Inquisition - Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm
Chronique
Inquisition Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm
Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm arrive un peu, en cette fertile année 2010, comme un essai assassin qu'on se prendrait à la toute fin d'un match de rugby très disputé. En effet, cette année aura été très serrée en matière de Black Metal, tant les bonnes sorties qui en constituent le millésime en font l'une des meilleures années depuis longtemps. C'est ce nouveau INQUISITION qui vient déblayer violemment le « ruck » qui s'était accumulé devant l'en-but et s'emparer du ballon ovale. Le raffut qu'il administre à une des autres sorties Black Metal qui avait retenu mon attention cette année est foudroyant, tant et si bien que celle-ci se retrouve sur le cul sans avoir pu réellement résister à l'armada colombienne. Ominous Doctrines Of The Perpetual Mystical Macrocosm finit entre les poteaux, l'essai est transformé, et l'équipe dont il porte l'écusson sur le pectoral droit emporte cette rugueuse partie à l'arrachée, laissant quand même le point de bonus défensif à son adversaire.
Cette équipe de groupes de Black Metal qui refusent de sacrifier leur musique à l'aspect commercial qui a gangréné le style –et qui continuent de le faire –, INQUISITION en fait partie depuis 1988. Groupe culte né en Colombie qui a eu le mérite de développer dans ses premières démos un Thrash Metal bien agressif et criard dans un pays ou les musiques extrêmes étaient freinées par la grande majorité de chrétiens pratiquants (Thrash qui avait déjà la forme d'un « proto-Black Metal » similaire à celui des teutons de SODOM ou de KREATOR de l'époque), INQUISITION a ensuite fait partie de le Seconde Vague Black Metal en développant des compositions uniques, marquées d'une patte profondément occulte et dotées d'une réelle personnalité dans les années 1990. Les terribles Into the Infernal Regions of the Ancient Cult (1998) et Invoking the Majestic Throne of Satan (2002) constituent les piliers d'une musique on ne peut plus prenante et dévouée que seuls ces deux Colombiens savent pratiquer à la perfection. Les deux hommes ont toujours pratiqué un Black Metal atypique et immédiatement reconnaissable dès ces deux albums inattaquables qui ont tous deux marqué leurs générations.
Vous devez connaître ce genre de groupe dont on pense à chaque nouvelle offrande que l'album qui sort est le meilleur. INQUISITION en est assurément. Seule l'écoute de leurs 4 précédentes réalisations complètes ramène à la raison : et oui malheureux! Ces disques sont énormes aussi. Les Magnificent Glorification Of Lucifer, géante gradation dans la qualité diabolique sortie en 2004 et Nefarious Dismal Orations, la plus violente des réalisations de ces hérétiques américains sorti en 2007, sont là pour montrer que même dans les années 2000, INQUISITION a su défendre son rang de groupe culte sans jamais se reposer sur ses lauriers, pourtant nombreux. En effet, à chaque nouvel album, INQUISITION développe un nouvel élément qui sublime cette base initiale et donc renouvelle son essence profonde, pour autant toujours présente et intense. Nefarious Dismal Orations proposait il y a trois ans une brutalité quasi-permanente, avec de nombreux blast beats servant une ambiance déchaînée qui renforçait la véhémente haine de la chrétienté développée par ce combo depuis les débuts.
Sur Ominous Doctrines of the Perpetual Mystical Macrocosm, c'est la lenteur qui fait mouche. Une lenteur profane qui a toujours fait partie de la musique des américains et qui revient en force sur cette dernière œuvre : INQUISITION, sans perdre un seul iota de sa puissance occulte, inverse la formule du précédent rituel. Là où la violence triomphait, les deux êtres possédés par le Démon pénètrent l'auditeur avec des rythmes lancinants et ultra prenants. Dagon balance toujours ses riffs atypiques composés d'arpèges dissonants sur lesquels la guitare est tantôt grasse et primitive, tantôt mystique : la copulation parfaite de ses deux éléments se trouve sur le morceau « Desolate Funeral Chant », où la guitare attaque avec un rythme bien gras, plein de bends décapants, flirtant avec le Doom des familles, pour développer ensuite un arpège fatal complètement hypnotisant, véritable témoignage de la dévotion extraordinaire de ce combo de païens intégristes. Le guitariste, monstre de travail, a toujours cette faculté de composer des riffs qui ne peuvent s'associer qu'à un seul album de son groupe, renforçant la cohérence et l'unité de celui-ci. Chapeau bas! L'homme livre toujours ses magiques aigus qui raisonnent parfaitement et ressortent à merveilles, combinés à ses graves crasseux qui apportent une lourdeur jouissive, particulièrement sur cette nouvelle cuvée, dotée par la même d'une ambiance démentielle. Son jeu de guitare vraiment bonnard continue donc de battre des records d'authenticité tout en se renouvelant de manière excellente.
