4 premiers albums qui sont autant de réussites.
Un « death » metal toujours plus mélodique, plus ambitieux, plus progressif au cours du temps …
Une cohabitation symbiotique entre growl et chant clair, violence et fragilité.
Une collaboration fructueuse avec Steven Wilson.
Un patronyme commençant par O.
Allez, j'arrête là. Vous aurez sans doute compris où je veux en venir avec mes gros sabots … Orphaned Land a tout de l'
Opeth moyen-oriental. A ce titre l'écoute du début de « The Path - Treading Through Darkness » est troublant, tant on a l'impression d'entendre l'une de ces pauses veloutées que s'accorde de temps à autre la bande à Mikael Åkerfeldt. Mais il serait injuste de présenter les choses ainsi. D'autant plus que « Sahara », le premier album de la Terre Orpheline est sorti un an avant «
Orchid ». Donc le grand frère - la référence - serait plutôt issu de Tel-Aviv que de Stockholm. Mais arrêtons dès à présent de jouer à celui qui a la plus grosse, d'autant que chacun des deux groupes possède véritablement sa patte, sa personnalité qui permet de le reconnaitre sans erreur possible au bout de quelques secondes.
« The Never Ending Way of ORwarriOR » est le meilleur album d'Orphaned Land à ce jour. Allez paf, une vieille affirmation lapidaire, comme ça, d'entrée de second paragraphe. N'empêche que c'est vrai. A vrai dire je garde un très bon souvenir des deux premiers albums du groupe (
on en reparle dans quelques temps, même lieu, même chroniqueur …), et dans la foulée j'avais donc logiquement acquis
« Mabool » … que j'ai aimé, mais que j'ai trouvé pendant longtemps un peu mou du genou. Si le groupe a tout de même fini par me convaincre, l'impression générale que je garde de ce 3e album est celle d'une grande douceur, de beaucoup de finesse et d'émotion … mais pas tout à fait d'un album de metal qui déchire sa race. Et j'avoue que j'avais un peu peur que le groupe continue de dévaler la pente de l'adoucissement musical, pour finir par se vautrer dans les épais coussins d'un rock prog confortable et aseptisé. La carte Steven Wilson m'avait d'ailleurs plutôt conforté dans ces craintes. Mais Orphaned Land est grand, Orphaned Land est beau, Orphaned Land sent bon le sable chaud … Et Orphaned Land nous revient avec un album aussi puissant qu'il est touchant, aussi grandiose qu'il est délicat, aussi addictif qu'il est ambitieux … Mais je m'emporte, et le paragraphe commence à se faire gras. Passons donc à la ligne.
Orphaned Land réussit sur ce 4e opus à proposer l'ultime symbiose entre le folklore moyen-oriental et le metal le plus couillu. Les deux éléments se mélangent et se confondent sur un pied d'égalité, loin de la superficialité d'une musique traditionnelle encouillifiée aux grosses grattes, ou d'un metal enfolklorisé à coups d'instruments exotiques. Ici l'osmose est totale, et ceci est le fruit d'une intelligence de composition qui confine au génie, ce dont on ne peut mesurer l'étendue qu'après un nombre conséquent d'écoutes. Ainsi le groupe délivre une musique enthousiasmante, grisante même, mêlant impressionnants déploiements de force et douceurs épicées, rythmiques implacables et sensation de plénitude, accès de rage grandioses et optimisme joyeux des petits matins chantants. Autre élément qui fait l'excellence de cet album: le chant. Toujours meilleur d'album en album, Kobi alterne le registre extrême - entre growl death et shriek black - avec des chœurs très « couleurs locales » et un chant clair atteignant des sommets de maitrise (
Ces frissons sur le délicat mais fabuleux «Bereft In The Abyss »!!). A noter aussi la présence d'un chant féminin occasionnel, qui tape à chaque fois en plein dans le mille. Mais on en était à énumérer les points forts de l'album ... Revenons-y, et évoquons maintenant l'impressionnant travail sur les orchestrations: un ensemble de flutes, de violons et d'autres curiosités locales vient régulièrement faire souffler un vent chaud et vivifiant sur les morceaux, apportant tour à tour majesté, moelleux et parfums des milles et une nuits. Le dernier élément qu'il est impossible d'éluder, ce sont les reines de Saba de cet album: les guitares. Qu'elles s'expriment en mode acoustique, en doublettes lead, chargées de miel et de cannelle, ou plus mélancoliques, lors de soli presque blues rock, elles tiennent le haut du pavé et se disputent la vedette avec le chant. Un vrai bonheur.
En 15 morceaux, Orphaned Land explore tous les formats et réussit sur tous les tableaux. De l'imparable single qu'est « Sapari » au final superbe et infiniment touchant de « In Thy Never Ending Way (Epilogue) », de la grandiose B.O. qu'est « The Warrior » à la merveille de justesse et d'équilibre délicat qu'est « New Jerusalem », Orphaned Land fait palpiter quasiment sans interruption notre fragile petit cœur de métalleux, rééditant morceau après morceau l'exploit qui consiste à procurer cette sensation après laquelle nous courrons tous et toutes: cette impression d'être soulevé, transporté, de voler loin au-dessus du marasme quotidien, de tutoyer les sommets du sublime musical, d'avoir les batteries et le cœur gonflés à craquer d'émotions fortes ainsi que l'épiderme secoué de régulières vagues de frissons de plaisir.
« The Never Ending Way of ORwarriOR » est aussi proche de la perfection qu'il est possible de l'être pour un album de metal. Je ne mettrai cependant pas la note maximale à cet album parce que je pense que sur un format un petit peu plus court (
bien qu'il n'y ait ici rien à jeter) et avec une proportion violence/douceur un peu plus favorable au premier élément (
bien que le groupe sache magnifier l'expression de l'un comme de l'autre), il aurait été possible de faire encore un peu plus proche du divin. Il n'empêche que voilà sans conteste mon album de l'année, un poil devant
« All Stars » de
Ufych. Si vous avez quelques réticences quant à tel ou tel aspect de la musique du groupe, pour une fois faites-moi confiance, forcez votre nature et jetez vous les yeux fermés dans cet océan de plénitude musicale aux chaudes couleurs du moyen orient. Vous en reviendrez convertis (
peut-être même circoncis, qui sait? :)).
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