Crematory - Denial
Chronique
Crematory Denial (Compil.)
Alors que Mitch tente désespérément de mettre la main sur un groupe aujourd’hui capable de faire revivre ce feu ardent qui brûlait alors en Suède à la fin des années 80/début des années 90, je reviens pour ma part sur l’un de ces groupes oubliés, ceux qui ont constitué la partie submergée de l’iceberg et dont peu se souviennent aujourd’hui.
Parmi tous ces groupes que nous n’avons pas encore abordés sur Thrashocore, Crematory est probablement l’un des plus connus parmi les moins connus et cela pour une raison très simple. En effet, alors que la majorité des groupes de cette époque décidaient d’en rester là faute de reconnaissance et/ou de motivation, lâchant même pour la plus part de ces jeunes musiciens l’univers du Death Metal, les petits gars de Crematory choisissaient de poursuivre leurs chemins au sein de formations ayant toutes réussies à faire parler d’elles à un moment ou à un autre. Si Stefan Harrvik est donc également connu pour sa (courte) participation au sein de Necrophobic, on retiendra surtout les collaborations d’Urban Skytt (guitare), Johan Hansonet (basse) et Mats Nordrup (batterie) au sein de Regurgitate et General Surgery.
Formé en 1989, l’histoire de Crematory sera de courte durée puisque les quatre garçons originaires de la région de Stockholm mettront un terme à l’aventure en 1993 après avoir sortis quatre démos et un EP. Paru en 2009 sur Necroharmonic Productions, label américain spécialisé dans l’exercice de la compilation (Autopsy, Disma, Gorement, Interment, Rottrevore...), Denial (dont l’artwork est d’ailleurs identique au EP du même nom) regroupe l’intégralité des enregistrements du groupe suédois. Ces derniers sont proposés dans un ordre qui n’est ni chronologique ni antéchronologique comme c’est pourtant le cas d’habitude mais d’une manière plutôt aléatoire. On retrouve donc dans un premier temps les quatre titres du EP Denial sorti en 1992 suivis des démos The Exordium (1990), Wrath From The Unknown (1991) et Netherworlds Of The Mind (1992 - parue après la sortie de Denial). En guise de conclusion, on trouve enfin le titre "Mortal Torment" sorti en1989 sur la démo du même nom. Vous trouverez également dans le livret qui accompagne cette compilation une brève biographie signée de la main d’Urban Skytt , quelques photos d’époque ainsi que de nombreux flyers. De la lecture instructive afin d’accompagner ces soixante-treize minutes de Svensk Döds Metall.
Denial - 1992 : Seule sortie de Crematory qui ne soit pas une démo, cet unique EP propose quatre morceaux dont deux figuraient déjà sur de précédents enregistrements ("Chunks Of Flesh" sur The Exordium et "Unconsecrated Ground" sur Wrath From The Unknown). La bonne surprise est que contrairement à beaucoup d’autres groupes de l’époque, ces titres n’ont pas été enregistrés au Sunlight studio par Tomas Skogsberg mais au Montezuma studio en compagnie de Rex Gisslén (Bathory, Candlemass, Carbonized, Fleshcrawl...). Prenant ainsi le contrepied des réalisations de l’époque, Crematory réussit à ne pas ressembler à tous ces groupes du moment (et cela en dépit d’une production granuleuse et grésillante). Une identité qui tend d’ailleurs à s’affirmer encore davantage avec l’utilisation discrète mais agréable d’un clavier ("Chunks Of Flesh" à 2:36) ainsi que la mise en avant d’influences Grind (ces nombreuses séquences mitraillettes à la Napalm Death) héritées de cette proximité (pour ne pas dire implication) qu’entretiennent certains des membres de Crematory avec Regurgitate et General Surgery. Les Suédois proposent ainsi avec Denial un Death Metal particulièrement soutenu qui ne lésine pas sur les passages blastés mais qui a également la particularité d’y associer un certain sens du groove (à l’image de ce passage redoutable à 0:35 sur "Into Celephais") et de la mélodie (ces nombreux leads et autres soli qui viennent ponctuer ces quinze minutes).
The Exordium - 1990 : Soyons clair, cette seconde démo de Crematory (et première sortie officielle) ne brille pas par la qualité de sa production boueuse (bien qu’elle soit plus qu’acceptable pour l’époque) ni même par celle du support physique sur lequel elle a été enregistrée et qui a semble-t-il subit les affres du temps à en juger par la perte de la stéréo sur le title track. Ainsi, outre un "Chunks Of Flesh" que l’on retrouve ici dans une version quelque peu simplifiée, on se surprend à constater que les Suédois proposaient à l’époque un Death Metal particulièrement atypique dont le riffing tortueux n’est pas sans rappeler aujourd’hui celui d’un certain Demilich (l’introduction de "The Exordium", celle de "Chunks Of Flesh", "Unevasive Possession"...). Se pourrait-il alors que Crematory ait eu une quelconque influence sur la personne d’Antti Boman et une partie de la scène finlandaise ? Et bien c’est fort probable puisque la première démo de Demilich n’est sortie qu’en 1991 tout comme celle de Demigod. Et il n’y a pas que ce riffing puisque même en matière de tonalité, les guitares sont ici bien plus profondes que ne le sont celles de leurs compatriotes en marche pour la gloire : Entombed, Dismember... A l’écoute de tels titres, il est alors fort dommage que le groupe n’ai pas réussi à percer davantage tant il y avait déjà pour l’époque un énorme potentiel.
