Avec l’arrêt du
Netherlands Deathfest de Tilburg, délocalisé à Eindhoven en 2022, c’est un petit pèlerinage annuel qui tombait à l’eau, le truc qui, pour citer Monsieur Manatane, me faisait sortir de ma connerie. Aussi, l’annonce d’un retour du
Bloodshed Fest sur deux jours, avec qui plus est une affiche particulièrement alléchante, nous fit prendre aussi sec notre vrombissant véhicule en direction de Hengelo. C’est loin, peut-être même trop loin depuis Paris, mais c’est beau. Enfin beau… C’est juste histoire de placer une citation de Chirac car ce que l’on verra de la ville se limitera à peu près à la gare et à la salle, située juste en face de la gare. Retenez cependant si vous y allez que le kebab de la gare est probablement le meilleur point d’alimentation possible du quartier mais méfiez-vous des jalapenos, ils sont particulièrement hostiles. D’ailleurs, autant traiter de suite l’aspect purement alimentaire : si vous voulez bien manger dans un festival, j’imagine que les habitués ont déjà mis un drapeau noir sur les Pays-Bas, celui-là ne faisant pas exception à la règle : la tronche des sandwiches vendus dans la roulotte m’a clairement fait passer l’envie d’avaler quoi que ce soit le samedi, même si je n’ai pas testé les victuailles de la salle qui avaient l’air plus digestes. D’ailleurs, le
Metropool est plutôt bien foutu, avec ses multiples bars, son point restauration et ses deux scènes, une grande et une (trop) petite, rapidement saturée. Même si ce n’est vraisemblablement pas complet, cette première journée du samedi a attiré pas mal de monde, il faut dire que niveau
grind,
crust et autres joyeusetés, l’affiche est particulièrement garnie. Comme toujours, on rate à peu près toute la première partie de la journée, il faudra donc se tourner vers d’autres médias pour avoir un avis sur les prestations respectives de
I SCREAM: PROTEST,
FROM THE CRYPT,
RAW PEACE,
ADRESTIA,
REPROACH,
CONSOLATION,
LIVE BURIAL,
RIPPED TO SHREDS (sans doute une grosse erreur que d’avoir manqué ces Américains). Même
TEETHING et
INHUME passent à la trappe, c’est dire si les préoccupations du weekend furent extra musicales… Bref, on ne va pas s’apitoyer sur le lait renversé, ou un truc dans le genre, nous avons vu ce qu’on a bien voulu voir.
N’étant quand même pas totalement fini à la javel, j’assiste à la performance de
ROTTEN SOUND et même si elle fut évidemment hautement dévastatrice, je n’ai pas pu m’empêcher de la trouver bien moins sauvage que les deux autres fois où j’ai pu les voir. Je ne connais certes pas encore
« Apocalypse » mais j’ai trouvé que la prépondérance de passages légèrement
sludge faisait clairement trop baisser le degré de violence, d’autant que la formation a fait un finish absolument terrassant avec quelques pépites
grind de quelques secondes. C’est clairement quand ça avoine le plus que les Finlandais me semblent être au-dessus du lot, le set a donc alterné l’excellentissime avec des éléments plus convenus, toujours dans ce style si suédois qu’on leur connaît. Après, je ne vais pas faire la fine gueule non plus, c’est toujours cool de voir
ROTTEN SOUND en concert, avec un espace et une sonorisation à la hauteur de leur hargne. Ensuite, il y eut le cas
GRONIBARD. Il faut être honnête, je n’ai jamais été un grand amateur de leur musique, de leur humour, et je n'ai toujours pas jeté une oreille sur «
Regarde les hommes sucer », en dépit des bonnes critiques lues ici et là. Me concernant, j’ai trouvé le concert assez quelconque, pas vraiment aidé par une sonorisation qui avait dû partir s’acheter un en-cas. Il reste que, comme beaucoup de monde, c’est la première fois que je les voyais et que ça ne se reproduira pas de sitôt, il s’agissait donc de savourer l’instant sans trop chercher la petite bête, d’autant qu’un fest sans groupe de
gore grind, ce n’est pas vraiment un fest et qu’à choisir je préférais eux à un
GUTALAX par exemple, dont l’engouement m’a toujours laissé perplexe…
WOLFBRIGADE ayant annulé sa prestation le jour-même pour cause de Covid, c’est plein d’entrain que je me dirige vers
MASSGRAV dont le «
Slowly We Rock » m’avait bien secoué il y a quelques mois. Bon, alors peut-être que je n’avais pas l’esprit à cela mais j’ai assez vite déserté la salle : trop rock’n roll, voire en flirt avec un
punk à roulettes énervé, je n’ai pas du tout retrouvé l’esprit
powerviolence qui se dégage du dernier album et j’avoue avoir été rapidement lassé par la prestation des Suédois. J’y ai sans doute mis de la mauvaise volonté, je ne sais pas, ou alors j’étais fatigué mais je suis passé complètement à côté de la performance… Ce qui n’est pas bien grave puisque ce samedi, ce qui m’intéressait avant tout, c’était
PIG DESTROYER. C’est vrai que les mecs surfent davantage sur leur légende que sur la qualité de leurs disques récents, ce n’est guère fameux depuis 2007… Je n’en avais pourtant rien à foutre tant j’étais heureux de les voir en live. Alors même si je n’ai pas vraiment compris à quoi servait
Blake Harrison puisque ce qu’il faisait avec son synthé était inaudible, j’ai quand même pu avoir un vague aperçu de ce à quoi devait ressembler la formation lors de ses heures de grandeur : une bête féroce, impitoyable, qui balance un
grindcore technique et malsain de fada. Bref, c’est sans aucun recul que je conclus cette première journée en affirmant que ce fut clairement le meilleur concert. Si j’ai des regrets quant aux formations manquées ? En aucune façon, mais j’ai pourtant une interrogation : pourquoi n’ai-je pas acheté un t-shirt ?
