Je ne suis pas fan de grind à la base. Du moins, pas de grind pur et dur. Parce que des groupes au grind fortement métallisé comme Afgrund ou les plus connus Rotten Sound qui ont pris le relais de Nasum, ça ça me va! Les Scandinaves font ainsi partie de mes groupes de choix dès qu'on cause grind moderne aux teintes death, au même titre que Sayyadina ou Jigsore Terror. Autant dire qu'un large sourire a accueilli l'annonce d'un nouvel album du combo finno-suédois. Toujours fidèle au label Willowtip Records qui n'est pas le dernier à prendre sous son aile des formations de la sorte (Defeatist, Magrudergrind, Kill The Client, Maruta...) à côté de groupes de death plus techniques, Afgrund sort donc fin juillet son troisième album,
The Age Of Dumb, sous la forme d'un quatuor cette fois. Panu Posti reste à son poste de mitrailleur en chef, Enrico Marchiori conserve la basse mais Andreas Baier s'est retiré du chant et de la guitare. Pour le remplacer, deux musiciens viennent renforcer le line-up: Olli Nokkala (Feastem) à la guitare et Armin Schweiger au micro.
The Age Of Dumb est aussi le premier opus intégralement en anglais puisque le groupe nous avait habitué à beugler dans sa langue natale. Un peu dommage pour le coup mais cela ne change en rien la qualité de la musique.
Car une nouvelle fois, Afgrund fait mal. Sans dévier de sa trajectoire initiale, le groupe a radicalisé son propos pourtant déjà peu enclin aux concessions. En résulte des titres encore plus expéditifs (seul "He Who Plants Sorrow" dépasse deux minutes) et brutaux. Dix-huit morceaux pour vingt-six minutes de carnage auditif, voilà à quoi nous convient ces poètes des temps modernes, décidément bien remontés contre le système. L'excellente pochette, montrant un individu la tête dans le cul et soulevant un haltère orné d'une croix et du symbole dollar, résume bien la chose. Dans les faits, cela se traduit par un festival jouissif de blast-beats portés par une production moderne et puissante qui, si elle ne satisfera pas les purs grindeux car trop métallique et propre, nous fait bien comprendre que le quatuor n'est pas là pour rigoler. Le son épais des guitares a d'ailleurs un grain très death metal suédois tout en gardant une certaine abrasivité indispensable à tout album de grind. Là-dessus, Agrund se démarque par une grande qualité de riff. Rien de révolutionnaire ou d'ultra technique mais ceux-ci sont suffisamment élaborés, avec ce qu'il faut de "mélodie", pour qu'on retienne quelque chose de l'écoute et qu'on y prenne vite goût (l'excellente "Carniwars" comme meilleur exemple). Le tout étant bien sûr auréolé d'atours sombres, influences death metal oblige.
Et les 10% du temps où la formation ne blaste pas? Afgrund se rappelle à ses racines punk/crust en envoyant les rythmiques entraînantes sur des riffs basiques. Ou alors il ralentit le tempo et balance du bon gros mid-tempo pour travailler les cervicales. Celui du titre final, "The Carrier", aussi simpliste que transcendant, donne d'ailleurs envie de tout péter. Dans tous les cas, difficile de faire plus efficace! Le groupe essaye même d'instaurer, avec réussite, une ambiance menaçante par du down-tempo au début de "He Who Plants Sorrow", morceau le plus long de l'œuvre qui attend presque une minute avant de blaster, un exploit pour un batteur à la gâchette si facile! Quant au chant et au nouveau hurleur Armin Schweiger, on retrouve les cris des précédentes œuvres mais plus ou moins arrachés et avec davantage de growls. Personnellement, ça me convient tout à fait, bien que cela enlève une certaine fureur au combo. Et la basse? Elle vrombit comme il faut, notamment sur "Le Grand Illusion", très efficace en dépit de la faute de français qui prouve une nouvelle fois que les groupes ne devraient pas utiliser une langue qu'ils ne parlent pas.
Ce qu'il y a de bien aussi, c'est qu'Afgrund sait s'arrêter avant d'ennuyer. Les vingt-six minutes se révèlent ainsi amplement suffisantes. Car malgré des riffs plus travaillés que dans le grind de base, la musique des suédo-finlandais tourne vite en rond. Une impression de répétition plus présente sur ce
The Age Of Dumb que sur le précédent album
Vid Helvetets Grindar pour lequel je garde une préférence. Comme quoi la radicalisation n'a pas que des avantages, ce nouvel album s'avérant moins varié et marquant que son prédécesseur. Mais ne vous y trompez pas. À dose homéopathique,
The Age Of Dumb fait un effet bœuf pour qui aime quand ça tartine du début à la fin, quitte à rendre le pavé plus indigeste.
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