Mais attention, l'autre tête du groupe, Incubus, n'est pas reste, loin de là. L'homme se targue de quelques blast beats salvateurs, comme sur le terrible « Astral Path to Supreme Majesties », premier morceau ravageur qui introduit l'œuvre à merveille, ou sur « Cosmic Invocation Rites », dans lequel la mitraille démonte littéralement l'auditeur dont les cervicales à la peine se remettent à peine de mid-tempos réellement bandants. A lui tout seul, le batteur instaure un feeling destructeur de cervicales présent sur tout l'album, et son jeu varié, ses petits breaks bien sentis apportent considérablement à l'effet bœuf qu'Ominous Doctrines of the Perpetual Mystical Macrocosm produit déjà sur le pauvre auditeur, confronté à des cavalcades ritualistes géniales telles que le morceau éponyme, véritable pierre angulaire du disque. La façon dont Incubus fait sonner sa charleyston sur certains passages est juste énorme : la lourdeur démentielle qu'il apporte en la laissant ouverte est vraiment proche du génie. Jeu varié, disais-je, puisqu'il utilise tout aussi bien sa ride et ses cymbales crash, apportant ainsi une réelle finesse à un jeu qui sait surtout se faire bien gras, bien bourrin, et bien « evil », à l'image des coups de boutoirs de sa caisse claire au son encore meilleur que sur le précédent opus, ou de sa grosse caisse qu'il utilise avec inventivité aussi bien en double pédale qu'en simple : un feeling minimaliste mais terrifiant d'efficacité règne en maître durant tout ce Ominous Doctrines of the Perpetual Mystical Macrocosm. Mais ce n'est en aucun cas une surprise chez INQUISITION : cette osmose parfaite entre ces deux musiciens accomplis a toujours habité leur musique.
S'il n'y avait que ça, leur Black Metal serait déjà très bon. Mais la dévotion au Malin s'accentue encore davantage avec la voix de Dagon, incantatoire et burnée au possible. L'homme a toujours développé un style de voix unique : depuis le premier opus de style purement Black Metal (Summoning The Black Dimensions In The Farallones, 1996), l'homme déclame inlassablement un blasphème très intense, se passant de tout artifice ou de toute ficelle détestable. Une voix dont le débit presque « parlé » (d'où l'idée d'incantation) est rapide, et malgré le peu d'expressions et d'émotions qui en ressortent, le dynamisme reste intégral. Cette voix a toujours habité à la perfection la musique d'INQUISITION –et toujours rebuté les imbéciles (et c'est tant mieux, au moins ça sélectionne)- au service d'un concept satanique toujours très étudié et intègre. Cette voix laisse entrevoir des accents proches d'un Abbath période Pure Holocaust plus explicites sur ce dernier album pour le meilleur effet possible, car malgré cette très légère évolution, la voix de Dagon reste complètement ritualiste et possédée. D'ailleurs plus généralement INQUISITION ne renierait pas quelques influences IMMORTAL sur cet opus, la production notamment étant impeccable. Mais attention, en aucun cas les Colombiens ne subissent d'influences préjudiciables, ou si tel est le cas, c'est pour le meilleur. Du point de vue du concept, INQUISITION est un des seuls groupes estampillé « sataniste » qui arrive encore à diffuser un message réellement subversif, à travers sa musique seulement… et non ses actes, puisque les membres du groupes savent se faire discrets et finalement assez humbles malgré leur statut de groupe culte depuis des années. Cette musique qui véhicule la même dévotion oppressante depuis longtemps reste invariablement dangereuse, terrifiante de qualité, de talent, et impose Satan comme le roi de tous les païens, comme le proclame le dévastateur morceau présent sur le mythique Invoking the Majestic Throne of Satan : « Hail the King Of All Heathens ». Et l'auditeur de se prosterner devant le Maître à l'écoute du combo…
Lucifer, punish your enemies all over the night! Destroy them all! : voilà le coup de force d'INQUISITION en 2010 avec ce dévastateur Ominous Doctrines of the Perpetual Mystical Macrocosm. En réutilisant une recette qui a toujours fait sa supériorité dans cette scène de plus en plus vaste et en y ajoutant des éléments plus frais qui accentuent encore ses qualités, INQUISITION justifie sa renommée sur cette dernière offrande en sortant un album phare de cette année 2010. Désarçonnant, inloupable, mais le pire c'est qu'on s'y attendait, bordel de Dieu de vérole de Jésus Christ ! C'est pas demain la veille que ces terribles hérétiques du continent d'en face nous sortirons un album en-dessous des autres… Il est bien trop tôt pour dire si Ominous Doctrines of the Perpetual Mystical Macrocosm a l'étoffe d'un classique, mais a n'en pas douter le recul l'imposera comme tel… comme tous les INQUISITION, me direz-vous.
| Voay 19 Décembre 2010 - 6310 lectures |
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