Merveille de tristesse,
Angels Of Distress est placé dans la première rangée de l’étagère, celle de mes albums de chevet. Compagnon de périodes sombres et solitaires (je ne pense d’ailleurs pas être le seul), il restera l’un des plus gros bouleversements de ma modeste culture musicale. Le contexte est placé. Conspué par certains, Shape Of Despair chamboulera une scène élitiste et « underground » en proposant un funeral doom atmosphérique aux forts accents mélodiques et symphoniques « grand public », la production puissante et claire s’y associant. Le groupe aura enfanté bon nombre de formations doom dans sa lignée, mais aucun n’aura pu atteindre un tel aboutissement. En ce mois de juin 2015, voici enfin le grand retour des maîtres finlandais sous l’épaule de Season Of Mist, cinq ans après leur EP
Written In My Scars (édition vinyle limitée) et surtout onze ans après leur album mitigé
Illusion's Play. Shape Of Despair perd son emblématique frontman Pasi Koskinen, remplacé par Henri Koivula (Throes Of Dawn). Le reste du line-up reste quant à lui identique à celui de 2004.
Le terme « funeral » semble quelque peu inapproprié, la musique de Shape Of Despair plus proche du doom/death jongle dans des registres variés (rock et gothique) sans tomber dans le pathos ou la détresse profonde. Un metal mélancolique et nostalgique aux percées « lumineuses » en somme (très proche du groupe
Funeral). Selon les interviews donnés, Jarno ne demeure plus l’unique compositeur attitré. Ni pour les paroles, désormais écrites par Henri Koivula. Né de l’esprit de Tomi et Henri, « Descending Inner Night » par exemple, figure parmi les morceaux les plus touchants de ce
Monotony Fields. L’on découvre ainsi sur ce titre le chant clair cristallin du nouveau frontman, la grande nouveauté de ce Shape Of Despair 2015. Des lignes vocales qui ne virent jamais dans la surenchère, associée à celles de Natalie, l’effet n’en est que décuplé, vous transportant vers vos émotions refoulées. Côté grognements le poignant et imparable « Written In My Scars » repris de l’EP éponyme (arrangements et production tout autre) permet de faire la comparaison entre Pasi Koskinen (version 2010) et Henri. « The curse written in my scars » résonne avec la même prestance, Henri n’a franchement rien à envier à la puissance gutturale de son prédécesseur (confirmée en live). Certains regretteront peut-être un chant plus « commun », perdant l’aspect « bestial » de Pasi. Mais en ce sens « humanisé », il sera plus facile pour l’auditeur de se reconnaître dans les vers (compréhensibles) d’Henri.
Pour ce quatrième album et pour le plus grand plaisir de ses anciens adeptes (moi inclus), le sextuor d’Helsinki retourne vers une musique plus éthérée où les nappes de claviers dominent les guitares sous un son imposant (a contrario de
Illusion's Play). Constat délectable fait dès l’introduction de « Reaching The Innermost », les effluves du bijou
Angels Of Distress se font de nouveau sentir. Pour autant les bouleversantes balades intemporelles « Quiet These Paintings Are » ou « Live For My Death » n’auront pas d’égal ici. Le clavier céleste de Jarno côtoie le très bon (l’introduction de « The Blank Journey ») mais aussi le passable (« Withdrawn »). Les tares de l’apathique
Illusion's Play refont ainsi surface, des riffs et nappes à l’aura nettement moins imposante, sans le pouvoir émotif habituel… Compliqué pour tenir près de 10 minutes sur les très maigres « Monotony Fields », « Withdrawn » ou « The Blank Journey ». Soit plus d’une demi-heure… Sans compter les quelques longueurs disséminées sur les autres morceaux pourtant de qualité.
Le voyage vers les cieux de « The Distant Dream Of Life » (le format « court » limitant les baisses de régime) et le plombant « In Longing » souffriront ainsi de ce manque de constance dans les compositions. Ce titre expose au mieux les prouesses vocales de Natalie, toujours inspirée par le chant divinatoire sans parole de la grande Lisa Gerrard (Dead Can Dance) et fusionnant parfaitement avec l’instrumentation. Un des atouts majeurs de
Monotony Fields. Au-delà du clavier et des vocaux, la production permet de savourer la basse vrombissante de Sami et les frappes lancinantes de Samu. Un ensemble des plus attrayants donc mais une kératose pilaire trop succincte pour ces 1 heure et 16 minutes.
La chronique de
Monotony Fields aura été plutôt exténuante, à la fois bercé par des passages rappelant la grandeur d’un
Angels Of Distress (surclassant le médiocre
Illusion's Play) mais aussi pris dans une certaine torpeur. Tentant de forcer les longueurs, écoutes après écoutes, rien n’y fait, certains morceaux seront rapidement mis de côté quand d’autres perdront parfois de leur saveur mélancolique. Après autant d’années d’attente et de groupes clamant l’héritage de Shape Of Despair, nous étions en droit d’attendre une réponse des gourous. La signature chez Season Of Mist annonce très certainement une fréquence d’album plus régulière. En espérant une réponse digne du prestige des Finlandais, retour en 2001.
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