Avant Kylesa, il y a eu Damad. Formé au début des années 90 par Victoria Scalisi (qui officiera par la suite dans Karst et s’occupe ici du chant et de l’artwork) et Phillip Cope (inutile de faire les présentations !), ce dernier a été l’une des plus prolifiques formations de cette partie de la Géorgie à l’époque, comptant pas moins de deux albums, un split avec les excellents noisecoreux de Meatjack et de nombreuses apparitions sur des compilations. Le duo sera vite rejoint par le batteur Scott Cooper, guitariste Mark Marcus et bassiste Brian Duke, qu’on connait pour sa participation à l’album-éponyme de Kylesa. Un groupe que les amateurs d’œuvres comme
Static Tensions se doivent d’écouter donc, pour la culture qui fait bien en soirée entre Savannah addicts (« Attends, tu connais pas Damad ? Da-mad ? Pffff ») mais surtout pour la qualité de ses créations et son premier jet en particulier,
Rise And Fall.
Si l’on devait rapprocher Damad de son petit frère, le regard se porterait sur la période où Kylesa alliait fougue crust et relent sludge avec le moins de compromis, celle de
Kylesa et
To Walk A Middle Course.
Rise And Fall possède la même noirceur pas propre sur elle dans une version (beaucoup) plus raw rappelant le Neurosis hardcore aimant te ronger de l’intérieur méthode
The Word As Law. La musique pratiquée ici s’assimile à un crust rigide - voire martial par endroit - et déprimé bien que toujours guerrier, comme si des punks se retrouvaient alités de force suite à une contraction de la malaria avec ce que cela implique de fatigue, nausée et convulsion ! La voix de Victoria propage une grande part du virus : appuyée des backing vocals d’un Phillip étonnamment rageur pour qui est habitué à l’entendre mimer le paysan ricain, la demoiselle laisse rarement deviner sa féminité (quelques incursions en chant clair sur « Second Hand » ou « Toe Tag ») préférant beugler les commissures labiales vers le bas tel un tigre sous tranxène. Des hurlements uniques en leur genre et étrangement shamaniques (« Wake », « Dementia »), vecteurs à eux seuls d’une fièvre arrivant à donner de la personnalité au crust du quintet.
Typé nineties dans sa production brute, suffocante mais limpide signée Billy Anderson (Neurosis, Acid King, Sleep ou Buzzov-en) ainsi que ses riffs directs et inventifs à la fois,
Rise And Fall arrive à rester sauvage tout en maintenant une ambiance hallucinée, quasi-prophétique, durant ses trente-trois minutes. Des samples plus jouissifs et pessimistes les uns que les autres (un exemple : « They say that real pain, real suffering, is caused from loss : loss of family, loss of love, loss of the things that matter most… I like it. » Wouhou.) s’ajoutent aux vindictes de Victoria, batterie fébrilement tribale de « Out From Within » ou guitares patinant dans la semoule de « II Slow Heal » afin de renforcer cette impression d'hargneux en pleine agonie.
Réussir à détourner l’énergie d’un style pour un résultat aussi terminal est bluffant et on comprend pourquoi nombre de convertis considèrent
Rise And Fall comme un classique à posséder. Pour ma part, sa tendance à utiliser une technique de la terre brûlée parfois un peu trop appliquée (un défaut qu’on retrouvera malheureusement de façon plus handicapante sur son deuxième essai longue-durée,
Burning Cold) fait que je ne les rejoins pas totalement mais ils sont loin d’avoir tort ! Cette capacité à dépeindre la fin du monde d’une manière viscérale et contagieuse à l’aide de la violence sans fioriture du crust donne une malfaisance inédite au disque auprès de laquelle j’aime retourner fréquemment. Évidemment, un autre intérêt est d’y retrouver un Kylesa en gestation, le riffing de Phillip Cope y étant déjà reconnaissable, mais il serait faux de l’imaginer comme un brouillon peu intéressant ! Fortement recommandé !
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