Wayfarer - A Romance with Violence
Chronique
Wayfarer A Romance with Violence
Si l’on savait que les membres de BLOOD INCANTATION avaient plusieurs cordes à leur arc (de Sioux), Paul Riedl en tête, Monsieur Isaac Faulk, multi-instrumentiste de son état, n’est pas en reste. Officiant à la batterie, son instrument de prédilection, depuis près de dix ans au sein de WAYFARER, ce dernier et ses non moins brillants compères ont la régularité d’un métronome, avec un album tous les deux ans, les deux derniers étant sortis sous la bannière de PROFOUND LORE RECORDS, label canadien, ô combien respectable. Leur quatrième long format intitulé A Romance with Violence, sorti en octobre de cette sombre année 2020, fut l’un de mes rais de lumière, une flèche scintillante transperçant ces désespérantes ténèbres.
A Romance with Violence est une invitation au voyage, mais bien différente de celle de Charles Baudelaire ! C’est une traversée, parsemée de dangers, des grands espaces encore ensauvagés de l’Amérique du XIXème siècle (la cover de l’album est une véritable photo prise en 1868, un minuscule morceau d’une immense histoire). WAYFARER nous invite à descendre de ce train s’arrêtant dans un strident crissement de roues, crachant son élégant panache de fumée, à nous frayer un chemin parmi les chevaux, les indigènes et les chercheurs d’or et à pousser les portes battantes d’un saloon où nous attendent filles de joie corsetées (mais syphilitiques) et bandits de grand chemin couverts de sueur et de poussière.
A Romance with Violence s’ouvre sur un court titre instrumental « The Curtain Pulls Back », jolie ritournelle couplant piano mécanique et violon au son discrètement grésillant, mais les Américains n’en font pas des tonnes, ne tombent pas dans le cliché, évitent soigneusement les pièges du folk(lore) de supermarché et n’abuseront pas de ce genre d’artifice ou de mise en ambiance de pacotille. Nul besoin et c’est bien là leur tour de force : les mélodies sont plus enivrantes qu’un mauvais whisky, les trémolos jouissifs tourbillonnent plus rondement que les volutes de fumée d’un âcre cigare mâchouillé par une bouche édentée, un sentiment profond de nostalgie mêlé de fureur, de celui du pionnier déraciné à la recherche d’un lopin de terre pour faire bouffer sa marmaille morveuse et souffreteuse, imprègne chacun des sept morceaux de bravoure musicale. Mélodies douces-amères, lignes de basse élégantes, changements de rythme habilement articulés, percussions subtiles, accélérations jubilatoires, growl chargé d’émotions enchantent sur des titres comme « The Crimson Rider (Gallows Frontier, Act I) » ou encore « The Iron Horse (Gallows Frontier, Act II) » ce dernier nous entraînant dans une chevauchée fantastique que n’aurait pas reniée John Wayne. Il vous faudra ensuite reprendre votre souffle à mi-parcours avec la bienvenue ballade « Fire & Gold » au chant clair désillusionné et à l’ambiance spleenétique, avant que « Masquerade of the Gunslingers » ne viennent vous repiquer au vif à coups d’éperons prestement décochés. « Vaudeville », masterpiece de plus de dix minutes, clôturant brillamment cet album dans lequel il n’y a pourtant rien à jeter, est un concentré de tout ce que contient ledit opus : envolées furieuses, passages plus lents d’une grande finesse, je dirais même d’élégance, alternance judicieuse du chant clair et du growl, un joyau d’une grâcieuse et rare beauté qu’il est bien difficile de se sortir de l’esprit.
En quarante-cinq minutes, WAYFARER esquisse avec brio l’histoire d’une Amérique naissante, en saisit l’esprit de conquête, la Nature y est encore sauvage mais saisissante de beauté, le danger de mort permanent, les périples longs mais aussi tumultueux. A l’issue de cette périlleuse expédition, ces quatre fiers orpailleurs nous offrent une bien belle et bien brillante pépite.
| ERZEWYN 8 Décembre 2020 - 1814 lectures |
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