Forsmán - Dönsum í Logans Ljóma
Chronique
Forsmán Dönsum í Logans Ljóma (EP)
Entre Ván Records et l’Islande c’est une histoire d’amour qui dure déjà depuis quelques temps et qui continue fidèlement encore aujourd’hui, tant le label de Rode-le-Duc a donné sa chance à nombre de formations venues de l’île nordique (SLIDHR, SINMARA, ALMYRKVI, SVARTIDAUÐI, 0) qui le lui ont toujours bien rendu par la suite en sortant des disques d’une qualité imparable. Continuant son travail de défricheur local voici avec FORSMÁN le nouveau venu au sein d’un catalogue toujours aussi intéressant, car avec ce premier Ep le quatuor de Kópavogur marque d’entrée son territoire et son arrivée chez les grands, vu qu’en vingt-cinq minutes il livre un récital hyper cohérent où le son typique de ses compatriotes côtoie celui plus brut et direct de ses ancêtres et colonisateurs Norvégiens. On sent effectivement que la bande a pioché des deux côtés et qu’elle l’assume complètement car si chacun des quatre morceaux ici proposés ont leur propre personnalité ils ont néanmoins un vrai fil conducteur commun, et ne sont finalement pas si différents les uns des autres en jouant sur le dosage et la subtilité… chose à laquelle chacun des membres est parvenu à le faire avec une précision chirurgicale conjuguée à un professionnalisme implacable.
Car d’entrée avec l’excellent « Falsgod » le ton va être donné sur ce que va être cette galette où les longs blasts tempétueux ne cessent d’alterner avec des parties plus lentes et légèrement atmosphériques, typiques de la météo Islandaise. Mais là où les gars lorgnent à l’est vers les Trondheim, Oslo et consorts c’est lorsqu’ils jouent sur la vitesse et l’entrain, on remarque cela ici avec un riffing acéré et coupant qui nous renvoie notamment vers TAAKE et URGEHAL, pour un rendu qui se mélange totalement aux passages plus éthérés et portés par une production naturelle et équilibrée, où la basse bien chaude amène un vrai supplément d’âme. Ne descendant jamais sous les cinq minutes l’ensemble des compositions proposées ne souffrent jamais de longueurs ni de répétitions inutiles, tant la qualité de l’écriture et la densité générale y sont impeccables de bout en bout, preuve dans la foulée après ce démarrage en fanfare avec le tentaculaire « Milli Eilífdar Og Einskis » où toute la panoplie de jeu des mecs est présente. Voyant l’ajout de parties dynamiques et épiques propices au headbanging dans sa première moitié et de moments plus lumineux et remplis d’espérance dans la seconde, tout cela permet de jouer autant sur la radicalité que sur une certaine émotion, un constat qui va se retrouver dans la foulée via « Vonarglaeta ». Poussant ici plus loin encore la diversité des ambiances et l’alternance rythmique on y voit l’apparition d’une mélodie un peu plus affirmée (mais qui reste néanmoins en retrait par rapport à la brutalité générale), tout comme d’un côté martial mis en avant de par ses coups de caisse claire entêtants qui donnent le tempo de la marche des troupes vers le champ de bataille. A la fois nocturne et lumineux, aidé par ses rafales de coups rapides autant que quand ça lève le pied il amène un supplément d’espérance autant que d’idées noires, avant l’apparition de la conclusion (« Hamfarir ») qui va servir de bouquet final en reprenant l’ensemble des différents éléments entendus jusque-là. Cependant ici la touche insulaire va être un peu plus présente tant le côté ronronnant d’une éruption imminente se fait entendre, mélangeant ainsi le feu et la glace au milieu de rafales de violence et de cassures plus apaisantes illustrant l’idée du calme avant et après la tempête.
Avec son Black Metal à l’ancienne et dépouillé d’éléments pompeux et grandiloquents le groupe réussit totalement ce passage en studio prouvant que son pays a toujours des choses à dire et qu’il n’a pas à rougir par rapport à tous ceux qui l’ont précédé. Misant sur une certaine vision originelle du genre il montre néanmoins qu’il n’est pas obtus et qu’il n’a pas peur d’ajouter un soupçon de personnalité, afin de se démarquer et de sortir de l’underground. Une fois encore on ne peut que s’incliner devant le niveau et la productivité de la scène de Reykjavík et ses alentours qui se maintient années après années dans le haut du panier européen et mondial, ce qui n’est pas une mince affaire quand on est à peine plus de 360.000 habitants. Autant dire qu’on a déjà hâte d’entendre la suite des pérégrinations de l’entité sur une durée plus importante, afin de voir si elle confirme tous les espoirs entrevus ici… ce qui semble quand même assez probable quand on voit le sérieux et l’implication qui ont été mis sur ce court-format dissonant et chaotique, mais totalement digeste sur le fond comme la forme.
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