Vorum - Current Mouth

Débarquant comme un cheveu sur la soupe, j’avoue avoir été particulièrement surpris lorsque j’ai appris l’existence de ce disque que je ne soupçonnais absolument pas. Mais après tout, cela fait déjà plus de deux ans qu’est sorti l’excellent Poisoned Void. Il n’y a donc rien de très étonnant à ce que Vorum se rappelle aujourd’hui à nos bons souvenirs grâce à la sortie de ce nouveau EP.
Intitulé Current Mouth, celui-ci est disponible depuis quelques jours via le label allemand Sepulchral Voice (Necros Christos, Charon, Venenum, Invidious...). On y retrouve cinq nouveaux morceaux pour un total de dix-huit minutes de Death Metal toujours aussi furieux et intense. Pour en finir avec ces présentations d’usage, que ceux qui n’ont pas de platine vinyle se réjouissent puisque Current Mouth n’est disponible qu’en CD (au moins pour le moment).

Mais une (bonne) surprise peut parfois en cacher une autre, qu’elle soit d’ailleurs bonne ou mauvaise. Aussi ai-je donc été étonné de constater le nouveau parti pris de Vorum en matière de production. Si celle de Poisonned Void m’avait particulièrement convaincu pour son côté abrasif et moderne à la fois, celle de Current Mouth surprend par l’aspect extrêmement cru et foutraque qui s’en dégage. Un choix qui va peut-être en déranger quelques-uns mais que je trouve pour ma part toujours aussi intéressant, notamment parce que Vorum montre une fois encore sa faculté à sortir de sa zone de confort pour se mettre (légèrement) en danger. Tout est ici poussé à son paroxysme (sans néanmoins que cela ait un impact sur la qualité de lecture et de compréhension de l’ensemble) pour un rendu extrêmement intense et bordélique. Et en effet, Current Mouth semble tout droit sorti de la fin des années 80. Ca grésille et ça sature bien comme il faut même si le son de chaque instrument semble finalement plutôt naturel mais aussi plus rachitique (contrairement à avant où la production offrait aux compositions de Vorum un aspect plus épais, plus dense). Ce choix bien particulier en matière de production rappelle celle des albums de Repugnant et Verminous, soit deux de mes groupes préférés en matière de Svensk Döds Metall. Donc oui, il s’agit bien d’une bonne surprise!

Pour ce qui est des cinq nouveaux titres proposés par Vorum, pas de grands bouleversements à l’horizon. Les Finlandais prennent naturellement la suite de Poisoned Void, offrant ainsi ce même Death Metal evil et malfaisant qui faisait déjà tout le charme de son prédécesseur. Une musique furieuse et épileptique servi dans l’urgence la plus totale. Pas de demi-mesure (cette entrée en matière sur "Angels Death" va d’ailleurs me marquer pendant encore un long moment!), tout juste quelques breaks et autres passages moins soutenus durant lesquels Vorum va alors baisser le niveau d’intensité au profit d’un soupçon de groove (comme par exemple ce passage bien rock’n’roll sur "Current Mouth" à partir de 1:38). Les riffs de Jonatan Johansson et Matti Jalava semblent ne jamais vouloir s’arrêter, sifflants et menaçants dans toutes les directions. Des trémolos redoutables et littéralement possédés qui viennent réduire à peu de chagrin la frontière parfois très mince qui existe entre Black et Death Metal et avec lesquels viennent fricoter quelques soli et leads bien chaotiques (les premières notes de "Angels Death", "Tri Ennial" à 1:19, "Current Mouth" à 1:09 et 3:05, "Ungry Wounds" à 0:40 et 2:17).
Derrière son kit, Mikko Josefsson semble ne pas vouloir se laisser marcher sur les pieds par ses deux collègues guitaristes et impose lui aussi une cadence de feu particulièrement soutenue. A eux trois, les garçons sont responsables d’un sinistre bordel restituant bien l’esprit du Death Metal à ses origines. C’est sale, blasphématoire, tendu, approximatif (du moins en apparence) et toujours ultra intense. Qui plus est, je retrouve dans le jeu de Mikko Josefsson quelques similitudes avec Verminous, à commencer par ces frappes au somment des cymbales qui sont d’ailleurs pour beaucoup à ce sentiment de chaos sonore indescriptible qui caractérise aujourd’hui Current Mouth. D’ailleurs même le chant de Jonatan Johansson semble encore un peu plus arraché qu’auparavant…

Ce nouvel EP de Vorum n’est donc pas de tout repos et surprend autant qu’il ravi. Le groupe finlandais n’a pas fondamentalement changé sa recette mais ces quelques choix décris un peu plus haut, notamment en termes de production, donnent une couleur bien spécifique à ce Current Mouth aussi jouissif qu’excessif. Là où Poisoned Void réussissait à sonner moderne tout en conservant une approche rétrograde, Current Mouth annihile toute trace de modernisme au profit de sonorités encore un peu plus old school et jusqu’au-boutiste. Un parti-pris auquel j’adhère mais qui me laisse curieux quant à la suite que va donner Vorum à ses prochaines réalisation, lui qui a toujours fait en sorte d’être là où on ne l’attendait pas vraiment.

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