Le dimanche, l’affluence me semble bien moindre et ce sentiment fut bien vite confirmé par les premiers concerts. L’affiche du jour était-elle trop
metal ? Trop éclectique ? Il reste qu’il y a bien un tiers de la population en moins et cela est surtout flagrant sur la scène principale où les trous dans la fosse se creusent à vue d’œil. Passons… Adieu
CHARRED ATLAS,
ANCESTRAL SIN,
IRON DEATH,
CAEDERE,
GATES TO HELL,
LIFESICK,
TEETHGRINDER,
KRUELTY, je ne vous ai pas laissé la moindre chance de me séduire en n’assistant pas à vos performances. Encore une fois, à tort ou à raison ? Le premier concert du dimanche fut donc
MORTIFERUM, le truc parfait pour attaquer. Etant très amateur de leur
doom death fangeux, la prestation fut parfaitement conforme aux souvenirs que j’avais du passage au
Klub à Paris : pesant, méphitique, la bande-son d’une lente agonie. Il était également hors de question que je loupe ma madeleine de Proust :
NOSTROMO. Alors que la salle principale semblait bien déserte, les Suisses ont offert tout ce que j’espérais d’eux : les meilleures compositions d’
« Ecce Lex » et d’«
Argue », les morceaux plus récents semblant effectivement plus anecdotiques, même si la grosse patate était bel et bien là. Mais dès que les musiciens partent sur leurs rythmiques techniques et ce
hardcore grind puissant, ils restent pour moi intouchables. Donc, en synthèse, je suis aux anges d’avoir enfin pu voir
NOSTROMO et rien que pour ça le déplacement valait la peine (oui je sais que le groupe était à Paris une ou deux semaines avant mais je ne pouvais pas y aller). Ce fut ensuite au tour des Français de
BLOCKHEADS d’investir la salle principale, concert principalement marqué par la montée sur scène de mes deux camarades Petit Louis et Chris, le premier pour un beau headbang, le second pour une gorilla dance du plus bel effet ! Plus sérieusement, je pense que c’est l’un des trucs les plus vénères que j’ai pu voir en concert. La putain de violence ! La putain de rage ! La putain de technique ! La putain de sa mère ! J’ai été littéralement soufflé par ces relents de napalm et c’est vrai qu’à comparer, la prestation de
ROTTEN SOUND la veille fait pâle figure tant le set fut d’une brutalité absolue du début à la fin. En un mot : branlée. Ultime et définitive, les mecs ont carbonisé la salle.
Je ne sais plus trop pourquoi je n’ai pas été voir
GADGET, mon pote Coco me dit que c’était mortel et je veux bien le croire mais je n’y étais pas… Alors qu’à
GAEREA, je fus aux premières loges. A priori, je n’attendais rien de ce groupe, je me demandais même ce que foutait du
black metal là-dedans, sans compter l’image
post que j’en avais et pourtant, c’est peut-être pour moi le meilleur concert du week-end. Si j’occulte le fait que l’arrivée du groupe sur scène a été gâché par une sonorisation ayant oublié de brancher les guitares, tout m’a séduit : les compositions, l’énergie, la mise en scène théâtrale, la gestuelle originale du chanteur. Est-ce à cause de la présence des Portugais qu’il y avait tant de femmes en ce dimanche ? La question se pause étant donné que c’est la formation qui a eu la plus grande affluence. Mon analyse est donc la suivante : 1/Les crust purs et durs n’ont pris leur billet que pour le samedi. 2/Les mecs en couple ont accompagné leur nana le dimanche, d’où la baisse de fréquentation. Moi, je m’en fous pas mal, j’irai clairement écouter la discographie de
GAEREA car ce que j’ai vu m’a donné envie d’aller plus loin dans la connaissance de la formation.
Le festival se termine avec la traditionnelle prestation de
SUFFOCATION, toujours impeccable en termes de rouleau-compresseur musical. Son
brutal death est un modèle du genre, j’adore particulièrement quand il flirte avec le
slam, les mecs atteignent alors un niveau de puissance et de groove quasi inégalable. Evidemment, le chant de Ricky Myers est toujours aussi hallucinant dans son ampleur gutturale, avec une présence scénique tout en force brute qui complète parfaitement la technicité des compositions. Rien à redire, rien à jeter, le professionnalisme des Américains est total. En définitive, ce
Bloodshed 2023 a su répondre présent tant en termes de choix des artistes que d’organisation, même si l’écart d’affluence entre les deux journées est sans doute à mettre sur le compte d’un dimanche trop hétérogène, notamment au niveau de ses têtes d’affiche. L’ambiance était plutôt à la confiance étant donné que la fouille était inexistante, le prix des boissons raisonnable, le fait d’avoir un vrai bar permettant de s’abreuver avec d’autres choses que de la bière, que ce soit en alcool ou en soft (ginger beer, etc.) Par conséquent, si l’affiche de l’année prochaine est de ce calibre, je suis d’ores et déjà partant pour y assister !
1 COMMENTAIRE(S)
13/05/2023 19:35
La grande question est : quand aura-t-on le plaisir de voir BLOCKHEADS à Paris ? J'ai l'impression qu'ils ne sont pas passés depuis un moment.