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Sol Invictus - Sol Veritas Lux

Chronique

Sol Invictus Sol Veritas Lux (Compil.)

Le culte du Soleil Invaincu a quelque-chose de fascinant et d'attirant. A la fois viril, guerrier et sensuel, à l'image de son inspirateur Apollon, ce rituel voué à une divinité solaire qu'on retrouve représentée dans bien des lieux de l'Antiquité animait surtout sous l'empereur Aurélien des légions romaines portés par un paganisme essentiel à leurs marches. Guerrière et sensuelle, c'est également comme cela que l'on pourrait désigner la musique de SOL INVICTUS, le projet fondé par Tony Wakeford en 1987. Un nom que les amateurs de Neofolk connaissent bien puisque notre homme a également fait brièvement parti de DEATH IN JUNE, autre grand poncif de cette scène, en étant même à l'origine aux côtés de Douglas Pearce en 1981. Suite à la séparation avec ce dernier, notre homme fonde ce groupe au nom évocateur dont il constitue et constituera toujours l'épine dorsale puisqu'il est à l'origine de la majeure partie des compositions et du chant, qu'il partagera avec Ian Read dans un premier temps. C'est via cette compilation sortie en 1990 via le label S.V.L. que SOL INVICTUS fera connaître ses premiers enregistrements, Against The Modern World (1988) et In The Jaws of the Serpent (1989) compilés sur un ensemble nommé Sol Veritas Lux considéré comme le premier véritable full-length des Anglais constitué de 19 morceaux (dont plusieurs en deux versions) pour une heure de musique rituelle excellente.

Replacé dans le contexte de son époque, ce parfait mélange entre un Folk minimaliste aux accords de guitare finalement assez simplistes s'accompagnant d'instruments à vent tels que le tuba (« TWA Corbies ») et une Coldwave épurée, dont l'héritage se retrouve dans une batterie ritualiste et monolithique, avec cette utilisation jouissive du tom basse pour marquer un rythme très souvent assez lent et contemplatif révélait une noirceur extrême qui place une atmosphère désespérée au plus haut degré possible dans un ensemble homogène et inventait réellement un genre nouveau appelé aujourd'hui couramment Neofolk. Tony Wakeford, David Tibet (CURRENT 93) Douglas Pearce : ces hommes ont réellement porté ce genre sur les boulevards de la scène alternative et underground de la fin des années 80.

Dépouillée, épurée, cette mixture est entièrement consacrée à l'émotion, un sentiment qui peut devenir totalement extrême lorsqu'il règne en tyran sur un disque, comme c'est le cas ici. À cette ambiance fantomatique se rajoutent des paroles touchantes, militantes, équivoques et énigmatiques. A l'image du titre presque érotique « Abbatoirs of Love » issu de In The Jaws of the Serpent (soit sur la « deuxième partie » de la compilation, un titre que l'on retrouvera sur Lex Tallionis en 1990) et sa déclamation lancinante de vers désespérés sur fond de valse martiale et évanescente, Wakeford explore toutes les armes de la noirceur et de la tristesse, appuyé contre un chêne fait d'un bois noble et taillé dans une grandeur et une grâce rarement égalées. Ses vers « tactiles » portées par un bel hommage à la nature, sont extrêmement touchants et puissants, qu'ils soient brûlants de désir :
« Thinking some sweetest flower to find
I pricked my finger to the bone
Leaving the sweetest flower behind
Oh, meeting is a pleasure
 »
... ou totalement désabusés.
« In the abattoirs of love
Love's a game for fools, for fools
Love's a game for fools...
 »

Pour autant, notre homme n'oublie pas d'être révolté dans ses écrits, mariant des paroles vindicatives à un ensemble souvent plus martial au niveau du rythme. Les percussions obsédantes de « Angels Fall », les beats, les claviers glacials pour le coup totalement Coldwave de « Long Live Death » et de « Summer Ends » ou encore le refrain fédérateur de « Against The Modern World » composent des hymnes hostiles à un capitalisme dépeint comme gargantuesque et monstrueux (« Gold Is King »), auquel notre homme oppose opportunément la Nature, qu'il érige en reine de ce premier opus véritablement magnifique. Tantôt funéraire (« Raven Chorus »), tantôt religieux (« Untitled ») , tantôt médiéval (« TWA Corbies »), ces pièces héroïques de SOL INVICTUS sont portés par une production certes un peu amateur mais terriblement séduisante là encore.

