Le one man band français
TATTVA n’a vu le jour qu’en 2020 et il semble dévoré par une soif inextinguible de compositions puisque l’on peut déjà mettre à son actif trois EP en comptant cet «
Abysmes », un split avec l’Américain d’
ASHES OF OLD (né à peu près à la même période), trois singles, une compilation et deux LP. Des choses à exprimer donc via ce medium qu’est le
black metal, ici abrité par
Drakkar Productions, un label au catalogue riche (et parfois subversif). Bien plus qu’une énième formation venant peupler (pour ne pas dire « encombrer ») le paysage métallique national, le groupe semble se différencier de la masse par sa dimension spirituelle issue d’une culture autre qu’occidentale (« tattva » signifie « vérité », « réalité » ou « essence » en sanscrit et est une composante de la philosophie indienne) et son fonctionnement par cycle d’inspiration : après avoir exploré le chemin de l’âme au travers de la trilogie «
Nirjara » (LP de 2021), «
Avanati » (EP de 2021) et «
Narak » (LP de 2022), le compositeur ouvre une nouvelle ère avec l’EP «
Abysmes », premier EP d’une deuxième trilogie donc.
Le disque s’ouvre avec le long (plus de dix minutes) titre éponyme sur lequel nous allons retrouver en vocaliste invitée
BROUILLARD, alias
Marie de
Transcendance dont les dernières sorties, notamment celle de
VERTIGE, ont très fortement marqué la scène hexagonale. Cette première composition fonctionne un peu comme une quête initiatique, dotée d’un texte riche et poétique évoluant, en termes de rage et d’intensité vocale, au grès des montées et descentes de l’instrumentation. Sa thématique maritime est d’ailleurs filée tout au long du disque (je ne compte pas la reprise de
CULT OF FIRE), tant sur l’instrumental « Naufrage » que sur « Le cri ». Mais alors que j’étais en train de m’émerveiller devant la finesse de plume de
J., j’ai fini par comprendre que l’autrice de l’intégralité des paroles était en fait
Louise Ackermann, une poétesse française du dix-neuvième siècle. Bien sûr, l’information n’est pas cachée par le groupe, j’avais juste mal lu / compris la démarche. Par conséquent, il y a d’un côté un aspect légèrement déceptif car l’usage d’un texte pré existant ne me permet pas de découvrir l’essence langagière propre à
TATTVA mais, d’un autre côté, ne vaut-il mieux pas utiliser les mots d’une autre plutôt que d’exprimer imparfaitement sa pensée ? Car il faut reconnaître les paroles sont parfaitement adaptées à l’ambiance musicale : un
black metal vif, froid, néanmoins mélodique, un vent d’hiver qui hurle à nos oreilles.
Je suis en revanche moins convaincu par l’instrumental « Naufrage ». Il joue certes le rôle d’un interlude avant la furie qu’est « Le cri » mais, autant sur un album complet je l’aurais accueilli pour ce qu’il est (un instant paisible de repos auditif), autant il me semble occuper ici un espace trop important bien qu’utile à la bonne compréhension de l’univers de
TATTVA où le silence n’est pas un vain mot. Alors la mélodie est certes belle mais elle ne fait définitivement pas le poids, coincée qu’elle est entre les deux grosses pièces principales de cet EP. « Le cri » d’ailleurs permet d’amener une dimension encore plus « raw » à la musique du fait de la rapidité de son tempo et d’un chant beaucoup plus incisif qui, encore une fois, s’approprie parfaitement le poème retenu. Nous sommes donc là face à un
black metal certes simple dans son expression mais dont la teneur émotive le rend finalement bien plus subtil qu’il n’y paraît et, surtout, rapidement attachant dans le sens où il a une fraicheur vivifiante. Concernant « Buddha 1 », je ne vous cache pas que j’ai rapidement zappé cette reprise car elle me faisait trop sortir de l’atmosphère développée précédemment. Ce n’est pas que l’interprétation n’est pas au niveau, loin de là, c’est juste que j’ai trouvé son ambiance trop en décalage avec les trois premières compositions, toutes très personnelles et émotionnellement fortes.
En définitive, même si un EP reste encore un met insuffisamment consistant pour que je me fasse une pleine et totale idée de ce qu’est
TATTVA, j’ai cependant hâte de découvrir la suite de cette nouvelle trilogie, ce qui donnera la possibilité de réécouter «
Abysmes » en le remettant dans son contexte global. La bande annonce est alléchante, maintenant j’ai envie de voir le film complet.
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