Totalselfhatred - Apocalypse In Your Heart
Chronique
Totalselfhatred Apocalypse In Your Heart
L'hiver est passé, des températures anormalement élevées pour la saison viennent même donner un peu de couleurs et de gaîté à cette nouvelle année riche en césium et en hémoglobine révolutionnaire. Quelles occasions seraient plus propices, alors que le beau temps précoce annonce déjà un papy-boom bien moins conséquent d'ici septembre, pour se pencher sur le deuxième et tant attendu méfait de Totalselfhatred ? Groupe étrangement boycotté par votre cher webzine puisque pas même une news n'est venue relatée son actualité depuis sa formation en 2005 sous l'impulsion d'anciens membres de Pest et Horna. Officiant comme le laissait présager les divers parcours musicaux de ses protagonistes dans un black metal sombre et soigné, le sextuor affiche comme nombre de ses compatriotes finlandais – pays du funeral doom – une forte tendance à la mélancolie et à la tristesse. Cependant, à l'inverse de ce à quoi la scène dépressive nous avait habitué, ici il n'est jamais question d'incitation au suicide ou d'un quelconque auto-apitoiement sur son sort. Ainsi la formation transmet un message poussant davantage l'auditeur à se chercher, se comprendre, à accepter son mal-être afin de n'en sortir que plus fort et plus vivant ; une idéologie qu'il lui vaut au moins l'honneur de ne pas s'adapter à un discours rabâcher aussi bien par le meilleur que par le pire de cette frange du black metal.
Largement encensé lors de la sortie de son premier essai éponyme, Totalselfhatred a marqué de nombreux esprits grâce à son aptitude à développer des atmosphères profondes et introspectives qui servent à merveille sa volonté d'acceptation de soi évoquée plus haut. Ces moments d'accalmie étant d'autant plus marquant que le groupe sait également y faire quand il s'agit d'accélérer la cadence et d'assener un black metal plus violent et massif. Il faut d'ailleurs préciser qu'en la matière, avec la nature de son line-up, il aurait été difficile d'en être autrement puisque qu'il ne compte pas moins de trois vocalistes / guitaristes qui occupent logiquement une très large place dans le mix final et provoquent par instant cette impression d'une densité particulière. Passé sous la houlette du label français Osmose Productions, il aura fallu attendre trois ans pour savoir si les Finlandais allaient enfin confirmer ou pas les espoirs que beaucoup avaient placé en eux.
Et bien pour être franc, mon avis est resté très mitigé durant un certain nombre d'écoutes tant ce Apocalypse In Your Heart tranche en bien des points avec son prédécesseur et peut sembler relativement imperméable aux premières approches. L'album débute en trombe sur "Apocalypse" avec les vociférations aliénées et douloureuses de A. et C., le tout dans un chaos plus que surprenant et pouvant demander un réel effort de l'auditeur avant d'être assimilé. Toutefois, plus le titre avance et plus on retrouve la patte du groupe qu'on connaissait. Force est de dire qu'il reste toujours maître dans l'art de provoquer un large panel d'émotions en une poignée de minutes, mais la recette est bien différente. Si cet aspect cataclysmique si indigeste au début, renforcé par une production étouffée et organique, m'a longtemps dérangé, il devient naturel au fil des écoutes et renforce même au final le message porté par l'album. Ainsi, comment un titre comme "At War With Myself" aurait pu sonner autrement qu'avec ce sentiment de tumulte assourdi évoquant à merveille l'idée d'une lutte, d'une apocalypse intérieure. Après deux premiers morceaux assez bruts de décoffrage, la tension descend d'un cran avec un "Teardrop Into Eternity" bien plus mélancolique, marquant de par son mur de guitare imposant dont s'échappent quelques mélodies et nappes de claviers entêtantes. Les alternances entre parties violentes et plans aux ambiances animées d'une beauté souvent déprimante donnent indéniablement à l'album un de ses plus grands charmes, de plus chaque titre possède son élément particulier, sa mélodie mémorable qui lui permettra de se détacher des autres, à l'image du ô combien torturé "Ascension", prenant la forme d'une interminable descente introspective et aliénante, ou du doublet "Anything" / "Dripping Melancholy" particulièrement marquant, enfonçant l'auditeur dans une atmosphère incroyablement sombre et nostalgique et le coupant réellement de tout ce qui l'entoure. Enfin, point d'orgue de l'album, "Cold Room Starstained" vient clore ce nouveau chapitre de l'histoire de Totalselfhatred de la plus belle manière qu'il soit, dans un long défilé d'émotions où des parties presque minimalistes côtoient certains riffs et blast-beats bien plus virulents et rageurs.
Impressionnant de maîtrise et finalement parfaitement cohérent dans sa démarche, le groupe signe une fois de plus un album à la qualité indéniable, toutefois, malgré la puissance émotionnelle de certains passages, Apocalypse In Your Heart ne touche pas avec autant d'intensité que son aîné. Peu de défauts me viennent à l'esprit hormis un temps d'adaptation qui peut être assez conséquent et une ouverture déstabilisante à mon sens perfectible, mais la magie n'opère pas aussi bien que par le passé. Force est de constater que le méfait provoque réellement quelque chose puisque, comme j'ai tenté de le faire comprendre, mon avis à son égard a changé du tout au tout au fur et à mesure des écoutes. Ainsi mon premier reproche concernant la production s'est transformé en une sincère salutation du travail réalisé par l'ingénieur, dotant la batterie d'un son tantôt chaud et naturel, tantôt cinglant et agressif seyant parfaitement aux différentes facettes de l'œuvre. Je me dois également de dire un mot sur le travail tout à fait remarquable réalisé sur les guitares, amenant bien des fois l'image d'une gigantesque vague de riffs qui s'abat sur nous de manière violente tout en gardant une certaine finesse, ainsi que les prestations des vocalistes absolument époustouflantes, frôlant à mainte reprises le déchirement des cordes vocales et hurlant leurs souffrances avec une véracité impressionnante. Parfois proche d'un Agalloch dans son sens de la mélancolie, belle et entêtante, ou d'un Xasthur dans son aspect chaotique voir destructeur, ainsi que son aptitude à transporter l'auditeur dans un univers sombre et parfois profondément dérangeant, Totalseflhatred – bien qu'inéluctablement assimilable à la scène dépressive – reste un cas relativement à part dans ce paysage et mérite au moins qu'on jette une oreille sur son travail, avec la possibilité de rentrer ou non dans son monde enivrant bien que peut-être difficile d'accès.
| Squirk 24 Avril 2011 - 2810 lectures |
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