Passage sur Svart Records, label d’envergure en ce qui concerne le doom metal ; cap du troisième album après deux œuvres ayant permis aux Italiens d’avoir un succès d’estime grandissant au sein de la scène ; maîtrise de plus en plus présente d’un genre codifié dans lequel ils s’inscrivaient avec une personnalité se développant au fur et à mesure… Il y avait toutes les raisons de croire que Messa allait se préparer à frapper un grand coup avec
Close, longue-durée où j’espérais plus que le sentiment agréable surplombant quelques maladresses qu’avait laissé
Feast for Water. Et – joie ! – c’est bien ce qui se passe ici, à croire que la bande était consciente du tour qu’il y avait à jouer… Mais c’est aussi, paradoxalement, ce qui l’empêche de convaincre totalement. Explications.
Un simple regard extérieur permet de voir que Messa a mis les petits plats dans les grands avec
Close, ne serait-ce qu’avec sa durée demandant une implication continue sur le temps long pour apprécier son contenu (on remerciera à ce sujet d’avoir laissé une grande marge d’écoute avant sa sortie aux pisse-copies dont je fais partie, tant cela est de plus en plus rare). Une grosse heure d’un doom metal protéiforme, aussi vintage qu’expérimental, guidé par un concept mêlant occultisme et traditions moyen-orientales ainsi que méditerranéennes – passant de l’utilisation d’un Oud sur certaines pistes à des références au Nakh, pratique rituelle visant un état de transe et rappelant le headbang dans sa forme – demande en effet un certains temps pour s’appréhender. Heureusement, la simplicité d’exécution qui faisait déjà la force de
Feast for Water est toujours de mise ici, les compositions avançant une nouvelle fois avec fluidité au sein des influences variées sur lesquelles elles s’appuient.
Une simplicité qui permet d’apporter ce qu’il faut de modestie aux objectifs ambitieux que s’est assigné Messa sur
Close. Étant donnée la diversité des territoires visités – jazz, blues, rock progressif, musiques rituelles, tous placés sous l’égide d’un doom canonique, rock avant d’être metal –, il est étonnant de voir avec quel naturel se meuvent les nomades, menés une nouvelle fois par la voix à la fois enjôleuse et puissante de Sara Bianchin. Une évidence qui tient par des compositions ciselées plutôt que l’affichage ostentatoire d’une originalité : point d’esbroufe au sein de ces dix titres, plutôt l’envie d’un mariage de différents styles et cultures qui est leur propos-même, débutant dans un premier tiers prenant le meilleur de
Feast for Water pour explorer de plus en plus loin en son centre. Clairement, les amateurs conquis par le précédent disque des Italiens seront aux anges à l’écoute de « Suspended », « Dark Horse », « Orphalese » et « Rubedo », petite quadrilogie faisant sienne avec brio un doom metal langoureux et sauvage (les accélérations de « Dark Horse » ; la tension de « Rubedo »), évoquant même la beauté luxueuse d’un Paul Chain (magnifique « Orphalese »).
Des morceaux conquérants, presque trop pour une suite qui enchante davantage par ses bonnes idées que ses mélodies. Présenté au public via un clip rendant explicite cette envie d’aborder certaines thématiques peu courantes dans le style, « Pilgrim » reste un des moments les plus faibles de
Close, étrangement trop sage et convenu malgré l’utilisation d’instruments et sonorités moyen-orientales. Le groupe reste à son meilleur quand il joue avec les codes en filigrane, sans trop s’y appesantir, que ce soit dans un rappel à une ferme inscription dans la scène underground (les souvenirs de son concert au sein d’un squat punk non loin de Montpellier remontent à la surface avec l’attaque grindcore de « Leffotrak »), un hommage à ses influences progressives (« 0=2 ») ou dans un final touchant la majesté occulte d’un
Bathsheba (« If You Want Her to Be Taken » et « Serving Him »).
Messa a donc grandi sur
Close, passant d’une formation un brin passe-partout mais agréable en ces temps de disette pour amateur de doom metal à chant féminin (mais que devient
Jex Thoth ?) à une entité marquante, aussi ambitieuse dans son touche-à-tout que prenante dans ses meilleurs moments. Cependant, il reste en tête l’impression qu’il aurait mieux fallu couper quelques passages dans ces soixante-quatre minutes, l’ensemble perdant en impact ici ou là (un ventre mou sur « Hollow » et « Pilgrim » principalement). Heureusement pas au point de penser à bouder son plaisir, cette générosité toute italienne – celle qui ose tout et n’offre pas moins – touchant plus d’une fois juste. Pour les fanatiques, un indispensable de cette année.
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