Todtgelichter - Rooms

Autant se faire immédiatement une raison, Todtgelichter a tourné la page et ne reviendra pas au black metal de ses débuts. Au fur et à mesure des changements de line-up, le groupe n'a cessé d'évoluer pour devenir ce qu'il est désormais. L'intégration de Marta aux claviers et au chant a joué un rôle proéminent dans cette mutation. J'imagine que les fans d'un Schemen trouvent difficilement leur compte désormais mais les Allemands n'ont pourtant jamais perdu leur créativité, ce qui leur a permis de toujours sortir des albums solidement construits et intéressants.

Rooms est ainsi dans la parfaite continuité des deux œuvres précédentes, bien que les relents black metal encore palpables dans l'excellent Angst sont presque absents. On retrouve parfois quelques touches de celui-ci sur des pistes telles « Zuflucht » ou « 4JK » mais le combo officie davantage dans un registre prog à proprement parler. Et dans ce registre, Todtgelichter s'en tire avec les honneurs. Au lieu de miser sur des accélérations frénétiques et de tout détruire sur son passage, la formation prend le chemin de la subtilité en développant des atmosphères au fur et à mesure des minutes qui défilent. Ambiances sombres, feutrées ou plus rêveuses, les facettes sont multiples et l'application de mise. Mention particulière aux claviers de « Necromant », complètement imprévisibles mais faisant leur boulot à merveille. Couplés au chant de Marta, ce morceau en devient prenant alors qu'il fait plus office d'interlude que de véritable composition du combo.

Si ces ambiances sont aussi intéressantes, c'est également en grande partie grâce à une très bonne performance de la chanteuse, qui obtient cette fois-ci le rôle principal. Auparavant présente en tant que soutien à la voix extrême, l'Allemande officie maintenant au lead, ce qui ne sera peut-être pas au goût de tout le monde. Marta est pourtant infaillible à son poste, sa voix grave étant en parfaite osmose avec le propos actuel de Todtgelichter. Mais le groupe n'en a pas oublié la recette de la dualité vocale, ainsi Marta s'éclipse parfois pour laisser ses comparses reprendre le flambeau, brillant par son absence sur « Zuflucht ». En revanche, elle vole intégralement la vedette dès le titre d'après, vu que c'est bien joli de la reléguer aux abonnés absents de temps en temps mais c'est bien elle la star de la bande désormais.

Le savoir faire du quintette est ainsi intact et se complaît dans cette nouvelle formule rafraîchie, mais Rooms est un album imparfait et parfois inégal où les bonnes idées en côtoient de plus douteuses. Au rayon de ces très bonnes surprises, je ne peux m'empêcher de classer un « Schrein » de belle facture, où les sursauts black metal sont vraiment plaisants à entendre. L'emploi tant de la voix extrême que du chant de Marta est un énorme atout pour la composition, possiblement la meilleure de tout le disque. La plupart des pistes sont réellement convaincantes mais le disque manque parfois de vigueur, se complaisant un peu trop dans ces travers progressifs. Ou produisant tout simplement des pièces inutiles, comme « Lost ».

En fait, Rooms est un opus à la fois frustrant et plaisant. Frustrant car les Allemands sont appliqués et professionnels mais en gardent encore sous le pied, capables d'un résultat encore supérieur à celui-ci (comme c'était le cas sur leur œuvre majeure Angst). Plaisant pour tous ces changements, pour ce renouveau continu dans leur façon de composer, et pour la présence plus importante d'une Marta qui est l'un des meilleurs atouts de Todtgelichter. Nous voilà en face d'un ensemble de qualité, réellement plaisant à l'écoute mais dont le potentiel n'est pas entièrement exploité. Ce dont on sait le groupe parfaitement capable. J'attends la suite de pied forme, car sans être déçu par Rooms, je n'ai pas été entièrement comblé non plus.

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