Deus Mortem - Kosmocide
Chronique
Deus Mortem Kosmocide
Considéré jusqu’à aujourd’hui comme un second couteau au sein de la pléthorique scène polonaise DEUS MORTEM n’a pourtant rien à envier aux ténors locaux, même s’il demeure encore relativement méconnu que ce soit dans son pays comme à l’étranger. La faute à une faible productivité où se mêle uniquement un album et deux EP enregistrés en un peu plus de dix ans de carrière, et conjugués à un certain manque de visibilité. Comportant en son sein l’ancien chanteur-guitariste d’AZARATH et le batteur surhumain d’INFERNAL WAR le quatuor ne manque ni d’expérience ni de vécu musical, ce qui va être flagrant sur ce second long-format qui risque de lui faire passer un cap décisif pour sa carrière. Car en pratiquement trois-quarts d’heure celui-ci va offrir un Black-Metal sobre et racé, où l’ombre des autres formations actuelles ou anciennes de ses membres va se faire entendre afin de donner un caractère affirmé à leur art noir, et surtout de la meilleure des façons.
En effet dès le début de l’excellent « Remorseless Beast » on va se rendre compte de la facilité d’exécution de la bande et de se qualité d’écriture, qui se fait ici simple et sobre vu qu’elle se contente pendant la première moitié de ce titre d’enchaîner blasts et parties rapides à plusieurs reprises. Avec ce schéma qui ne s’embarrasse pas de fioritures la musique montre déjà des gros points forts tout en ne réinventant rien, pourtant alors qu’on pensait que ce tempo élevé allait perdurer jusqu’au bout il va au contraire ralentir pour alourdir son propos, en y intégrant des leads afin de densifier encore plus l’ensemble. Du coup comportant deux parties distinctes qui se greffent avec facilité, ce jet d’ouverture montre que les gars ne sont pas là que pour tabasser en continu, mais pour offrir des variantes et de la diversité afin d’explorer toutes les facettes du genre. Cela va d’ailleurs être flagrant avec « The Soul Of The Worlds » qui outre reprendre plus ou moins de la même façon ce qui a été entendu juste avant, a la bonne idée d’y intégrer des roulements de caisse claires martiaux et des nappes nuageuses et éthérées, comme pour accentuer toute la palette de leur son. D’ailleurs au fur et à mesure de l’avancée de l’écoute ce sentiment de grande diversité va se renforcer progressivement, notamment avec le brutal et redoutable « Sinister Lava » qui après un départ lourd et brumeux va ensuite totalement exploser avec un long mur de blasts impénétrable, où seuls quelques courts instants de ralentissement vont faire baisser la moyenne. Mais pour éviter toute lassitude les mecs ont intégré avec brio du mid-tempo entraînant et parfait pour headbanguer, porté un riffing implacable qui donne envie instantanément de taper du pied. C’est d’ailleurs à partir de cet instant que la patte technique du marteleur de kit apparaît de façon plus claire et nette, où son groove conjugué à sa vitesse fait des merveilles, et cela ressort plus clairement avec « Through The Crown It Departs ». Place ici à un début et une fin basée sur l’explosivité et des bpm à leur maximum, mais où la finesse de Stormblast saute aux oreilles tant il alterne ses patterns malgré un tabassage en règle et régulier, seulement ralenti par une partie centrale plus posée et en binaire. Si le classicisme est encore à l’honneur il fait des dégâts et ce titre tout aussi réussi que les précédents le prouve bel et bien, montrant qu’il ne faut pas chercher midi à quatorze heure si l’on veut être de suite addictif.
Place alors à la seconde partie de cette galette qui va étonner de prime abord, et confirmer ainsi que le groupe de Wroclaw a plus d’un tour dans son sac, sans pour autant perdre sa ligne directrice. En effet l’écriture va être plus fouillée et recherchée, tout en allongeant son propos ce qui va se révéler être à double tranchant, comme va le confirmer « The Seeker » qui sera un léger coup d’arrêt (mais heureusement le seul) de ce disque. Plus ambitieux au niveau des ambiances il a hélas du mal à décoller, la faute à des idées bateaux moins inspirées et qui tombent rapidement à plat, et aussi à cause d’une durée globale excessive dont le rendu y aurait gagné en étant raccourci. Mais finalement cet échec relatif va être oublié dès la compo suivante (« Ceremony Of Reversion Pt. 2 ») où la mélodie et l’occultisme vont trouver une large place pour s’exprimer. Après une introduction acoustique qui renvoie aux grandes heures de DISSECTION place à un déchaînement de violence, seulement contrebalancé par quelques courts ralentissements, et par une longue partie centrale lourde et posée où la voix se fait plus profonde et quasi mystique, comme une incantation lors d’une messe noire. Avec en prime une conclusion jouée à l’arrache et menée tambour battant d’obédience Death Metal, les bas-silésiens signent une grosse tuerie implacable où l’équilibre des forces est parfaitement en place. Ce constat sera le même sur le monstrueux « The Destroyer » qui bien que plaçant quelques éléments à la guitare sèche (complétés par des passages entraînants idéaux pour headbanguer) ne va pratiquement pas débander tout du long, renvoyant ainsi vers les sorties de Nergal du milieu des années 2000, vu que les chevaux sont lâchés et balançent ainsi une ultime salve de brutalité avant d’en terminer pour de bon, où l’auditeur sera rassasié et repus.
Car là où leurs compatriotes d’HATE lui donnent un repas plutôt bourratif et sans finesse que gastronomique, ici au contraire malgré son côté copieux le tout reste parfaitement digeste et surtout donne envie d’y regoûter plus tard afin d’y apprécier les subtilités qui composent cet ensemble. Avec en prime une production chaude et équilibrée qui ne sonne pas plastique, et sans jamais pousser trop loin son sujet dans un sens comme dans l’autre le combo n’est pas tombé dans l’excès et laisse le feeling s’exprimer ici tout comme la cohésion globale (en lieu et place du talent personnel), car c’est bien là le collectif qui prime. Sans être le disque de l’année il possède quand même suffisamment d’atouts plus qu’intéressants et il va falloir désormais surveiller attentivement ses créateurs qui montrent d’un cran dans la hiérarchie. Etant désormais des concurrents sérieux au podium d’une Pologne qui continue de voir émerger des nouveaux talents d’un peu partout, les vétérans confirment que VADER et BEHEMOTH ont fait des rejetons en très grand nombre (et on ne va pas s’en plaindre), même si dorénavant pour ces deux ténors leur leadership est plus que jamais menacé.
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