Predatory Light - Predatory Light
Chronique
Predatory Light Predatory Light
Parce que la découverte d’une œuvre est toujours intimement liée à son contexte, à notre état d’esprit du moment et donc sur ce quoi on serait plus apte à être sensible à cet instant T, il est important de laisser cette œuvre de côté durant un petit moment, d’écouter/voir/vivre autre chose avant d’y revenir, la tête reposée, afin de pouvoir se faire son avis final. Je n’utilise pas cette petite phrase d’introduction comme un habile stratagème pour justifier les délais toujours plus titanesques qui séparent les parutions de mes chroniques, je vous dis ça car c’est ce que m’a rappelé Predatory Light lors de notre première rencontre, en milieu d’année 2016. En effet, lorsque j’ai pour la première fois posé mon oreille sur « Sacrum (Feral Devotion) », puis lors de mon acquisition et de mes premières écoutes de l’album dans son intégralité, j’étais abasourdi, enivré par la musique sinueuse et originale qui se présentait à moi. Seulement voilà, alors que mon manque de régularité habituel m’empêcha de rédiger cette chronique sur le coup de la découverte, j’allais l’écrire quelques mois plus tard, ressortant l’album par la même occasion. Et si ces nouvelles écoutes furent à nouveaux forts agréables, la chronique aurait été certainement été très différente et bien plus élogieuse si je l’avais écrite directement sur le coup de la découverte.
Si l’album éponyme sorti en 2016 fut ma première rencontre avec ce groupe américain formé en 2011, dont les membres sont également présents dans des formations aux qualités et réputations variables tels que Vanum, Ash Borer ou Triumvir Foul, le groupe avait déjà sorti deux EP coup sur coup en 2014, puis un split en 2015 en compagnie de leurs excellents compatriotes de Vorde. Dès ces premières productions, Predatory Light avait déjà clairement dessiné sa musique autour d’un Black Metal aux relents Death et teinté d’une atmosphère Doom comme le manient des groupes comme Cerekloth ou Samael à ses débuts. Une musique sombre, presque occulte, qui pourtant reste facilement accessible et mémorisable, contenant son lot de moments restant gravés dans la mémoire. Des moments forts rendus possibles principalement grâce au travail fait sur les guitares, qui outre les quelques tremolos que l’on trouve par ci par là lors des passages les plus rapides et les plus gras, tissent de longues séquences envoûtantes, véritable cœur de la musique du groupe.
Predatory Light en use d’ailleurs dès l’entame de l’album, juste après le sample lugubre qui fait ici figure d’introduction au premier titre « Laughing Wound », avec ce petit dialogue sournois entre les deux guitares, alliant distorsions et vibratos. Ce genre de passages lancinants restera le gros point fort de l’album d’un bout à l’autre. Chaque chanson possède un moment fort, ou les guitares se détachent du reste pour tisser leurs mélodies lugubres et sinueuses, souvent rejointes par une basse hypnotisante de régularité et agréablement mise en avant dans le mix. Mais le paroxysme de ces douces mélopées est atteint sur « Sacrum (Feral Devotion) », à mon sens le meilleur morceau de l’album. D’abord lors de cette intro ensorcelante, qui fût l’appât qui m’a attiré en premier vers le groupe, puis après 5min lors du retour de ces guitares, donnant un aspect presque rituel au morceau. Cette ambiance à la limite cabalistique est également rendue possible grâce au vocaliste qui, s’il ne possède pas un timbre de voix particulier outre mesure, fait son petit effet en parlant plus qu’il ne chante, prenant souvent une intonation incantatoire pour réciter ses textes répétitifs.
Voilà ce que je retenais du premier album de Predatory Light avant de le ressortir, quelques mois plus tard, dans l’objectif de publier cette chronique. Des passages lancinants à la guitare parfaitement composés, et une ambiance maîtrisée de main de maître, en dépit d’une production trop lisse, il m’en fallait pas plus pour en garder un excellent souvenir. Seulement voilà, entre temps j’ai eu le malheur de me pencher sur les sorties antérieures du groupe, en particulier sur le Split en compagnie de Vorde sortie un an auparavant. Une excellente collaboration où les deux groupes se complètent parfaitement naturellement, et ou Predatory Light montrait un visage bien plus sombre que sur ce premier album. Les mélopées à la guitare sont déjà présentes mais plus diffuses, moins démonstratives et surtout complètement intégrées aux morceaux, sans être espacées par les passages blastés présents sur l’album éponyme. Car là est le principal défaut du premier album des américains : entre les moments forts dont je vous parlais plus tôt, le groupe propose un Black/Death classique, au tempo rapide et appuyé par une batterie qui, même si elle fait agréablement le travail, se montre extrêmement répétitive. Et c’est toute la musique des américains qui en pâtît.
En effet, derrière ses riffs alambiqués et ses mélodies sinueuses, la musique de Predatory Light s’avère finalement diablement classique dans sa construction. Les chansons sont généralement composées de couplets et de refrains, sur lesquels viennent se greffer quelques breaks et ces rythmes envoûtants à la guitare. Cela se sent surtout sur « Divine Membrane » qui, avant d’être sauvée par l’excellent Break alliant lead mélodique et batterie martiale, s’avère être une succession de structures rythmiques résolument classiques, plus ou moins rapides, mais jamais très intéressantes. Et c’est d’ailleurs le constat que l’on peut faire pour toutes les parties les plus rapides car, si elles sont ma foi bien exécutées, elles n’apportent pour la plupart pas grand-chose aux compositions et font un petit peu figure de remplissage face aux passages plus mélodiques et alambiqués de l’album.
C’est donc un constat mitigé qui se dresse finalement à l’écoute de cet album. Une sensation partagée entre le bonheur d’écouter ces délicieuses mélodies sinistres et la lassitude de devoir passer par des passages nettement moins intéressants pour les atteindre. L’album est donc inégal, présentant l’excellent comme le nettement moins bon. Un album finalement beaucoup moins complexe que pourrait nous faire penser ces riffs tarabiscotés, aux multiples passages éminemment répétitifs et à la production beaucoup trop proprette pour l’ambiance que le groupe souhaite lui insuffler. Le split avec Vorde faisait bien mieux à ce niveau là, avec une production sombre et opaque qui servait des compositions elles aussi beaucoup plus inspirées.
C’est pourtant la mine réjouie que je me replonge dedans de façon régulière, car les douces mélopées restent pernicieusement gravées dans la mémoire et font de fait assez vite disparaître les passages les moins intéressants. Le groupe a potentiel certain, et il me tarde de voir ce que ça va donner quand ils auront pris un peu de bouteille et se rendront compte que quelques lignes mélodiques disséminées çà et là ne suffisent pas à tenir les auditeurs en haleine lors d’écoutes répétées.
| Høsty 21 Janvier 2017 - 764 lectures |
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