Dans les bilans de fin d'année des mags et webzines metal, il n'est pas rare de trouver parmi les catégories bouffonnisantes habituelles (
Playmate de l'année, Meilleur album de post cyber-émo-death, Meilleure averse en festival …) celle de la pochette d'album la plus beuââârk. C'est un fait qui n'a manifestement pas échappé à Walrus Resist, le groupe semblant bien décidé à remporter une récompense dans cette catégorie. En effet, à moins d'avoir perdu un pari ou d'apprécier un peu trop l'alcool de cuir d'aurochs, il faut vraiment avoir ce genre de prétention pour coller en étendard visuel de sa musique l'attaque d'une coque de noix par un titan marin à tête de morse et à la musculature de l'incroyable Hulk, le tout dans des tons orangeâtres et dans un style cartoonesque …
« Staring From The Abyss » est donc le 1er album de Walrus Resist, groupe français qui officie dans un style particulièrement usité en nos vertes contrées, j'ai nommé le Metal Moderne
Meshugojirien. C'est surtout des Landes que les Montpelliérains tirent leur inspiration, ceci étant particulièrement perceptible dans cette aptitude à développer de longs passages tripants où la puissance imposante de riffs syncopés et d'une rythmique pachydermique dispute l'anéantissement de notre système audio-nerveux à une approche plus lancinante, plus répétitive, plus hypnotisante, à la limite de l'expérience narco-sensorielle.
Ces trips électriques mais planants, Walrus Resist ne les dispense pas dans le cadre de prêches écolo-mystiques du genre de ceux auxquels les frères Duplantier nous ont habitué, mais dans un univers où les baleines volantes de ces derniers se sentiraient tout de même à leur aise. En effet, c'est en mer que nous convient les grands prêtres du Dieu Morse, et si visuellement ceux-ci peinent quelque peu à trouver le ton juste pour évoquer le silence glaçant des noires abysses et le déchaînement des eaux en furie, musicalement c'est une toute autre histoire: nos Montpelliérains réussissent pleinement leur pari! Qu'ils évoquent le déferlement ininterrompu de vagues cyclopéennes via des saccades à la résonance sismique, qu'ils proposent des havres de paix semblables à des plongées dans le calme d'eaux immobiles mais un rien inquiétantes, qu'ils laissent les guitares s'adonner à des ricochets rythmiques ou que les leads s'expriment en mode cétacé (
ie. en égrenant en arrière plan et au compte-gouttes des notes légèrement étouffées, pour un rendu rappelant le chant de baleines neurasthéniques perçu à quelques kilomètres de distance), le groupe réussit avec une affolante facilité à planter le décor et à nous immerger dans son univers aqua-métallique…
Bien que Walrus Resist partage beaucoup avec
Gojira, cette touche marine, mais également ce côté sombre, voire dépressif par moments, ces longues plages toutes en lenteur et dénuement, ou encore ce chant clair occasionnel lui permettent de développer une véritable identité et le placent dans une sous-catégorie à part, qu'on étiquettera « dark post modern death ambiant » pour mettre à mal la fonctionnalité de recherche avancée de chroniques par style développée par l'ami Dead. Et il faudra que vous soyez câblés d'une façon bien particulière pour apprécier pleinement le résultat (
l'album, pas la fonctionnalité de recherche!). Déjà il vous faudra accepter que les morceaux s'étendent de tout leur long (
au minimum sur 5 minutes, et plutôt sur 6-7 minutes en moyenne). Il ne faudra pas être un fan absolu de démonstration guitaristique tonitruante. Il faudra pouvoir digérer ces aboiements à mi chemin entre le growl et l'éructation coreuse, typiques du genre. Et il faudra enfin accepter certains ralentissements à la limite du doom. Certes le groupe joue intelligemment sur les contrastes, et sait effectuer de bonnes relances via des passages accrocheurs histoire de ne pas laisser l'auditeur sombrer, mais les plages les plus planantes, si elles sont parfois zen et joliment acoustiques, peuvent également s'avérer léthargiques et mollassonnes. C'est parfois un peu too much et il n'est pas impossible que les moins endurants décrochent sur « Dejected » (
qui commence et finit tout de même pas trop mal) ou le début de « Magic Machete ». Et que dire du dénuement total qui constitue une grosse partie de « End In Disfunction », final lourdement minimaliste et pas loin d'être soporifique … Le groupe aurait-il voulu évoquer musicalement la bulle autiste et la noirceur de la fin du « Grand Bleu »?
« Staring From The Abyss » est donc un album à part, une expérience qui a clairement le potentiel pour être perçue comme une véritable révélation à l'oreille de qui s'y plongera dans de bonnes dispositions, mais qui pourra également provoquer des sensations similaires au contact avec une méduse: mou, irritant, il vous mettra de plus légèrement mal à l'aise. A chacun de se faire son avis, l'humeur du moment pouvant jouer autant que les goûts musicaux habituels (
des atomes crochus avec le modern death étant toutefois fortement conseillés). Ne vous arrêtez pas trop à la note, celle-ci traduisant le fait que, d'une écoute à l'autre, ma perception de cet album fluctue, oscillant follement entre les positions « gravement tripant » et « bâillements en vue ». Allez, phoque you now you do what I tell ya: essayez de vous mettre au morse un peu pour voir …
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