Rites of Daath - Doom Spirit Emanation
Chronique
Rites of Daath Doom Spirit Emanation
Encore un album d’un groupe Polonais ? Bin oui, jamais deux sans trois comme on dit ! Mais attention, pas de Black cette fois-ci, non Môssieur ! Les gars de Rites of Daath (anciennement Cemetery Whore, nom qui ne collait plus aux aspirations du groupe) aiment le Death/Black caverneux, le « Death/Black cavernous » as they say. Cela s’entend tout de suite à l’écoute de leurs skeuds et ils le disent eux-mêmes en interview ; ils ont même une petite préférence pour les groupes Australiens, comme Portal et Temple Nightside. Pour continuer sur le name-dropping, les noms de des papas Incantation et Grave Miasma me sont tout de suite venus à l’esprit.
Concentrons-nous maintenant sur la musique du groupe, passée cette partie «attrape mouche ». Écouter du Rites of Daath c’est comme prendre part à une expédition de spéléologie qui tourne mal, très mal même. J’espère que vous n’avez pas oublié votre bonbonne d’oxygène car le maître-mot de cet album est « suffoquant ». Dès les premières secondes, on manque d’air, on gratte sans réfléchir les parois de la caverne à la recherche de la sortie ou d’une simple lueur. Pendant près de 38 minutes, le noir sera votre seul ami, l’angoisse votre seul sentiment, la mort votre unique pensée fataliste, et remplir goulûment vos poumons d’oxygène votre seul but. Dans cette caverne cauchemardesque, personne ne vous entendra crier, alors préparez-vous. Les polonais ont poussé le vice jusqu’à faire sonner l’ensemble de la production étouffé, comme si tout avait été enregistré dans un espace extrêmement restreint et confiné. L’atmosphère est lourde, la musique est lourde, tout pèse une tonne, chaque mouvement est une souffrance. Je vous l’assure, j’ai même l’impression que les musiciens ont des difficultés à jouer, sans bien sûr altérer la qualité de leur jeu : exemple sur le premier titre, où les deux gratteux se répondent par soli, vous n’avez pas l’impression qu’ils ont du mal à se lancer, et ce, de manière fébrile?
Démarrant pourtant en trombe, rien ne va arrêter nos hommes des cavernes. On se sent pris au piège dans cet environnement sinistre, où le groupe progresse avec une force de frappe de bourrin. Il prend aussi un malin plaisir à lâcher des breaks titanesques qui se répercutent dans tous les coins de la caverne, pour ensuite surprendre l’auditeur en reprenant instantanément son allure de tunnelier. Mais loin de délivrer un album de Death Metal bête et méchant, et tabasser en continu, Rites of Daath sait aussi retenir sa furie et saupoudre çà et là des passages plus Doom et ambiants pour laisser lentement l’angoisse s’installer et tenir en haleine ses auditeurs. La quatrième piste « Primeval Depth Chaos » résume parfaitement cet aspect du groupe ; déboulant sur du Death qui tache, le style bascule progressivement vers du pur Death/Doom, morbide et putride à souhait, pour un rendu complètement agonisant. La mort, principal sujet de ce disque est omniprésente. On note des moments plus mystiques et spirituels, principalement sur les parties plus lentes et mid-tempos, ainsi que sur les passages comprenant ces hurlements plus humains et colériques.
Si il n’y avait que l’atmosphère présente qui foutait les jetons, ce serait presque une partie de plaisir. Dans le noir complet, on ne voit pas le temps passer ; dans le noir complet, on devient fou ; dans le noir, l’ouïe remplace en partie la vue. Et dans cette caverne, vous ne serez pas seul. Je ne peux vous parler de Rites of Daath sans évoquer le growl de TP. Sa voix effrayante et morbide ne vous quittera pas un instant, même quand le chanteur laisse l’instrumental parler à sa place. Comment se fait-ce, me direz-vous ? Et bien cette voix grave et caverneuse comme pas possible se jouera de vous. Comme un courant d’air, elle disparaît subtilement, se tapit dans l’ombre, derrière l’instrumental, on ne sent plus sa présence jusqu’à ce qu’elle revienne en force pour ensuite se fondre à nouveau dans la masse. Tout cela est mis en valeur grâce au mixage de l’album, qui va tantôt la faire ressortir et tantôt la cacher, ou même placer des effets dessus pour donner une impression d’écho.
Malgré les influences citées précédemment qui peuvent sauter aux oreilles, Rites of Daath propose un Death mâtiné de Doom qui ne lasse à aucun moment et qui est loin d’être une énième copie fadasse et insipide, qui avale et régurgite bêtement la musique de ses aînés ou de ses contemporains. Je n’aurais pas cracher sur une production un peu plus rugueuse, plus « granuleuse » comme on dit, mais c’est vraiment un tout petit détail. Encore une belle sortie made in Godz ov War, chapeau au label pour son roster varié et de très bonne qualité.
| Anken 10 Décembre 2020 - 1062 lectures |
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