Occultation - Silence in the Ancestral House
Chronique
Occultation Silence in the Ancestral House
Une belle pochette, ça peut vous faire faire n'importe quoi. Acheter un album qui, sans elle, n'aurait pas déplacé l’œil de son ennui à dépatouiller les bacs à disques ; retenter une énième fois l'écoute, des fois que ; l'analyser, en espérant entendre ce que l'on voit... Toutes ces choses que l'illustration d'Adam Burke pour Silence in the Ancestral House d'Occultation m'a poussé à commettre, en somme.
Sans elle, nul doute que je n'aurais pas autant tourné et retourné la question, celle qui s'impose à chaque fois qu'un groupe de doom mené par une femme se rencontre : Une fois enlevée la couche de clinquant apportée par les vocalises lascives, y a-t-il ce petit frisson que, après jugement, peu de formations du même genre ont réussi à apporter ? Le réponse concernant Occultation est étonnante car Silence in the Ancestral House, succédant à un Three & Seven qui n'avait qu'effleuré mes oreilles (pas assez longtemps pour en tirer quelques souvenirs), ne se rapproche en vérité en rien du « female fronted doom » copyrighté dont on a l'habitude.
En effet, sous ses apparats occultes et psychédéliques, ses leads semblant donner dans le heavy metal traînassant, la bande de New-York crée un style qui lui est propre, plus proche de The Devil's Blood et Negative Plane (dont Edward Miller fait d'ailleurs partie) que d'autres noms plus communs quand on cause œstrogènes et lenteur. La première impression peut être d'écouter une musique épique où les guitares, scintillantes, développent mélodie sur mélodie menées par une voix aérienne s'essayant à quelques refrains ici ou là (celui de « The Place Behind the Sky » étant certainement l'un des plus mémorables). En réalité, Occultation met ces quelques accroches au service d'une atmosphère macabre, mystérieuse en tous points, où les envolées constantes donnent paradoxalement la sensation de rester cloué au sol, pris dans une fumée mystique enrobant un ossuaire. Une ambiance qui évoque les films d'horreur italiens – à laquelle la réverbération outrancière des instruments n'est pas étrangère –, mais qui n'est qu'un début au voyage particulier que nous offrent les Ricains, ceux-ci usant de leurs lignes de notes graciles et capiteuses pour faire contempler un voile nocturne, où l'on se prend à rêver d'espace depuis le cimetière et idolâtrer la lune comme nouveau soleil.
Ceci mis de côté, Silence in the Ancestral House contient de nombreux titres pouvant prétendre au catchy. Sans jamais se départir de la délicatesse avec laquelle il compose ses entrelacs (on n'est pas dans le cirque de Ghost ici), le trio sait donner dans le riff assassin (les leads ravageuses de « Laughter in the Halls of Madness ») ou l'accélération galopante relançant l'intérêt au bon moment (« All Hallows Fire »). Aidée par une production atypique de Kurt Ballou, plus proche d'un disque de cold wave ou deathrock que metal, la troupe n'oublie jamais durant les deux premiers tiers de son deuxième album de sertir ses compositions de moments où la tête trouve à bouger et le corps à onduler.
Silence in the Ancestral House mérite donc bien sa magnifique pochette... à ceci près qu'à partir de « Intermission », il se fasse moins énigmatique et flamboyant. La recette dont usent ces quarante-neuf minutes stagne un peu trop pour donner à « Forever Hereafter » et le morceau-titre le vénéneux que les Ricains ont su parfaitement transmettre auparavant. Dommage, cela laissant sur le sentiment d'avoir écouté une œuvre étrange, personnelle, mais finalement un peu timide dans son alliage entre doom/rock enchanteur et exécution squelettique touchant, à sa manière, au black metal. Il n'en reste pas moins que les amateurs de doom évoquant les images surannées, au romantisme noir, du courant giallo doivent absolument écouter cet album. Ce qu'aurait pu (dû ?) donner The Wounded Kings dans sa période femen.
| lkea 5 Octobre 2014 - 2088 lectures |
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