« Il y a des gens, sérieux, ils sont fans de
DEAFHEAVEN. Ils n’en ont même pas honte les pauvres. Ils ne doivent pas se rendre compte de leur bêtise. Bah si, quand même. Il n’y a pas besoin de 150 écoutes pour se rendre compte que c’est pas du vrai black ! »
Ce genre de commentaire énorme lancé comme ça, avec un bon air condescendant, je l’ai vu plusieurs fois pour essayer de justifier la supposée nullité d’un des groupes les plus controversés de ces 5 dernières années.
Alors effectivement, « il n’y a pas besoin de 150 écoutes pour se rendre compte que c’est pas du vrai black ! » mais on se demande bien la valeur de cet argument ! Le monde n’est pas non plus obligé de ne jouer que du black et il n’y a pas de quoi faire une jaunisse dès qu’un groupe y ajoute des éléments différents. Mais ce style de critiques n’est pas nouveau et l’on sait tous que
CRADLE OF FILTH a sali le black avec ses claviers, qu’
IMMORTAL est allé trop loin avec ses riffs heavy, et que
SEMARGL mérite la guillotine à sec pour avoir transformé notre sainte musique en mascarade pop ! Oui, et alors !?! Cela fait chier ceux qui ont l’impression que le black ne doit pas être dénaturé, que le black ne doit être que haine pure, sombre, sans concession. Bref, que le black doit être formaté ! Bah si ! Car cela revient à dire que le BM doit respecter des codes et demeurer immuable. Or il me semble que le black est plutôt censé s’opposer aux clichés, prôner la liberté, toujours jouer à contre-pied. Ce que fait
DEAFHEAVEN !
Et même ! Même si on acceptait de cracher sur ce qui n’est pas black, est-ce que la musique de
DEAFHEAVEN serait la première à blâmer ? En l’écoutant réellement on se rend compte qu’il a beaucoup plus d’éléments black que la moitié de la scène. Les compositions ne sont pas polluées tant que ça par des éléments extérieurs. Excusez-moi mais les vocaux déjà sont totalement black ! Hurlés à mort, à s’en claquer les cordes vocales, ils parviennent à un rendu enviable par tous. Aucun chant clair n’est à signaler. Les claviers et pianos sont certes là, mais pas omniprésents. Quant à l’agressivité, elle est bel et bien là. Alors si l’on fait un reproche au groupe, il faut être logique et en faire aussi à tous les groupes de dépressif, de viking ou d’atmosphérique ! Non, la vérité c’est que les détracteurs tentent de s’attaquer à la musique du groupe alors que ce qui les dérange et leur est difficile à avaler, ce sont le visuel et le look de la formation.
« Les limites sont dépassées ! Les
DEAFHEAVEN sont la plus minable représentation des hipsters, et il y a fort à parier que dans deux ans ils passeront à autre chose, et que leur public en fera de même ! »
Peut-être bien, mais c’est un jugement qui n’a encore aucun lien avec la musique. Si vous êtes importunés par ces éléments extérieurs, c’est parce que vous y avez porté trop d’importance. Vous jugez sur l’enrobage plus que sur le contenu. Alors c’est vrai, je suis le premier à dire que ce qui entoure un groupe est important car c’est ce qui finalise les ambiances et aide à faire voyager l’esprit. Mais cela ne signifie pas que ce visuel passe avant ! Il doit rester un plus, pas devenir un moins. Oui, ils n’ont ni les vêtements, ni l’attitude, ni les thèmes de ce qu’impose le black et ressemblent même au contraire à ce que les metalleux essaient habituellement de fuir. Mais cela fait aussi sa personnalité et créé un décalage intéressant entre l’aspect et le contenu !
« Dans deux ans il passera à autre chose. ». Nous perdrions un très bon groupe. Mais cela ne déprécierait en rien ses albums actuels, celui-ci inclus, qui resteraient des modèles. Les changements d’orientation d’
ULVER, de
BURZUM, d’
ENSLAVED, de
DARKTHRONE ont-ils rendu leurs anciennes œuvres moisies ? Sûrement pas. De plus, on a beau dire, c’est tout de même le troisième album des Américains et ils restent fidèles à leur style, à leur talent, à leurs envies. Plus de quatre années et une motivation intacte, lorsque d’autres ont été incapables d’aller au dessus de l’unique album !
Oui, je me fais l’avocat du groupe. J’essaie de convaincre de son intérêt, et de mon agacement face à la haine qu’il peut engendrer ! Comme de la haine est engendrée à chaque fois qu’un groupe perce. Mais je me doute que certains resteront sur leurs positions, continuant à arguer que « le groupe n’a rien dans le slip ! ». Eh bien tant pis, chacun est bien entendu libre de ses goûts. Mais allez, je vais leur faire plaisir et répondre que cet album n’a effectivement rien dans le slip, mais tout dans le bermuda. Le New Bermuda !
Et ses 5 nouvelles pistes sont aussi délicieuses que les 7 de
Sunbather. Deux pistes de moins, 14 minutes de perdues. Celui-ci fait 46 minutes lorsque son prédécesseur en cumulait près de 60. Peu de changements pour le reste puisque le groupe se consacre toujours à des ambiances déchaînées surmontées de riffs éclairés, de légères touches de piano, de lumières aveuglantes. L’étiquette qui a été apposée à
DEAFHEAVEN parle de post-black metal, mais c’est un poil restrictif. En fait, si l’on peut parler de « après black », ce serait plutôt parce que le black est habituellement une musique sombre, une musique de nuit noire.
DEAFHEAVEN a encore un grand pied dans la nuit, mais il fait apparaître quelques rayons. Ce groupe se situe à l’aube, tout juste après la nuit, tout juste après le black. Et chaque piste amène la pointe du jour à un moment ou à l’autre. Et c’est beau. Tout simplement beau. Sur « Brought to the Water » c’est à 3:23, sur « Luna » à la quatrième minute, sur « Baby Blue » c’est dès le début etc...
Comme à son habitude, le groupe parvient à attirer l’oreille constamment. Aucune longueur n’est à constater malgré quelques parties instrumentales qui jouent la durée. Des images sont créées à chaque instant et le voyage est fort. Les passages progressifs ne sont pas là pour montrer une quelconque compétence technique, mais bien pour ajouter en tension, pour rajouter une couche de sensations ! Les musiciens sont encore au sommet de leur art et s’inscrivent parfaitement dans la lignée de
Sunbather. Ce qui ne trompe pas, c’est qu’en écoutant leurs albums en random on n’a pas l’impression d’écouter de titre plus faible que les autres. Tout se mélange encore génialement. Bref, les Américains méritent leur popularité ! Forts dans les moments forts, excitants dans les moments excitants, touchants dans les moments touchants ! Un reproche ? La formule fait peut-être un peu moins effet, mais alors vraiment un peu moins, parce qu’on la connaît bien désormais...
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