Mefitic - Woes Of Mortal Devotion
Chronique
Mefitic Woes Of Mortal Devotion
Moi, si j'étais un homme, je serais capitaine… Je t'offrirais de beaux bijoux, des fleurs pour ton appartement, des parfums à vous rendre fou. Et, juste à côté de Milan, dans une ville qu'on appelle Bergame, je te ferais construire une villa. Mais je suis femme et, quand on est femme, on n'achète pas ces choses-là.
Malgré le double sens plus ou moins caché entre les lignes de ces belles paroles signées Diane Tell, je ne suis pas certain que la jeune canadienne s’imaginait voir naître un jour des entrailles de Bergame une entité aussi repoussante que Mefitic. Si elle l’avait su, pas sûr qu’elle aurait choisi le nom de cette petite ville italienne située aux pieds des Alpes. Car dissimulé derrière cette image de pays romantique à la tchatche facile, l’Italie n’en possède pas moins son lot d’abominations toutes plus repoussantes les unes que les autres (Blasphemophagher, Demonomancy, Voids Of Vomit, Mortuary Drape...).
Si Woes Of Mortal Devotion sorti cette année sur Nuclear War Now! est le premier album de Mefitic à voir le jour, le groupe a pourtant déjà quelques années d’expérience derrière lui. Formé en 2004, les Italiens ont enchainés depuis 2006 les sorties à un rythme plutôt régulier. Démos, splits et EPs se sont ainsi succédés jusqu’à la sortie il y a quelques semaines de ce premier album illustré pour l’occasion par Manuel Tinnemans (Ad Nauseam, Deathspell Omega, Foscor, Necros Christos, Wrathprayer...).
Une très bonne surprise me concernant puisque pour être tout à fait honnête avec vous, je n’avais encore jamais entendu parler des Italiens jusqu’à il y a quelques semaines. Pourtant, on ne peut pas dire que Mefitic révolutionne quoi que ce soit avec sa musique. En effet, celle-ci s’inscrit logiquement dans ce qui se fait aujourd’hui en matière de Black/Death, entretenant ainsi des liens plus ou moins étroits avec des groupes comme Antediluvian, Portal, Incantation, Grave Miasma, Teitanblood et compagnie...
Un manque d’originalité flagrant mais absolument pas pénalisant pour Mefitic qui avec Woes Of Mortal Devotion prend naturellement le relai de ses compatriotes de Demonomancy après l’excellent « Throne Of Demonic Proselytism » paru en 2013. A cette occasion, Mefitic a néanmoins fait le choix d’une production plus neutre. Moins étouffante malgré une certaine densité, celle-ci rend l’écoute de ce premier album nettement plus facile et immédiat. Un choix que certains regretteront très probablement mais qui à mon sens n’impacte pas particulièrement le rendu ni la portée de chacune des huit compositions que compte Woes Of Mortal Devotion. Il faut dire que le chant extrêmement profond (parfois doublé, voir triplé) et légèrement en retrait de G. suffit presque à la mise en place d’une atmosphère sombre et cryptique.
Mais c’est sans compter sur le rôle de ces guitares abrasives et hypnotiques qui ne sont pas sans rappeler celles d’un Portal ou d’un Antediluvian (comme sur la conclusion de "Pain" pour ne vous citer qu’un seul exemple). On retrouve ainsi cette même approche à la fois aliénante et dissonante tel un bourdonnement assourdissant qui plane au-dessus de la tête de chaque auditeur. Une sombre menace sans forme, diffuse et pourtant bien réelle qui se manifeste à travers des riffs rugueux tantôt vifs tantôt beaucoup plus sournois. A la décharge de Mefitic, ces derniers se montrent tout de même moins alambiqués que ceux des deux groupes évoqués un peu plus haut. De fait, à l’image de cette production bien plus lisible, les riffs délivrés par AtroR et KrN se montrent d’une efficacité redoutable car également bien plus immédiats. Et si en la matière Mefitic n’a rien inventé, ses deux guitaristes ont le mérite de faire les choses dans les règles de l’art, tapant dans le mille à chaque occasion et évitant ainsi tout moment de flottement désagréable et souvent pénalisant.
Qui plus est, Woes Of Mortal Devotion jouie d’une excellente dynamique grâce à l’alternance de séquences particulièrement intenses et de passages beaucoup plus écrasants. Si l’atmosphère demeure sombre et blasphématoire en toute circonstance, ces variations viennent tout de même apporter un brin de relief non négligeable à ce premier album. Je n’irai pas jusqu’à dire que cela rend l’écoute de Woes Of Mortal Devotion plus facile mais dans la catégorie des groupes de Black/Death dissonants et chaotiques, les Italiens de Mefitic figurent très certainement parmi les plus accessibles.
Vous l’aurez compris à la lecture de ces quelques lignes, Woes Of Mortal Devotion ne réserve pas de surprise particulière. Tout ce qui y est proposé a déjà été entendu ou fait auparavant par d’autres groupes dont on a probablement déjà vanté les mérites sur Thrashocore. Pour autant, cela n’enlève en rien toutes les qualités dont fait preuve le groupe de Bergame qui avec ce premier album vient s’installer confortablement parmi les meilleurs représentant du genre. Car ne vous y trompez pas, derrière le caractère plus immédiat dont le groupe fait preuve, son mélange de Black/Death n’en reste pas moins redoutable à tous les niveaux grâce en premier lieu à d’excellents riffs bien noirs et faisandés ainsi qu’une alternance rythmique plus que bienvenue. Bref, si je n’ai pas réussi à vous convaincre lors des précédents paragraphes, ce n’est pas maintenant que je vais le faire. Donc je m’arrête là.
| AxGxB 13 Août 2015 - 1013 lectures |
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