Wrath From The Unknown - 1991 : Ainsi, malgré l’originalité de ce premier essai, Crematory choisira dès l’année suivante d’opter pour une approche moins tarabiscotée et cela au profit de sonorités Grind encore plus évidentes ("Unconsecrated Ground"). Même si le riffing conserve un soupçon de ce qui sera l’un des marqueurs essentiels du Death Metal finlandais, le groupe s’oriente désormais vers une musique encore plus brutale aux rythmes enlevés. Entre la voix grave et profonde de Stefan Harrvik et ces blasts et autres cavalcades quasi-ininterrompus, Crematory continue d’offrir une alternative particulièrement intéressante à ce Death Metal suédois alors marqué par les studios Sunlight. D’autant que tous les riffs sont vraiment excellents et n’ont absolument rien à envier à ceux du big four scandinave. Moins surprenante que The Exordium, on imagine néanmoins très bien la claque qu’à pu être Wrath From The Unknown à sa sortie sur toute ces jeune génération en quête de sensations fortes et d’atmosphères morbides. Décidément, Crematory aurait pu faire partie des grands...
Netherworlds Of The Mind - 1992 : Quasiment un an après la sortie de leur unique EP, les Suédois reviennent à la charge avec une nouvelle démo quatre titres devant servir de préambule à un premier album prévu chez Mangled Beyond Recognition Records (M.B.R.). Evidemment moins percutante et incisive que la production de Denial, le travail effectué ici n’en reste pas moins très bon pur l’époque. Alors certes les guitares grésillent, la caisse claire claque un peu et la bande magnétique semble également accuser le poids des années qui passent mais dans l’ensemble, le son est vraiment bon pour une démo de l’époque. En termes de contenu, Urban Skytt et Crematory ont fait une croix sur ce riffing si original et particulier pour une approche assez identique à ce que l’on pouvait déjà trouver d’une certaine manière chez General Surgery ou Regurgitate. Un Death Metal gras et bas du front entretenant quelques rapprochements on ne peut plus évidents avec l’univers du Grindcore. Que l’on préfère le Crematory de la première heure, je peux le concevoir. Toujours est-il que malgré ces quelques changements de cap, le groupe suédois demeure d’une efficacité incroyable (raaah ce "Dwellers In Twilight") grâce à des riffs et un rythme à vous mettre à genoux.
Mortal Torment - 1989 : Pour conclure, Necroharmonic nous propose de découvrir le tout premier titre de Crematory sorti en 1989 sur lequel on retrouve au chant un certain Christofer Johnsson du groupe Therion. Bien qu’il s’agisse probablement du titre le moins marquant dans le cadre de cette compilation, on peut tout de même s’apercevoir que le groupe avait déjà parfaitement assimilé l’essentiel de ce qui faisait à l’époque le Death Metal avec ces grosses accélérations thrashy, cette voix profonde et bardée de réverb ou ce riff sinistre qui me trotte encore ne tête à l’heure où j’écris ces lignes. Tout n’est pas parfait, Crematory manque encore de personnalité mais replacé dans le contexte de l’époque, il ne fait aucun doute que les Suédois avaient en main toutes les clefs pour réussir à se faire une place parmi les meilleurs. L’histoire en aura juste décidé autrement…
Si la scène suédoise a livré quantité de groupes obscurs à la carrière aussi éphémère que celle d’un artiste de la Nouvelle Star, Crematory fait partie de ces groupes dont il ne faut surtout pas passer à côté si vous êtes amateurs de vieilleries du Grand Nord. Car si les Suédois n’ont jamais eu la chance (malgré les opportunités) de sortir un album, on leur doit quelques enregistrements particulièrement savoureux dont (très) peu parmi nous (amateurs de Death Metal) soupçonnent l’influence qu’ils ont pu avoir sur le reste de la scène scandinave (et finlandaise en particulier). A ce titre, la démo The Exordium demeure une franche réussite même si la suite n’a absolument pas à rougir à commencer par l’excellent EP Denial qui mêle Death Metal (particulièrement brutal pour l’époque) et Grindcore de manière fort convaincante. De fait, si j’ai réussi à vous convaincre soyez attentifs à ces deux derniers conseils. Premièrement, ne confondez pas le Crematory dont il est question ici avec le Crematory allemand. Vous le regretterez amèrement. Deuxièmement, attention au pressage de Denial sur lequel vous mettrez la main. La première édition semble avoir été complètement foirée avec un son abominable. Vous savez tout. J’ai fait mon taf. A vous de vous rendre service désormais.
| AxGxB 20 Avril 2016 - 826 lectures |
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