Wodensthrone - Curse
Chronique
Wodensthrone Curse
Il y a un réel talent émergent à chercher dans les groupes membres de l'autoproclamée « New Wave of British Black Metal », tant on sent chez eux l'inventivité et la créativité, que ce soit chez les FEN, WINTERFYLLETH ou encore WODENSTHRONE. Si je ne suis pas un grand adepte du premier, les deux derniers combos parviennent à éveiller en moi un vrai intérêt, avec leurs compositions païennes célébrant l'héritage britannique et jouissant d'une atmosphère organique et forestière que j'aime trouver chez les groupes de Black Metal actuels. A l'image des disques de WINTERFYLLETH qui sont de franches réussites, notamment le très bon The Mercian Sphere sur lesquelles mes esgourdes s'étaient posées avec grand intérêt grâce à l'excellent collègue Niktareum que je remercie encore. Ces riffs contemplatifs, poignants et chargés de mélodies ravageuses constituaient une belle offrande pour ce groupe de Manchester.
WODENSTHRONE de son côté avait également su me séduire avec son majestueux Loss de 2009. Un bel album doublé d'un magnifique objet pour ceux qui avaient eu la chance de prendre le vinyl sorti chez Thorn Laceration Records avec les somptueuses illustrations des excellents Kogaïon Art dont la réputation n'est plus à faire. Des perles comme « Those That Crush The Roots Of Blood » ou « Black Moss », dans lesquelles on reconnaissait des inspirations des sérénissimes HATE FOREST et DRUDKH marquaient la personnalité des Anglais, auxquels on pouvait tout de même reprocher de s'égarer parfois dans quelques longueurs. Malgré sa grande maîtrise technique et la richesse de ses compositions, la voix animant les assauts des Britanniques souffrait de quelques carences regrettables et le son n'était pas toujours à la hauteur du Black Metal classieux que voulaient délivrer nos résident du Sunderland. C'est avec l'espoir de voir ces quelques défauts mineurs gommés que j'appréhende aujourd'hui ce Curse prévu pour le 23 avril 2012 chez Candlelight, qui se veut le catalyseur de ces talents d'Outre-Manche puisque l'emblématique label avait également signé WINTERFYLLETH.
De nets progrès se font ressentir sur ce nouvel hommage aux ancêtres délivré par WODENSTHRONE. Déjà, le son est beaucoup plus mordant, percutant, incisif. Place à des guitares pêchues, au grain renforcé et doté d'une profondeur bien supérieure à ce qu'on avait pu entendre auparavant. Ce punch et cette énergie nouvelle ramonent les cages à miel dès le premier titre « Jormugandr », efficace et burné au possible. Des 6-cordes qui s'accoudent sur une batterie beaucoup plus puissante et mieux produite, plus carrée aussi. On sent, de manière générale, qu'un gros travail a été effectué de la part des Anglais pour sortir ce Curse, gardant par la même toute la majesté qu'on avait pu entrevoir sur Loss, à l'image du magnifique « First Light » qui rappellera le panache de combos comme ENSLAVED dans ce que ce morceau a d'exaltant, de grandiose même! Les Britanniques maîtrisent à la perfection cette atmosphère poignante et mélancolique qu'ils savent injecter à ces morceaux épiques (avec notamment « The Great Darkness », un vrai chef-d'oeuvre).
Exit la voix moyenne de Brunwulf, place à une alternance qui a beaucoup plus de puissance et de rage à faire valoir, à l'image du titre « The Storm » qui montre toute la palette des deux chanteurs, se targuant de hurlements pleins de ferveur. Rædwalh et Wildeþrýð assurent totalement dans ce registre, faisant largement oublier le précédent vocaliste du groupe dont la voix était pour moi trop criarde et se mariait assez mal avec cette tambouille atmosphérique servie par les anglais. Le contraste est ici saisissant : plus de haine, beaucoup plus de puissance. Ce timbre Black Metal superposé à un growl ponctuel ou même parfois à des chœurs ritualistes « païens » habite réellement ces envolées atmosphériques puissantes et pèse avec talent sur elles. De plus, le clavier est plus savamment distillé qu'auparavant : Árfæst parvient à devenir un atout dans les parties les plus évanescentes tout en sachant s'effacer dans les moments où il n'est pas forcément le bienvenu, notamment dans les parties plus rapides. On louera son apport dans un morceau comme « First Light » tandis qu'on appréciera son effacement dans un brûlot comme « The Storm ». Mieux géré, le clavier est donc moins présent que dans le disque précédent où il avait tendance à s'incruster même sur les parties plus rapides et haineuses, ce qui pouvait créer une surenchère regrettable.
Alors que je parlais d'HATE FOREST ou de DRUDKH pour désigner les principales influences des Anglais, Curse contribuera à marquer leur personnalité. L'album de la maturité ? À n'en pas douter, à l'image d'un morceau comme « The Name Of The Wind », dans lequel on reconnaîtra certes du DRUDKH pour l'ambiance mélancolique et nostalgique qu'il diffuse, mais aussi du WODENSTHRONE, qui parvient tout de même à dépasser ses influences premières pour livrer un mélange intelligent, plein de force et de personnalité. Si on reconnaîtra une certaine atmosphère tribale proche de BLOOD OF KINGU dans « Battle Lines », la variété de tempo que se permettent nos Britanniques parvient à apporter une grande variété dans un morceau dans lequel on ne s'ennuie jamais. En outre, l'enchaînement des morceaux permet souvent de relancer la machine. D'un morceau assez atmosphérique comme « Wyrgthu », on passe à une grosse claque comme « The Storm » : ainsi, l'auditeur ne se repose que rarement sur ses lauriers. Les Anglais parviennent de même à mieux gérer leur temps, en réduisant drastiquement les passages acoustiques peut-être trop envahissants dans leur précédent disque, même si il est vrai que Curse souffre à certains moments de quelques petites longueurs durant la grosse heure durant laquelle il diffuse son essence, notamment sur les passages plus lents où nos Anglais ont tendance à se répéter.
Cet opus est donc une nouvelle preuve que la jeune tendance NWOBBM mérite qu'on s'attarde sur elle et surtout que le Pagan Metal de haut niveau aura encore son mot à dire en 2012. On avait eu YGG l'année dernière et je gage que cette belle confirmation de la part des Anglais saura autant attirer les regards avides des amateurs du genre qui ne manqueront pas de se laisser séduire par leurs magnifiques manifestes à la nature et à l'héritage britannique, ce dernier apport étant suffisamment rare pour être souligné et apprécié à sa juste valeur. Ceux qui pleurent encore le demi-échec de DRUDKH pourront largement se consoler avec ce disque sincère, frais et pugnace.
| Voay 20 Avril 2012 - 2855 lectures |
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