Cultum Interitum - Poison Of Being
Chronique
Cultum Interitum Poison Of Being
L’été, c’est l’enfer. Trop chaud. Trop de soleil. Dantefever assommé, apathique, incapable d’écouter de la musique ou presque. Heureusement, cette foutue saison a une fin, et il semblerait que celle-ci daigne enfin se pointer après quatre mois d’une aridité insupportable. Conséquence logique, mon obsession pour les musiques cryptiques et ensorcelées émerge à nouveau, encore couverte du terreau humide malodorant sous lequel elle se morfondait. Et juste devant mes oreilles encore embuées par les infâmes moiteurs estivales, Cultum Interitum se présente de lui-même, avec une évidence désarmante. Des polonais, avec une pochette morbide à souhait toute écarlate, signés chez Godz of War. Je sais ce que je vais trouver dedans, je le flaire à trente bornes, et ce que je renifle me rend tout béat.
Du black metal. Dégueulasse. Cru, noir, sinistre, possédé. Tout ce qu’il y a de plus méchant, satanique, malintentionné et bestial. Un album court, malsain, hostile, qui ritualise la mort et le déclin. La Sainte vénération de tout ce qui pourrit et agonise. Des sons hideux, des martèlements frénétiques, des mélodies bouffées par les vers, des vociférations de goules et des passages rampants fielleux. Ma musique à moi.
Vous voyez le Cultes des Ghoules de l’époque Häxan ? Cultum Interitum aussi. Très bien même. Il cherche à réaliser quelque chose tiré du même tonneau putride. En moins fou, moins grandiose, moins tout, mais en excellent quand même. Personne n’arrivera jamais à la cheville de Mark of the Devil et ses acolytes, mais Cultum Interitum ne démérite pas une seconde. Les guitares sont immondes, dispersant leur saturation infâme tout autour d’elles grâce à une réverbération malveillante. La batterie a ce petit goût primitif, sans artifice, presque liturgique, que j’aime tant. La voix se balade entre des imprécations qui rappellent un peu John McEntee (qui doit arrêter immédiatement de faire de la musique chiante, putain John, qu’est-ce que tu fous depuis dix ans, c’est n’importe quoi là), des gargouillements vénéneux, des appels à tout ce qui dépérit et se délite, et des hurlements hystériques. Vous connaissez, vous dis-je. N’allez pas me chercher de la surprise là-dedans, de inattendu ou de l’original. C’est du black metal primaire avec une petite touche de death pour épaissir le tout, qui serpente entre accélérations de damnés et séquences lugubres plus lentes, assaisonnées d’un soupçon de clavier mortifère. Vous-mêmes vous savez.
Le black metal, c’est simple. Au-delà de toutes les nuances stylistiques, degré d’originalité ou tout autre facteur, un album du style se juge à l’aune d’une seule question que l’auditeur doit s’adresser à lui-même pendant l’écoute. J’y crois, ou j’y crois pas ? Voilà tout ce qui compte. C’est ce qui permet de juger un Behemoth récent comme un Moenen of Xezbeth de manière sûre, sur le même barème. Et pour Cultum Interitum, j’y crois. J’y crois totalement. Je vois les sorcières, les diables aux sabots fourchus saillissant des hérétiques dépravés, les silhouettes indescriptibles et tremblantes partiellement révélées au hasard de flammes impures, les os et le sang souillé. Tout est là. Les polonais convoquent les pires terreurs du passé, à coup d’accords scabreux, de cris repoussants et d’exercices de bestialité réalisés sur batterie non-consentante. Écoutez donc ce terrible final, « Desecration of Light », avec sa mélodie obsédante portée par des guitares vaseuses et cette batterie impie qui capture l’esprit. Tout se joue ici. Sur ce type d’horreur précis. Ce sentiment que quelque part, là-dedans, vit une part de ce qui faisait se signer nos ancêtres quand ils longeaient une forêt à la nuit tombée.
Cultum Interitum est un groupe affreux, qui produit une musique odieuse. Exactement ce qu’il me fallait pour enterrer pour de bon cette catin de période chaude. Retour aux chaudrons pour Dantefever. Il est grand temps de se plonger corps et âme dans les nouvelles offrandes impies que les possédés et les maniaques de notre univers souterrain dégorgeront dans les mois à venir. Cultum Interitum inaugure cette nouvelle saison sous les voûtes de l’underground avec un sabbat visqueux et délétère, qui rappelle en une demi-heure d’où l’on vient, et ce à quoi nous aspirons.
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