Dans la scène Tech Death, il y a deux tendances... Quoi ? Comment ça : « Que deux, mais non, y en a plus ? » Tu ne sais même pas ce que je vais dire, attends un peu, tu veux. Ah, ce que vous êtes tatillon dès qu'on parle Tech Death.
Donc il y a deux tendances : ceux qui veulent faire honneur à leurs maîtres, et les autres.
Quoi ? Comment ça : « C'est tout ? » T'es bien impatient, toi, on sent que tu veux du direct, sans détour, que ça blaste et que ça claque.
C'est ce que je disais : deux tendances du Tech Death. Les autres, ce sont ceux qui pensent pouvoir tout réinventer, en mettant masse d'effets, en se plaçant comme fer de lance et nouveau visage du genre, et en affirmant haut et fort que leur musique est hautement technique, et que ceux qui ne l'aiment pas n'aiment simplement pas la musique technique (ouais, tu sais de qui je parle...)
Les premiers, en revanche, font preuve de plus d'humilité, comme des bons élèves qui cherchent à parfaire leur gamme avant d'enfin oser proposer des compos personnelles.
CONTRARIAN est clairement de cette frange là. Composée de musiciens ayant dépassé la trentaine, voire la quarantaine, on peut dire qu'on a là des personnes qui ont roulé leur bosse, puisque deux d'entre eux étaient déjà membre du groupe
Delirium Endeavor, orienté Prog Tech Death Fusion. Après deux albums qui ont su trouver leur public, les américains reviennent pour nous proposer une évolution dans leur style.
Bon, on ne va pas se mentir, la paternité du papa Schuldiner se fait sentir dès le départ, avec cette basse toute délicieuse à la Di Giorgio, portée par une lead en avant ; tu sais, celle qui fait dire que « la fin de
DEATH, elle est clairement MeloDeath », car le MeloDeath, c'est l'incursion du Heavy dans le Death et que la fin de Death, c'est faire une deuxième nouvelle vague du Heavy, d'où la cover de Painkiller qui entendait bien montrer le projet final de Schuldiner : faire du Heavy qui prend en compte les avancées extrêmes.
Autant dire qu'avec ce « Vaskania » en ouverture, Contrarian a saisi le propos de leur principale inspiration : plans techniques, variété rythmique, lead qui n'en finit pas de diriger, mais qui laisse la place à la basse, à la seconde guitare ainsi qu'à la batterie, tout en finesse dans son jeu. On sent l'écriture « fuguesque » digne de
Symbolic et
Sound of Perseverance, dans une écriture qui m'évoque plus le serpent que le ver. Car ça s’immisce, ça file, parfois ça prend son temps, puis ça bondit sur toi.
Ce premier morceau montre tout du fait qu'ils savent ce qu'ils font : « Oui, on connaît Death sur le bout des doigts, on a compris sa grammaire. Tu es prêt à en entendre plus ? »
Personnellement, Contrarian ne m'avait jamais vraiment convaincu. Leur premier album ne m'a pas du tout emballé, la faute à une production et une écriture que je trouvais trop plate, pas assez innovante, car trop proche d'
OBSCURA. Il y avait aussi le chant que je trouvais beaucoup trop growlé pour coller avec la musique.
Le deuxième,
To Perceive is to Suffer, dont le titre évoque clairement « To Forgive is to Suffer », était trop proche de l'écriture de Schuldiner pour trouver, à mes oreilles, une légitimité propre – et vous savez que j'ai du mal avec ça, notamment quand je parle de Gruesome. D'autant que, là aussi, on avait une touche « Obscura des années 2000 » qui me gênait énormément.
Mais là, grâce ! Gloire ! Volupté ! Contrarian ne se contente pas de ne faire qu'un Death-bis, ils se proposent l'exercice difficile de prolonger l’œuvre d'une légende. Si tu prends « Exorcism », tu le comprends tout de suite : cette intro, cette progression, la façon dont ça s'accélère après que le chant finit sa phrase, du grand Death, mais avec des effets en plus et des élans plus Power dans les phases instrumentales... Puis les riffings mélodiques inspirés et motivants, voilà qui satisfait comme il faut ! Je tiens vraiment à saluer la production : le son propose énormément de reliefs – notamment la basse et la batterie, qui donnent beaucoup de contours à la musique, ce qui permet au reste de vraiment occuper l'espace sonore dans un mastering plein qui respire.
