Parmi la longue liste des formations intéressantes évoluant au sein de son pays, l’ex-quintet (devenu aujourd’hui un sextet à trois guitaristes) est incontestablement une des plus demandées à travers la planète et ça n’est que justice. Car il y’a trois ans le combo de Hveragerði a explosé complètement à la face du monde grâce à l’incroyable
« Farvegir Fyrndar » tempétueux et hypnotique, qui montrait que sans être d’une violence appuyée la musique proposée réussissait quand même à captiver de par son côté venteux riche en atmosphères et harmonies de toutes sortes. Du coup les gars avaient la pression tant ils étaient attendus au tournant avec ce troisième volet de leurs aventures, qui avait tout du piège vu qu’on savait qu’il allait leur être difficile d’égaler son magnifique prédécesseur, et pourtant malgré les doutes ceux-ci y parviennent haut-la-main, confirmant qu’ils sont bel et bien devenus aujourd’hui un groupe majeur. En effet jamais leurs compos n’ont été aussi denses et attirantes et pour y parvenir ils ont mélangé à la fois le côté direct et furibard de leur premier disque éponyme aux ambiances apaisantes et tumultueuses de son successeur, tout en proposant des morceaux parmi les plus courts de leur répertoire et d’autres au contraire qui se font très longs, sans jamais baisser en accroche et en qualité.
Car là-encore malgré une écriture à la fois accessible et complexe l’ensemble ne va jamais faiblir d’un iota et garder une homogénéité constante et hyper pointue, preuve en est d’entrée avec l’impressionnant « Einn Um Alla Tíð » et ses huit minutes au compteur, qui va montrer toute la palette de jeu et d’émotions des insulaires, où l’ensemble se mélange facilement et reste très digeste sans discontinuer. Débutant de façon délicate via des notes acoustiques posées on se croirait au petit matin avec le jour pointant le bout de son nez, avant que la suite ne montre son visage électrique entre vitesse imposante et tabassage massif, mais d’où émerge une finesse via l’apport d’une pause où l’ensemble se fait plus apaisé et moins éruptif (avant que le déchaînement des éléments ne reprenne de plus belle jusqu’au bout). Avec cette plage la plus élaborée le groupe veut donner directement le ton de ce que sera cette quasi-heure en sa compagnie, riche en surprises et en émotions où l’on va entendre ici et là quelques passages où l’orgue Hammond et le Mellotron vont retentir, de façon discrète mais intéressante, sur les passages les plus enivrants et endurants. En attendant de les entendre c’est le court « Eldborg » qui retentit et montre que l’entité est tout aussi convaincante dans le domaine de la radicalité, vu qu’ici ça se fait beaucoup plus explosif et montre une grosse combativité via un tempo élevé pratiquement en continu, et un mid-tempo redoutable propice au headbanging. D’ailleurs pour rester dans cette voie de l’éphémère l’entraînant et volcanique « Drepsótt » va dépoter par sa relative simplicité et sa ligne directrice bas du front (qui n’oublie pas cependant d’aérer son propos en ralentissant), à l’instar de « Á Himin Stara » épique à souhait par sa rythmique médium qui donne envie d’affronter les éléments et d’aller au combat, portée là-aussi par des longues lignes de tabassage réussies, où se mêlent néanmoins toujours un soupçon de lumière parmi les ténèbres.
Et en effet outre celles générées par les nappes de claviers les atmosphères redoutablement fluides sont également renforcées par l’apport d’une guitare supplémentaire qui densifie autant les parties rythmiques que les leads (toujours aussi impeccables et lumineux), la preuve sur le tentaculaire « Birtan Hugann Brennir » à la fois plus glacial et neigeux d’un côté, mais aussi plus énervé de l’autre de par un côté rampant et obscur qui renforce le sentiment d’ambiguïté général. Ce point de vue va d’ailleurs s’entendre encore par la suite par les équilibrés et tentaculaires « Horfin Mér » (à la fois brumeux et guerrier sur sa première moitié, et plus lourd et posé dans la seconde), qui donne la sensation d’être allé combattre l’ennemi avant ensuite de constater les dégâts et les victimes, toute comme sur le classique et redoutable « Ljóstýra ». Ici l’alternance des forces est de rigueur tant ça joue le grand-écart entre contemplation et rage furieuse sans que jamais personne ne prenne le pas sur l’autre, tout cela avec la voix possédée du frontman qui a encore gagné en puissance et profondeur. Cela est flagrant sur « Verður Von Að Bráð » parfait là-encore pour guerroyer grâce à son riffing agressif et ses roulements de batterie nombreux, tout en faisant suffisamment bouger la tête de l’auditeur de par sa sobriété (où les accélérations sont majoritaires).
Du coup après tout cela histoire de terminer de la plus belle des façons, les nordiques nous balancent le quasi-instrumental « Vökudraumsins Fangi » qui reprend grosso-mode les mêmes éléments qu’entendu au démarrage de ce bijou. Entre arpèges apaisants (propices à la rêverie en pleine nature sauvage) et rythme posé qui ne change pratiquement d’un pouce, tout ici peut faire penser à un endroit où règne luxe, calme et volupté… sauf que les Islandais ont décidé d’étonner une dernière fois leur auditoire. Car si la lumière diurne a encore le droit de citer elle va s’effacer doucement mais sûrement du fait des cris déchirés de son leader qui sont là pour rappeler que le chaos et la radicalité ne sont jamais bien loin, même si ça reste assez tranquille et parfait en guise d’outro.
D’une beauté totale et possédant un magnétisme imposant cette nouvelle réalisation est tout simplement la meilleure sorti à ce jour par ses géniteurs, qui se sont encore une fois surpassés en matière de composition et d’influences, riche en inspirations diverses où la beauté sauvage de leur île, conjuguée au désespoir et la perdition au milieu de nulle part est prépondérante, et ressentie de manière totale. Etant aussi efficaces quand ils étirent leurs propos que quand ils vont à l’essentiel ceux-ci ont trouvé l’accord parfait pour faire de leur création commune une pièce-maîtresse de la scène noire de leur nation, toujours aussi douée pour créer quelque chose d’unique en son genre. Autant dire qu’avec tant de choses positives ils ont rempli aisément leur contrat, poussant plus loin leur patte sans la dénaturer et sans rebuter les fans de la première heure (tant ça n’en fait jamais trop et reste assimilable en toutes circonstances). Du grand art qui à l’instar des grands vins se dégustera aisément et se découvrira progressivement auprès des amateurs de bon goût, tant ça fera plaisir aux papilles comme aux conduits auditifs les plus exigeants, chose qui est largement le cas ici avec cette galette qui trouvera facilement sa place parmi les toutes meilleures de l’année.
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