Même si Wakeford « s'excuse » dans le livret de la compilation à propos de la pauvreté du son de ses premières réalisations, la grandeur de sa musique ne souffre aucunement de cette prétendue faiblesse, notamment au niveau de la guitare qui voient sa noble amertume renforcée par l'âpreté de leur texture. La batterie, martiale et effacée, ne perd rien de sa superbe lorsqu'elle bat un rythme monolithique et uniforme, si ce n'est dans la partie In The Jaws of the Serpent où elle est parfois un peu hasardeuse (notamment sur « Angels Fall » où elle moins convaincante). D'humbles claviers animent le tout sans créer de surenchère : si le son fait ressortir leur côté poussiéreux et kitsch, notamment les imitation de violons, parfois un peu trop vieillis, leur beauté reste là encore intacte. Ajoutons à cela les éléments Folk, comme les instruments à vent (beaucoup moins présents que dans les albums suivants néanmoins), prenant une vraie hauteur, et la mélodie inhérente aux morceaux ne se voit que renforcée. Reste la basse, trop souvent écrasée et saturée, mais son rôle dans la rythmique générale est déterminant... Vous l'aurez compris, malgré les avertissement du bedonnant britannique, SOL INVICTUS reste propre et très juste dans l'agencement des instruments, touchant l'amateur de sobriété que je suis là où ça fait mal.

Justes, les vocalistes ne le sont pas toujours, pourtant. Parfois même quelques canards s'échappent de la ferme tenue d'une main de maître par Ian Read et Tony Wakeford, mais c'est aussi en grande partie ce qui fait le charme de leurs belles diatribes contre le monde moderne. Livrés au naturel de ce son âpre et ensorcelant, les vocalistes sont donc d'autant plus touchants. Leur alternance se fait très naturellement, entre la force ritualiste et religieuse des déclamations de Read et la voix sans âge de Wakeford qui se perd parfois dans des poussées qui renforcent sa rancœur extrême trahissant son état de pensée à ce moment de sa vie (« Angels Fall », « Against The Modern World » ou encore « Abattoirs Of Love » en étant les illustrations parfaites) et montrent toute sa sincérité. Très peu de voix féminines font leur apparition sur cette première œuvre et c'est bien dommage tant on constatera par la suite l'usage brillant que SOL INVICTUS pourra faire de ces interventions.

In fine, Sol Veritas Lux présente donc autant d'intérêt historique que musical et m'apparaît comme un indispensable pour tout amateur d'atmosphères païennes, tant cette dévotion classieuse ne cesse ici d'éclabousser les auditeurs, enclins à mettre un genou à terre à l'écoute de ses hymnes, plus généralement pour tout amateur de ce genre si fascinant qu'est le Neofolk européen à la DEATH IN JUNE. Alors certes, bande de gougnafiers, ce n'est pas un disque « à tendance brutale » (quoique l'intensité des émotions chez SOL INVICTUS a tout de l'extrême) que votre serviteur vous expose là comme un plat de cuisine raffinée 5 étoiles (ou 4 étoiles et demi), mais comme on aime coller à l'actualité chez nous, Thrashocore président pourra être, dans la mesure du possible, « le Webzine de l'ouverture »... ceux à qui ça ne va pas pourront évidemment « descendre me le dire en face », mais je serai bien trop occupé à m’empiffrer de chouquettes pour daigner vous répondre. Enfin bref, SOL INVICTUS, c'est la musique des seigneurs.

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Sol Invictus
notes
Chroniqueur : 4.5/5
Lecteurs : (2)  4.5/5
Webzines : (2)  4/5

plus d'infos sur
Sol Invictus
Sol Invictus
Neofolk - 2007 - Royaume-Uni
  

tracklist
Against the Modern World
01.   Angels Fall
02.   Raven Chorus
03.   Against The Modern World
04.   Long Live Death
05.   A Ship is Burning
06.   Untitled
07.   Summer Ends
08.   Wolf Age, Axe Age

In the Jaws of the Serpent
09.   Angels Fall (2)
10.   Rise And Fall
11.   The World Turns
12.   The Runes
13.   Gold is King
14.   TWA Corbies
15.   Somewhere in Europe
16.   Media
17.   Abattoirs of Love
18.   Raven Chorus (2)
19.   The Joy of the World

Durée : 63:22

line up
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1993 - Tursa
  

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