Un tel travail permet de mettre en avant ce qui, à mon sens, est LA force de l'album : le combo basse-batterie.
Parce que le dernier album de Schuldiner avec
CONTROL DENIED était très fourni de ce côté-là (Christie – Di Giorgio, ça ne déconne pas!), là je sens que le groupe a voulu aller dans cette direction : il n'y a qu'à écouter « My Curse » dès 1:09 pour se convaincre de la rigueur dans l'écriture où les pistes se complètent. Non seulement ils poursuivent Death, mais ils ont également compris l'intégralité du projet – et entrevu ce que les derniers éléments pouvaient donner comme continuité.
En même temps, niveau batterie, ça ne pouvait qu'être au top. Faut pas chercher : on a Kollias derrière les fûts ! On le connaît pour ses blasts de l'infini, mais il est un excellent batteur, avec un jeu énormément nuancé, notamment dans
cette fameuse vidéo de performance Rock Fusion. Il suffit d'écouter le départ de « Among the Misled » pour s'en rendre compte : il est parfait pour ce genre de compositions ! D'ailleurs, parlons-en de ce morceau : la phase instrumentale, elle te prend là où il faut, et progresse d'une façon... Rien à dire ! On a là ce que le groupe peut proposer de grand et bien fichu.
Après, soyons honnêtes : Contrarian ne propose en soi rien de neuf. On pourrait considérer cet album comme un « What if ? », c'est-à-dire « Et si Death avait composé un album entre Symbolic et Sound of Perseverance ? » On aurait pu avoir ça. Mais est-ce qu'il permet de marquer une nouvelle étape, et de dépasser ce qu'ils ont hérité ? Pas encore, parce que, mine de rien, le sens de composition reste très proche du maître. Rester sous l'égide de Schuldiner, ce n'est pas évident (regardez Gruesome, mais je vais m'arrêter là vous m'avez compris). Mais le solo de « My Curse » peut nous montrer les pistes à envisager : plus d'audaces dans les riffs, dans les compositions. J'émettrai ainsi un léger bémol sur le titre éponyme, orienté instrumental, qui, justement, manque de cette audace dont je parle, ce qui est dommage car on aurait pu imaginer des phases créatives à la « Cosmic Sea » notamment, ou à la « Voice of the Soul » pour être moins expérimental. Car de l'audace, ils peuvent en avoir, puisque le morceau final, « Whomsoever Worships the Whiteworm » fait preuve de créativité tout au long de ses 8 minutes, et alterne les phases calmes et énergiques avec brio ! Mais cette aisance dans les alternances, on n'est pas surpris : « My Curse » était déjà là pour nous prouver que le côté « on va frapper fort » reste bien diffus, afin de conduire à ce moment de bravoure dans certaines élancées.
En dehors de ça, pourquoi pas une touche Death Metal plus présente ? On pourra parler ainsi de « My Petition », pour moi un des meilleurs titres de l'album, tellement sensible dans son traitement, et qui, lorsqu'il s'énerve dans une partie Death Metal, arrive à tirer son épingle du jeu, et propose un mélange Heavy-Death qui, je trouve, n'a pas été tant exploité que ça. On me rétorquera, possiblement, que leur premier album était très Death Metal dans le son. Justement, il l'était trop, là il est plus nuancé, mieux utilisé.
Je ne boude absolument pas mon plaisir quand je tombe sur un tel disque. Enfin, Contrarian prend du grade, gagne en expérience, parvient à se métamorphoser. Je le dis sans détour : s'ils poursuivent sur la lancée de morceaux comme « My Petition » ou « Among the Misled », ils sont en passe de devenir un groupe incontournable du Tech Death à la Schuldiner, et plus encore ! Ils pourraient devenir la suite d'une légende qui a marqué énormément d'amateurs de Metal.
Et ça, c'est pas donné à tout le monde !
Un album très solide d'un groupe intelligent qui peut encore gagner en identité. De mon côté, il figurera dans mon top... À moins qu'un DEATHBRINGER vienne bousculer le classement ? Affaire à suivre !
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