Fractal Universe - Rhizomes of Insanity
Chronique
Fractal Universe Rhizomes of Insanity
Si la France a su tirer son épingle du jeu, que ce soit dans le Black ou le Hardcore, le Tech Death a, ces dernières années, permis de mettre en avant des formations prêtes à se donner à fond pour porter la bannière du Death exigeant tricolore. Après un premier album aux fortes inspirations Gorod, pour l'aspect Prog qui joue à fond sa différence, et Obscura, pour la grosse valence Tech qui en met plein les oreilles, un quatuor de Nancy est revenu en 2019 avec « Rhizomes of Insanity ».
Vous en avez forcément entendu parler, car Fractal Universe a, au fil des ans, pu faire les premières parties de ténors du Death Tech et/ou Prog, par exemple Obscura. Et si leur « Engram of Decline » a rapidement trouvé son public, notamment via beaucoup de partages sur des groupes Facebook signalant un engouement réel d'une communauté soudée, ce second longue-durée entend bien asseoir le style propre du groupe, qui souhaite se démarquer davantage de ses inspirations.
Le single du disque qui ouvre l'album, « Oneiric Realisations », est une bonne entrée en matière, car il dévoile en moins de quatre minutes de solides arguments : rythmiques qui viennent de plusieurs horizons musicaux, digne héritage du Death jazzy, alternance de passages Death et de moments plus tribaux et, surtout, des montées soudaines qui empruntent d'un seul coup la voie du Tech à renfort de blast beats et d'ambiance élevées, afin de bien sentir les variations et les alternances.
Cela dit, un tel morceau fait partie de ce qui m'a conduit à me méfier de l'album, que j'ai eu beaucoup de mal à appréhender. Parce que ce titre, comme deux autres dans « Rhizomes of Insanity », contient des éléments qui me gênent profondément. Tout d'abord, j'ai du mal avec les gimmicks, car c'est souvent cause de répétition et d'une sensation de ne plus se sentir investi dans l'écoute. Ainsi, le fait de varier entre percussions sur chant murmuré et moments vifs, ça laisse présager un côté vitesse de croisière. Je pense notamment à « Flashes of Potentialities », où le couplet chanté m'évoque Gojira... Et vous savez que Gojira et moi, ça ne fait pas bon ménage, justement à cause de la forte présence de gimmicks. Cette méfiance que j'ai pu avoir s'est retrouvée avec « Fundamental Diving Principle » et son rythme boogie porté par un groove similaire aux bayonnais.
Par ailleurs, j'ai eu du mal à transiger avec la voix qui, si elle fonctionne bien dans les murmures et les parties plus énervées, me laisse toujours de marbre sur les moments chantés entre-deux, nuisant ainsi la structure impeccable de « Rising Oblivion » lorsque le chant est de retour après le solo.
Mais tout ce que j'ai mis, là, ce n'est que du personnel, que du subjectif dû au fait que j'ai des réticences face à certaines façon de composer. Ce que tu ne sais pas, toi qui lis ces lignes, c'est que j'ai beaucoup écouté « Engram of Decline » en vue d'une chronique, mais je l'ai laissée de côté car j'étais trop dans « ça ressemble à un mix entre Gorod et Obscura », ce qui ne rendait pas justice à un groupe qui se défonce dans son projet.
Certes, il y a des éléments avec lesquels j'ai du mal, et je les ai signalés en premier afin de, maintenant, me focaliser sur les nombreux points positifs.
Car « Rhizomes of Insanity » vient remettre les pendules à l'heure.
Déjà, si la structure globale reste prévisible car basée sur des alternances, l'écriture est suffisamment intelligente pour éviter les redites. Ainsi sur « Rising Oblivion », hormis la scorie personnelle que j'ai notée, ce morceau illustre tout à fait la justesse des alternances, tant est si bien que les différents éléments identifiables du groupe ne sont pas sur-utilisés : dans ce morceau, ils parviennent à capter l'attention et à surprendre, car s'il met en avant les va-et-vient entre murmures / rythmiques inhabituelles et parties Prog Tech comme sur le premier titre, il y a des ruptures effectuées, notamment dans le deuxième couplet, pour changer la donne, jusqu'à un solo vraiment sensible.
Cette capacité à étonner se fait aussi sur une piste qui, de base, a failli me faire lâcher tant je sentais une touche trop légère, à savoir « A Reality to Foreclose ». Également proche de Gojira, ils ont cela dit réussi à insuffler un groove bien spécifique fichtrement redoutable. C'est ainsi pour moi l'occasion de souligner la maestria dans les parties instrumentales, rappelant le meilleur du Tech Death, notamment les phases Jazz à la Cynic. La composition est clairement un immense point fort sur des morceaux comme « Masterpiece's Parallelism » et son efficacité intestable, ou « Madness' Arabesques » qui, dans son élégance, m'évoque The Zenith Passage.
Mais la composition devient réellement grandiose lorsqu'elle dévoile le talent des musiciens de Fractal Universe. Tu lances « Parabola of Silence », tu respectes le travail du batteur et ses capacités foudroyantes, via un jeu très précis et extrêmement varié, notamment dès 2:26 pour ce qui constitue pour moi un des instants les plus mémorables de l'album. Cependant, il tient deux concurrents solides avec « Chiasmus of the Damned » qui est une conclusion idéale pour le skeud et, surtout, « Architectural Aberrations » – pour moi le meilleur titre du disque, car celui qui fixe à la perfection toute l'identité du groupe. Ici, pas de moment où je me dis « mouais, pas convaincu par la voix » ou « ah ça fait penser à tel autre titre » : je me tais, et je profite à fond.
Heureusement que j'ai approfondi l'écoute de ce « Rhizomes of Sanity » ! Si de base les singles proposés m'avaient moyennement convaincu, il faut savoir que Fractal Universe a mis les bouchées doubles pour produire un album de très bonne facture. De fait, si vous avez aimé le premier album de Fractal Universe, vous découvrirez ici un disque mûrement réfléchi et qui vous apportera non seulement ce qui vous a plu auparavant, tout en parvenant à vous surprendre. Par ailleurs, si vous avez apprécié le dernier Alkaloid, et que vous voulez plus de Prog-Tech Death surprenant, foncez, vous trouverez ici de quoi satisfaire vos envies de rythmiques changeantes et de phases bien tranchées.
Et si vous aimez Gojira, eh bien allez-y aussi, car vous dénicherez tout au long de ces presque 47 minutes cette science de l'alternance et des intentions qui font qu'un blast beat, ça se mérite et que, quand il vient, tu sens venir en toi toute la puissance de l'explosion.
Un album qui me fait attendre une troisième fournée qui, compte tenu de l'exigence du groupe, parviendra sans doute à être encore meilleure !
| MoM 22 Décembre 2019 - 1288 lectures |
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