En 2013 j’ai chroniqué
Sunbather, j’ai mis 9/10.
En 2015 j’ai chroniqué
New Bermuda, j’ai mis 9/10.
En 2018, je me suis ravisé et j’ai fait monter la note du premier à 9.5. Parce que c’est avec le temps que l’on se rend compte si un album a duré ou non. Que qui que soit te dise, « ça va durer », « on va faire un bon bout de chemin ensemble » ou toute autre déclaration concernant l’avenir, ne le crois pas. Ahahahahaha, le vieux Sakrifiss tout aigri qui a trop écouté du Léo Ferré. Mais non, mais c’est vrai que les promesses n’ont aucune valeur. Chloé peut t’assurer que son amour durera, il se peut qu’elle change d’avis, il se peut que le voisin lui convienne mieux. Il se peut aussi que ce soit toi qui aille en premier aller renifler les culottes de Béa. Donc je ne mets jamais de notes supérieures à 9/10 sur le moment, c’est par la suite que le point restant pourra être acquis. Et là, le demi-point est mérité car malgré les 5 années qui sont passées, Sunbather reste. Il me semble même avoir été une pièce angulaire.
New Bermuda n’ayant comme seul défaut que le fait d’être sorti après.
En voici la suite. 3 ans après. Une attente raisonnable, mais plus longue qu’à l’habitude des Californiens, qui nous avaient gratifié d’une sortie toutes les années impaires depuis ce Roads to Judah de 2011, que je continue de bouder. Et à nouveau, la première chose à laquelle j’ai envie de penser en écoutant les nouvelles compositions, c’est le style pratiqué. Beaucoup refusent d’apposer le terme de black metal derrière
DEAFHEAVEN, mais il me semble évident qu’il a le droit d’être accepté en tant que tel. Les musiciens eux semblent toujours s’en battre autant, et se posent beaucoup moins de questions que les auditeurs, gardant un style vestimentaire sans aucune connotation BM, et en faisant des concerts et apparitions diverses dans des milieux plus larges. L’étiquette importe peu, mais elle permet tout de même d’attirer le chaland. Et alors que j’avais désigné Sunbather de « Post Black Dévastateur » puis New Bermuda de Dawn of Black Metal, c’est cette fois-ci l’expression Feeling Good Black Metal que j’ai choisie.
Et là, tout de suite, on peut monter au créneau, et critiquer l’antinomie apparente du concept. La musique de
DEAFHEAVEN fait se sentir bien. Or le black metal est censé mettre en avant des sentiments noirs et rageurs.
DEAFHEAVEN a certes des vocaux de black metal, mais la musique est principalement tranquille et relaxante. Eh bien moi, j’estime que le black metal n’est pas censé s’enfermer dans un style, mais doit plutôt transmettre un concept. Et parmi ses concepts, et son essence même, il y a la liberté et la force. Le black metal doit permettre à l’auditeur de se sentir libre, et de se sentir fort. Ça aussi beaucoup partagent cette vision. Et donc le black metal dépressif est plus une tare qu’autre chose si on y pense, puisqu’il met l’accent sur nos faiblesses plus que nos forces. Oui, je sais, je tiens ce discours tout en étant fan de DSBM moi aussi, mais c’est le fil de la réflexion qui est important. Car ce que je veux dire, ou plutôt essayer de faire, c’est de réhabiliter
DEAFHEAVEN. En écoutant l’heure de jeu de ce nouvel opus, on se sent à l’aise, on se sent puissant. Ce n’est pas grâce à la musique, ce n’est pas grâce aux vocaux, c’est grâce à leur mélange.
La musique seule de
DEAFHEAVEN, encore plus que jamais sur ce nouvel album, peut tomber dans le mièvre, et un sucré tellement sucré qu’on en chierait directement des fraises Tagada. Les vocaux seuls pourraient passer inaperçus, finalement assez classiques pour du black metal, avec même par moments d’amusantes ressemblances avec...
FADADES ! Le souffle, la respiration, le timbre...
Mais ces deux éléments mélangés à la façon
DEAFHEAVEN, cette musique optimiste et ce chant possédé nous surélèvent. Les ailes poussent, nous volons au-dessus de nos horribles métropoles, et nous vomissons dessus un arc-en-ciel élitiste. Et on est content de nous. Surtout avec « Canary Yellow », titre très bien amené, qui s’écoule dans les oreilles pendant 12 minutes irresistibles.
On est aussi très contents d’autres pistes, mais pas nécessairement sur l’album en entier. Il y a des parties plus faibles, souvent celles où l’instrumental doux prend le pas sur les reste. Et puis il y a principalement le titre « Night People » qui dérange les esgourdes. Pour le coup, il n’y a rien de metal. Une piste qui tente de faire monter la tension émotionnelle avec un duo homme / femme au chant. La dame, il s’agit de Chelsea Wolfe. Les curieux iront voir ce qu’elle fait habituellement en faisant une recherche sur YouTube...
Ordinary Corrupt Human Love est ainsi un album suffisamment solide pour satisfaire les personnes sensibles au style, mais je trouvais les précédents plus costauds encore, plus attractifs. À part quelques passages, je ne sens pas que j’y reviendrais autant qu’auprès de ses grands frères. Un bon point en moins que
New Bermuda du coup...
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