Concrètement, il aura fallu près de dix ans aux Biélorusses de
CHALLENGER DEEP pour accoucher de leur troisième album. Les choses avaient pourtant commencé sur une cadence très honorable avec un LP («
Our Own Prisons ») en 2011 puis un deuxième («
Irreversible ») en 2014, deux splits (en 2013 avec les compatriotes de
BARROW et en 2015 avec les Polonais de
HEGEMONE), pour terminer ce premier cycle avec le single « Indifférence » sorti en 2016 et repris sur ce «
III. The Path », comme pour faire la liaison entre les périodes. Il a dû s’en passer, des choses, entre temps… Des changements de musiciens peut-être ? Les fameuses « divergences musicales » ? Je n’en sais rien.
Ce que je sais en revanche c’est que nommer un disque « III » quand les deux précédents ne sont pas dotés de numérotation, cela me semble toujours incongru mais je chipote certainement. Quoi qu’il en soit la rupture graphique avec le passé est consommée : exit les couleurs sombres, les montagnes, les plans d’eau et louons l’apparition de la clarté avec cette pochette très réussie qui pourra évoquer aux plus imaginatifs une énième déclinaison de la Chute de Satan. C’est qu’elle me met en appétit la bougresse ! Elle a un petit côté
black metal qui me laisse espérer que le
sludge post metal pratiqué par le quintette sera noir de chez noir, obscur et malsain.
Il n’en est rien. La formation, si elle pratique bien le
post parfois
rock, plus souvent
core, tend plutôt vers un univers fait de lumière et d’espérance (« Passion », « Joy »), une sorte d’
EXPLOSIONS IN THE SKY musclé, flirtant à l’occasion avec le
blackened mais sans jamais réellement tomber du côté obscur de la force. Même le chant, aussi rageur qu’il soit, s’évertue à proposer des lignes vocales « positives » si je puis dire, un peu à la manière de
Joe Duplantier, même si la comparaison s’arrêtera là,
CHALLENGER DEEP n’évoluant pas du tout dans la même division, ni même dans un registre musicalement similaire.
En sortie de ces six titres, je dois tout de même avouer que je ne retiens pas grand-chose de précis. L’écoute est plaisante, l’oreille est immédiatement accrochée par « Sacrifice », un titre fort qui laisse augurer le meilleur pour la suite mais, pris dans sa globalité, ce troisième album manque un peu trop de variété à mon goût, de plans qui te font dire que les mecs ont pigé un truc et qu’ils sont bien capables de te retourner la cervelle. Ce que j’apprécie le plus dans le
post, ce sont les atmosphères feutrées, les explosions brutales d’un riff monolithique qui tourne en boucle et enfonce la boîte crânienne ! Ici, les compositions manquent trop de nuances pour ne pas finir par lasser l’auditeur conciliant que je suis : les variations manquent d’impact et les instants extrêmes sont trop identiques. Une question d’oreille peut-être, d’autres y verront certainement des subtilités qui m’ont échappé.
La formation n’a pourtant pas à rougir de sa prestation, d’autant que l’album sonne bien mieux selon moi que les sorties précédentes, tant en termes de style pratiqué que de qualités même des instrumentistes, du chanteur en particulier. C’est juste que des albums évoluant dans cette veine, il y en a à la pelle et que, comme dans tous les genres saturés, il est de plus en plus difficile de se démarquer de la concurrence, aussi déloyale qu’elle puisse parfois être. La dure réalité étant donc ce qu’elle est, «
III. The Path » n’aura pas chez moi une espérance de vie supérieure à quatre écoutes, soit un peu plus de deux heures. Je le recommande néanmoins à tous les adorateurs du style qui se sentiraient en manque de reconnaissance en cette fin d’année.
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