cet album, plus abouti que son prédécesseur et moins proggy que son successeur.
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